En réaction au projet de décret sur les groupements hospitaliers de territoire (GHT) qui instaurerait un modèle "voué à l'échec", l'Association des établissements participant au service public de santé mentale (Adesm) publie sept propositions de "bon sens". Par ailleurs, le Collectif des 39 appelle à se mobiliser en bloc contre ces futurs GHT.
Le bureau national de l'Association des établissements participant au service public de santé mentale (Adesm) a jugé que le projet de décret sur les groupements hospitaliers de territoire (GHT), actuellement en concertation, n'est "manifestement pas le bon", indique l'association. Dans un communiqué du 11 mars, elle explique "rejoindre l'opinion générale des fédérations et conférences selon laquelle un modèle pyramidal, intégratif et hiérarchique sera voué à l'échec car manifestement inapproprié à la mobilisation des équipes des établissements autour de projets médicaux et de parcours de soins fédérateurs". Elle formule sept propositions, qualifiées de "bons sens", pour pallier les insuffisances de la réforme sur les GHT et améliorer la prise en charge des patients en psychiatrie et santé mentale.
Créer des GHT "à taille humaine"
En premier lieu, l'Adesm propose de revenir "au sens initial" de la loi de Santé qui est censée promouvoir l'accessibilité, la continuité et la proximité des soins, en créant des GHT "à taille humaine", réactifs et proches des patients. Elle estime que la tendance à la création de GHT "de grande taille, amplifiée par l'irruption soudaine des CHU, contredit carrément l'objectif d'adapter" le système de santé au développement des maladies chroniques (dont celles relevant de la psychiatrie). Il ne saurait y avoir d'efficacité du premier recours ni de réalité des parcours sans proximité de l'hôpital avec son territoire, souligne-t-elle. La psychiatrie est "d'autant plus sensible au risque de régression qu'elle est présente en premier recours sur tous les territoires". L'Adesm ajoute que ce serait un "leurre d'imaginer améliorer l'efficience des établissements par la seule massification alors que les organisations qui performent sont désormais les plus agiles et adaptables". Dans un deuxième temps, l'association s'étonne que les enseignements de l'échec des communautés hospitalières de territoire (CHT) se soient "limités à l'obligation d'adhérer à un GHT, sauf dérogation". Elle regrette donc l'absence de réelle analyse des facteurs culturels et managériaux qui ont freiné le développement des CHT. Par ailleurs, elle s'étonne que le projet de décret fasse "si peu de cas des élus et une si faible place aux usagers dans la gouvernance" des futurs GHT. Sa troisième proposition est d'autoriser des GHT spécialisés en psychiatrie chaque fois que les acteurs portent un "projet médical ambitieux pour répondre au diagnostic territorial" et aux besoins des patients et de leurs proches. Selon elle, ces groupements spécialisés pourraient également paraître plus attractifs pour les partenaires des secteurs médico-social et social, en tous cas "certainement plus que des GHT généralistes démesurés". Il faut donc "éviter la tentation d'un modèle unique imposé partout, d'autant qu'un petit nombre de GHT spécialisés ne viendra aucunement affaiblir la mise en œuvre des GHT généralistes". En cohérence, il faudrait aussi systématiser les communautés psychiatriques de territoire (CPT) prévues par la loi de Santé, estime l'Adesm dans sa quatrième proposition. Ces CPT seraient ouvertes aux établissements de santé publics d'intérêt collectif (Espic) et au médico-social. L'association annonce par ailleurs qu'elle consacrera son séminaire annuel à la modélisation des CPT.
Une contractualisation pour le projet psychiatrie-MCO
En cas de GHT spécialisé ou de dérogation, il convient de contractualiser l'association aux GHT généralistes pour le projet psychiatrie-MCO et les activités de liaison, comme pour les fonctions support non spécifiques à la psychiatrie (cinquième proposition). Le bureau de l'Adesm se déclare "soucieux d'éviter l'isolement de la psychiatrie à l'égard des autres disciplines médicales". D'une part, il faudra "consolider les collaborations [...] [pour les] urgences, addictions, périnatalité, pédiatrie, personnes âgées, neurosciences, recherche", etc. D'autre part, il conviendra de développer la liaison psychiatrique vers les soins somatiques "là où elle fait encore défaut, et bien plus la liaison somatique vers la psychiatrie, y compris ambulatoire, car les carences restent manifestes". La sixième proposition consiste à confier explicitement, dans les GHT généralistes, le pilotage et le management de la filière "psychiatrie et handicap psychique" à l'établissement spécialisé ou polyvalent "qui possède cette compétence". Le bureau national estime sur ce point que les dispositions prévues dans le projet de décret pour les pôles inter-établissements sont "restrictives et inadaptées". Il ne faut pas confier au seul établissement siège la responsabilité de pôles de territoire sans que celui-ci en "possède parfois même la compétence ou qu'il n'exerce celle-ci à titre principal parmi les coopérateurs". Enfin, l'Adesm propose de déterminer, au sein des GHT généralistes, des règles et des outils pour garantir les budgets et les ressources de la psychiatrie, que ce soit en postes médicaux et soignants ou en moyens financiers indispensables pour moderniser l'offre de soins. Elle pointe que les acteurs de psychiatrie sont "instruits par l'expérience interne à nombre d'établissements généralistes ou par les politiques de certaines ARS" et deux décennies de "financement malthusien" qui a bridé la progression — pourtant nécessaire — de ses ressources.
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