Ne dites pas à ma mère que je suis croque-mort, elle me croit diplômé de Paris-Dauphine. Bientôt, ce sera vrai : l’université lance, le 24 mars, un diplôme universitaire de « business manager funéraire ». Une première dans le secteur. Cette formation, qui existe en langue anglaise, était totalement absente en français.
« Nous sommes confrontés à la génération du baby-boom. Et dans un contexte de transmission et de pérennisation des entreprises, nous devons former la relève dans un marché devenu ces dernières années hyper-concurrentiel », indique Philippe Martineau, directeur général du Choix funéraire, un réseau coopératif d’environ 700 points de vente, à l’origine de ce cursus. Jusqu’à présent, il existait par décret une formation de 140 heures obligatoires plutôt théorique. Celle-ci sera vraiment managériale.
Au menu : dix sessions de trois jours par mois et un stage de cinq jours obligatoire dans une entreprise funéraire autre que le Choix funéraire. Sur le plan des cours : le parfait croque-mort de demain saura gérer sa petite entreprise et le personnel qui va avec. Il sera évidemment un pro du marketing, de l’animation d’une équipe, de la vente…
Mais pas seulement. Sociologie et anthropologie sont aussi au programme. « Il y a tout un travail sur l’absence, sur la connaissance du mécanisme freudien du travail du deuil qu’un professionnel doit aussi avoir », souligne Philippe Martineau.
L’université Paris-Dauphine organise même une visite au Musée du quai Branly, à Paris, pour potasser les représentations symboliques de la mort et des décès à travers le temps. Lorsqu’ils auront soutenu leur projet professionnel, les étudiants partiront, comme les Compagnons, à travers la France : cinq ou six stages de dix jours afin de valider leurs acquis, de mettre en pratique la théorie mais aussi d’appréhender le travail de deuil, que l’on habite dans le Pays basque, le nord ou l’est de la France.
Tests de personnalité
La première promotion compte quatorze étudiants. Les deux tiers des inscrits ont moins de 30 ans. Le plus jeune a 22 ans, le plus âgé 45. Chacun possède un minimum de deux ans d’expérience dans le secteur du funéraire ou un niveau d’études bac + 2. Ils viennent d’univers très différents : informatique, bancaire… Ils ont été minutieusement sélectionnés après des tests de personnalité. Il est ainsi essentiel de savoir se préserver face à la mort des autres. En clair, ne pas porter leur deuil.
Certes le métier de croque-mort ne connaît pas la crise, mais son image ne fait pas vraiment rêver. Cette formation suscitera-t-elle des vocations ? « L’image morbide du croque-mort est totalement dépassée. Le monde des pompes funèbres a énormément évolué », affirme Philippe Martineau. Depuis dix ans, le métier s’est beaucoup ouvert aux jeunes, mais aussi aux femmes.
Dès la deuxième session, ce diplôme universitaire sera ouvert à d’autres entreprises de pompes funèbres. Le Choix funéraire en a été l’instigateur, mais ne compte pas en avoir l’exclusivité. Coût pédagogique sur dix-huit mois : 10 000 euros. L’entreprise a aussi prévu de payer les frais d’hébergement de ses étudiants.
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