| 19.01.2019
« L’ordre des médecins », premier long-métrage de David Roux, raconte la vie d’un pneumologue à l’hôpital, soudainement perturbée quand sa mère, gravement malade, doit y occuper un lit.
En salle de pause, un pneumologue (Jérémie Renier) hilare relate une histoire « cocasse » d’hôpital. Une jeune femme arrive aux urgences le ventre gonflé et tout tendu. Lors de l’examen clinique, on découvre qu’elle vient de s’enfiler coup sur coup des dizaines de Big Mac. « Et puis soudainement, son ventre… explose littéralement ! » s’exclame-t-il dans un fou rire. « Et alors ? Elle est morte ? », lui demande-t-on. « Oui. » Hilarité générale. A 15 minutes du film « L’ordre des médecins », la scène achève de poser le décor.
Dans un univers macabre où les soignants côtoient chaque jour la maladie et la mort, le rire s’érige en protecteur privilégié. La préoccupation des patients ne quitte pourtant jamais Simon, praticien quasi-quadragénaire sans vie privée. Dans le désordre ambiant, la « juste » distance émotionnelle, fragile, l’aide à remettre les choses en ordre. Une éthique assurée guide ses actes et sa manière de former les plus jeunes. A une interne qui rumine son sentiment d’impuissance face aux patients en fin de vie, il dit : c’est normal de tels états d’âme, mais ça n’aide pas. Ce n’est pas pour elle qu’elle doit agir, « mais pour eux ».
Lorsqu’en pleine rechute d’un cancer, sa mère pénètre à son tour l’enceinte de l’hôpital, la barrière des émois s’effondre. De l’autre côté, c’est le désordre : sentiment d’impuissance (il n’a pas sa mère en charge), déni, peur, pression des proches remplis d’attentes. Plus possible de rire de la mort qui désormais l’approche personnellement. Plus possible de respecter calmement le désir d’une mourante d’échapper au scalpel, « trop fatiguée pour cela » et satisfaite d’une vie accomplie.
Quand la sagesse change de camp
L’abnégation tant prônée devient impraticable. La « sagesse » médicale se mue en obsession guérisseuse, souvent rabat-joie. Elle contraste avec la patiente, véritable héroïne dont l’humeur contagieuse demeure miraculeusement intacte. Sa mère malade, sa leçon de vie.
La virtuosité de l’acteur Jérémie Renier nous fait plonger tête baissée dans l’histoire de son personnage. Dans ce film quasi documentaire traitant de thématiques vécues par tous sur fond d’univers (in)hospitalier, on regrettera la place toute puissante du premier protagoniste. A l’arrière-plan de l’intrigue, les autres comédiens, moins connus, n’ont guère l’occasion d’exposer leurs talents.
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