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vendredi 9 mars 2018

Prescription, actes techniques, suivi du patient : ce que feront les infirmiers en pratique avancée demain





INFIRMIER
Crédit Photo : S. Toubon

Prévu dans la loi de santé de Marisol Touraine (2016), attendu depuis plusieurs mois par les infirmiers comme par les médecins, le projet de décret sur l'infirmier en pratique avancée, dont le « Quotidien » s'est procuré une copie, chamboule totalement les règles du jeu dans la prise en charge du patient et dans le parcours de soins.
La loi de santé avait pour ambition de créer un nouvel exercice en pratique avancée pour l'ensemble des professions de santé paramédicales, toujours au sein d'une équipe de soins.

En l'état, le projet de décret se concentre sur le développement de l'exercice infirmier en pratique avancée uniquement, une priorité pour le gouvernement dans le cadre du plan territorial d'accès aux soins. L'enjeu est de développer et de reconnaître le métier intermédiaire d’infirmier clinicien, dont le champ de compétences dépasse le métier socle de l'infirmier.
Selon le projet de texte réglementaire, l'infirmier en pratique avancée pourra exercer dans quatre domaines d'intervention : les pathologies chroniques stabilisées (notamment des personnes âgées), l'oncologie, la transplantation rénale, la santé mentale et la psychiatrie.
Les patients sélectionnés par le médecin
L'infirmier en pratique avancée peut intervenir « en présentiel ou à distance » à trois niveaux d'activité : l'orientation, l'éducation, la prévention et le dépistage ; la coordination des parcours « entre les soins de premier recours, les spécialistes de recours et les établissements et services de santé ou médico-sociaux » ; l'évaluation et les conclusions cliniques.
Il peut conduire un entretien avec le patient, réaliser une anamnèse de sa situation et procéder à un examen clinique.
En fonction des résultats obtenus, l'infirmier peut ensuite « réaliser des actes techniques nécessaires au suivi de la ou des pathologies et interpréter les résultats »« prescrire des examens complémentaires nécessaires au suivi du patient et interpréter les résultats », prescrire des dispositifs médicaux ou des médicaments « non soumis à prescription médicale obligatoire » ou « renouveler ou adapter des prescriptions médicales en cours ».
Le projet de décret précise le rôle du médecin dans l'équipe de soins et surtout, son rapport à l'infirmier en pratique avancée. C'est le médecin qui détermine, « pour chaque domaine d’intervention, les patients auxquels sera proposé, avec leur accord, un suivi par un infirmier exerçant en pratique avancée », qui doit en retour informer le praticien s'il repère une dégradation de l'état de santé du patient ou « une situation dont la prise en charge dépasse son champ de compétences ».
Huit pathologies, 40 examens de biologie, 16 actes techniques
Deux arrêtés très détaillés complètent le projet de décret.
Le premier fixe la liste des pathologies chroniques stabilisées, au nombre de huit, sur lesquelles l'infirmier en pratique avancée est autorisé à intervenir : accident vasculaire cérébral, artériopathies chroniques, cardiopathie, maladie coronaire, diabète de type 1 et diabète de type 2, insuffisance respiratoire chronique, maladie d'Alzheimer et autres démences, maladie de Parkinson et épilepsie.
Le second arrêté établit la liste des prescriptions médicales que l'infirmier en pratique avancée est autorisé à renouveler, des examens de biologie médicale et des dispositifs médicaux qu’il peut prescrire, des actes de suivi et de prévention qu’il peut demander et des actes techniques qu’il peut pratiquer.
Il peut « renouveler ou adapter » les prescriptions de produits de santé et d'actes infirmiers.
Il peut aussi « prescrire et interpréter » une quarantaine d'examens de biologie médicale dans huit domaines : hématologie, hémostase et coagulation, microbiologie, hormonologie, enzymologie, protéines, biochimie et urines.  
Il peut enfin pratiquer 16 actes techniques. Beaucoup font déjà partie du champ de compétences des infirmiers (prélèvements de sang, recueil des urines, etc.). Le point d'achoppement réside plus dans le fait que ces actes techniques peuvent être faits « sans prescription médicale », indique le projet de décret. Loin d'être anodine, cette précision apporte aux infirmiers une plus grande autonomie dans leur travail et redéfinit la nature du duo professionnel médecin-infirmier.  
Une réunion de concertation sur ces projets de textes réglementaires est prévue ce jeudi au ministère de la Santé entre les syndicats de médecins libéraux, d'infirmiers et l'Ordre des médecins. Les médecins, pour certains sceptiques sur le principe de pratiques avancées, trop intrusif à leur goût, vont-ils accepter en l'état le projet de décret ? En 2014, au moment de la concertation sur le projet de loi de santé, porteur de la mesure, les discussions étaient pour le moins tendues, malgré les gages apportés par Marisol Touraine. Reste à savoir si Agnès Buzyn parviendra à faire mieux.  

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