On ne conte plus guère aux enfants les histoires de revenants et de fées. L’ogre et le petit Poucet eux-mêmes cessent de hanter les jeunes cervelles ; mais le danger qui consiste à terrifier les jeunes imaginations n’a fait que se déplacer et a pris une forme plus dangereuse.
| 19.01.2016
Les salles de cinématographe sont actuellement le rendez-vous de toute la jeunesse et de l’enfance moderne ; les parents y conduisent leurs enfants d’autant plus volontiers qu’ils prennent plaisir eux-mêmes au spectacle.
Le cinématographe pourrait, en reproduisant les spectacles si variés et si beaux de la Nature, contribuer puissamment à l’instruction des enfants en leur montrant la vie sous ses formes infiniment changeantes. En fait, il faut le dire bien haut, avec notre excellent confrère, Odilon Platon, les films cinématographiques servent trop souvent à illustrer des conceptions les plus basses et les plus lamentables et à donner l’apparence de la réalité à des épisodes historiques aussi horribles que mal établis.
Un de mes amis qui revient du Tonkin me narrait l’autre jour la tristesse qu’on a, dans les ports d’Extrême-Orient, de voir des industriels français exhiber aux peuples jaunes des scènes d’apaches de barrière ou des poursuites de cambrioleurs, pour leur donner sans doute une haute idée de notre civilisation occidentale.
La tristesse n’est pas moindre de voir, dans nos grandes villes, des enfants de 5 ans assister à des drames stupides ou même répugnants.
Nos Sociétés médicales qui s’occupent de l’enfant et de son hygiène devraient prendre en main cette cause de la santé morale de l’enfant et entamer une campagne contre le danger des cinématographes.
Après le maire de Belley, le maire de Lyon, M. Herriot, qui se montre si souvent bon défenseur de l’hygiène, a pris, au sujet des représentations cinématographiques, un arrêté dont nous extrayons les passages suivants :
« Considérant que, depuis quelque temps, certains propriétaires de théâtres cinématographiques offrent en spectacle au public des exhibitions animées représentant des agissements criminels ;
« Considérant que ces évocations sur une scène de théâtre constituent une publicité scandaleuse organisée autour du crime ; que cette publicité ne risque pas seulement de troubler l’ordre, mais qu’elle est aussi un spectacle démoralisant ;
« Considérant qu’il importe, en conséquence de soustraire à la vue du public, et surtout des jeunes gens, des exhibitions de cette nature, que, dans ces conditions, il convient de les interdire.
« Arrête :
« Sont interdites dans toutes les salles de spectacle de la ville de Lyon, les vues ou exhibitions de toute nature représentant des actes criminels. »
Un exemple que les maires de toutes nos villes françaises devraient suivre…
(Presse médicale, janvier 1912)
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