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lundi 18 décembre 2017

Une thérapie génique prometteuse contre la maladie de Huntington

Un médicament administré à des patients à un stade précoce de la maladie a bloqué la production d’une protéine délétère. Cet essai ouvre les portes à une possible guérison de la maladie.

LE MONDE |  | Par 

Une avancée formidable. C’est ainsi que les spécialistes de la maladie de Huntington (autrefois appelée chorée) qualifient l’annonce faite le 11 décembre concernant un essai de thérapie génique. Rare et héréditaire, la maladie de Huntington est la plus fréquente des maladies neurodégénératives du système nerveux central. Cette maladie génétique se caractérise par la mutation du gène codant responsable de la production d’une protéine toxique, la huntingtine, qui entraîne la destruction progressive de neurones dans le striatum, l’une des zones clés du cerveau.


Révélé dans la presse britannique, cet essai de thérapie génique a été mené sur 46 patients à un stade précoce de la maladie, dans neuf centres (Royaume-Uni, Allemagne, Canada). Ces hommes et femmes ont reçu le médicament, appelé Ionis-HTTRx, à quatre reprises, espacées d’un mois, ou un placebo pour un quart d’entre eux, injecté dans le liquide céphalo-rachidien au niveau des lombaires. Résultat : la molécule était bien tolérée, ce qui permet de poursuivre les investigations sur son efficacité.


« Révolution »


Lors de cet essai, le médicament a réussi à empêcher l’expression du gène de la huntingtine mutée, en interceptant l’ARN messager, une molécule qui permet sa fabrication. Un traitement basé sur un procédé similaire avait été approuvé fin 2016 aux Etats-Unis pour l’amyotrophie spinale (SMA), contre laquelle il a montré son efficacité.

« C’est au-delà de ce que j’espérais. Le médicament est sûr et bien toléré, et, pour la première fois, la concentration de la protéine huntingtine a largement diminué dans la moelle épinière de ces patients, c’est une révolution », a indiqué au Guardian la professeure Sarah Tabrizi, responsable du centre de la maladie de Huntington à l’University College de Londres, qui mène l’étude, financée par la société de biotech américaine Ionis Pharmaceuticals, associée au laboratoire Roche.

« Avec cette thérapie qui attaque la transcription des gènes, il ne s’agit pas d’éteindre les gènes mais de les empêcher de s’exprimer, décrit la professeure Anne-Catherine Bachoud-Lévi, qui coordonne le centre national de référence de la maladie de Huntington (hôpital Henri-Mondor, Inserm, ENS). La thérapie génique ouvre la porte à une guérison de la maladie. » « Toute la communauté Huntington se réjouit, c’est assez bouleversant de vivre et de partager un tel moment. Bien sûr, on ne sait pas encore s’il y aura un impact thérapeutique mais le seul fait d’être passé en phase 3 aussi rapidement est une formidable nouvelle », constate l’écrivaine Emilie Hermant, directrice du collectif Dingdingdong, un institut de coproduction de savoirs sur cette maladie. « C’est très encourageant, c’est la première fois qu’il y a une avancée aussi importante », constate de son côté la professeure de neurogénétique à l’ICM et à l’AP-HP Alexandra Durr.

Quelques bémols toutefois. L’essai n’a pas été conçu pour montrer une éventuelle amélioration des symptômes cliniques, ce qui avait déjà été constaté chez l’animal. Il faut donc mener des recherches plus larges afin de s’assurer que cette molécule peut ralentir la progression de la maladie. La France espère bien inclure des patients dans cet essai.

En tout cas, « la recherche de thérapies contre la maladie de Huntington n’a jamais été aussi active », souligne la professeure Durr. En effet, la thérapie cellulaire, ou greffe de neurones, a fait l’objet d’un essai clinique coordonné par le centre national de référence de la maladie de Huntington, à Henri-Mondor (AP-HP, Créteil). « Les résultats d’un essai auprès de 45 patients avec une greffe de cellules neuronales fœtales vont être prochainement publiés, et nous travaillons actuellement à l’utilisation de cellules souches compatibles », poursuit la professeure Bachoud-Lévi. Autre piste, des molécules sont en cours d’évaluation clinique et pourraient avoir une tendance à la neuroprotection, indique l’Inserm.


En France, 18 000 malades


La prise en charge de la maladie de Huntington a beaucoup évolué ces dernières années. S’il n’existe pas de traitement curatif, des approches multidisciplinaires symptomatiques permettent de mieux appréhender la maladie et d’améliorer le devenir des patients. Cette pathologie touche généralement l’adulte jeune, entre 30 et 50 ans, et affecte progressivement les moyens cognitifs et moteurs, ce qui peut provoquer des mouvements incontrôlés, entraîner une perte d’autonomie, des désordres psychiques.

La maladie de Huntington concerne actuellement 18 000 personnes en France, dont environ 6000 ont déjà des symptômes et 12 000 sont porteuses du gène responsable mais à ce stade sans symptômes, selon des données de l’Inserm en 2016.

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