A Roanne (Loire), une nouvelle cabine de télémédecine, créée par la société française H4D (Health For Development), est installée dans les locaux d'une pharmacie mutualiste du centre-ville. Avec un siège incliné, un écran d'ordinateur pour guider le patient ou organiser une téléconsultation, et plusieurs instruments de mesures, la cabine permet de « peser, mesurer, calculer l’IMC, prendre la tension, le pouls, connaître le taux d’oxygène dans le sang ». Une cabine du même genre avait déjà été lancée dans le Var l'an dernier.
Les patients pourront recueillir certains paramètres de leur santé, transmis à un généraliste, qui décidera ou non d'une consultation. Une seconde étape, soumise à l'aval de l'agence régionale de santé (ARS), permettra de prendre rendez-vous avec un médecin en visioconférence.
Financée par des fonds européens de développement régional (Feder), l'expérimentation est pilotée par la Mutualité française, l'université Jean-Monnet de Saint-Étienne, l'agglomération, l'agence du développement économique de la Loire et la mutuelle Eovi Usmar Services et Soins.
Pas de médecine sans médecins
« La cabine ne remplace pas le médecin », assure Rémi Bouvier, directeur général de la Mutualité Loire, conscient que cette technologie fait grincer des dents chez les médecins libéraux. « Je n'imagine pas une demi-seconde qu'une machine puisse prendre la place d'un humain mais elle peut être un support », temporise Clotilde Robin, vice-présidente de l'agglomération roannaise. Tous deux décrivent une expérimentation encadrée par un strict cahier des charges. Ils font valoir que la cabine est susceptible d'alléger la charge de travail des médecins.
À l'Ordre des médecins de la Loire, le projet est accueilli avec prudence mais curiosité. « Il faudra vérifier que tout ça s'inscrive dans un parcours de soins », prévient son secrétaire général, Jean-François Janowiak. « On ne fera pas de médecine sans médecin », ajoute-t-il.« Mais dans un territoire en tension, si cela peut soulager, dans le cadre d'une surveillance et bien protocolisé avec les médecins, alors ça peut avoir un intérêt. »
Opération « commerciale »
Avant de trouver ses patients, la télémédecine devra convaincre les généralistes locaux, très mobilisés l'an dernier dans une grève inédite contre la loi Touraine, baptisée le « Printemps roannais ». « Nous avons découvert l'existence de cette cabine par la presse. Il n'y a pas eu de concertation. C'est inadmissible et scandaleux », déplore le Dr Bruno Pagès en fustigeant une « opération commerciale et publicitaire d'une mutuelle ».
« C'est une remise en cause de la relation médecin-patient », tonne de son côté le Dr Michel Séraille, généraliste depuis 37 ans à Roanne. « Dans notre spécialité, cette cabine ne peut apporter quoi que ce soit », relève le médecin, qui y voit « une illustration de la prise de pouvoir des mutuelles sur la santé des gens ».
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