Tous les psychiatres (surtout ceux exerçant en institution médico-éducative)[1] sont couramment confrontés à la gestion des troubles du comportement chez des sujets présentant une déficience intellectuelle. Les éditorialistes du British Journal of Psychiatry rappellent que, « lorsque ce problème (de comportement difficile) ne relève pas d’une maladie mentale sous-jacente » (donc existe indépendamment d’un diagnostic psychiatrique identifié, lié ou non à la déficience cognitive), c’est « souvent hors agrément » (Autorisation de Mise sur le Marché), donc en engageant singulièrement leur responsabilité, que les praticiens sont conduits à utiliser des médicaments psychotropes (notamment des neuroleptiques), car « la preuve de leur efficacité fait alors défaut » dans cette indication particulière, sans parler de l’âge des patients, parfois très jeunes. Symétriquement dans le temps, cette situation présente des « similitudes frappantes » avec l’utilisation fréquente des antipsychotiques en géronto-psychiatrie, pour gérer les difficultés psychologiques et comportementales rencontrées dans les démences.
Les auteurs estiment « peu probable » la reconnaissance officielle de « l’usage des neuroleptiques au long cours » pour traiter des « problèmes de comportement en l’absence de maladie mentale avérée ». Pour éclaircir ces difficultés éthiques et pratiques, ils appellent à l’élaboration d’un « programme national de vérification » qui constituerait « un moyen de répondre aux préoccupations que cela soulève. »
On acquiescera volontiers à ce vœu, en remplaçant toutefois le caractère « national » de l’étude souhaitée par un débat résolument international sur cette question, car la déficience intellectuelle d’une part, comme les problèmes de comportement d’autre part sont partagés par tous les pays et toutes les cultures (malgré des nuances : par exemple le syndrome de l’X fragile est quatre fois moins fréquent au Japon).
[1] En France, sur orientation décidée par la MDPH (Maison Départementale des Personnes Handicapées), le parcours des jeunes avec déficience intellectuelle se fait généralement en SEES (Section d’Éducation et d’Enseignement Spécialisé, ex-IMP) puis en SIPFP (Section d’Initiation et de Première Formation Professionnelle, ex-IMPro).
Dr Alain Cohen
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