Ce n’est pas la jeunesse qui cherche à fuir la mixité et l’engagement, ce sont les classes favorisées, estime un collectif d’associations de jeunes dans une tribune au « Monde ». Il n’est pas juste de lui faire porter ces problématiques sociétales.
LE MONDE | | Par Collectif
Tribune. Le gouvernement actuel déplore un manque crucial de brassage social et territorial et d’engagement au sein de notre société. Problématique à laquelle il souhaite répondre par un Service national universel (SNU) imposé à chaque jeune. Pour nous, le SNU est une mauvaise réponse à des vraies questions.
Une mauvaise traduction des concepts d’« engagement », de « mixité » et de « citoyenneté ».
Nous aussi, associations de jeunesse, partageons l’idée que notre société souffre de ségrégation, de l’absence de rencontre, de solidarité et de gestes gratuits. Oui, il y a urgence à agir et repenser notre manière de faire société. Nous voulons co-construire et co-porter l’idée d’une société ouverte, construite sur des mixités, de la gratuité, des solidarités et de l’attention portée à l’autre. Effectivement, ces enjeux dépassent le cadre de la jeunesse. Si le gouvernement veut travailler sur une universalité, nous y sommes prêts.
Une mauvaise traduction des concepts d’« engagement », de « mixité » et de « citoyenneté ».
Nous aussi, associations de jeunesse, partageons l’idée que notre société souffre de ségrégation, de l’absence de rencontre, de solidarité et de gestes gratuits. Oui, il y a urgence à agir et repenser notre manière de faire société. Nous voulons co-construire et co-porter l’idée d’une société ouverte, construite sur des mixités, de la gratuité, des solidarités et de l’attention portée à l’autre. Effectivement, ces enjeux dépassent le cadre de la jeunesse. Si le gouvernement veut travailler sur une universalité, nous y sommes prêts.
Aujourd’hui le projet présenté et quasi définitif n’est pas universel. Il assigne à une tranche d’âge de porter ces problématiques sociétales. Par un internat imposé de quinze jours ou un mois, le SNU entend apprendre aux jeunes de 16 à 25 ans la citoyenneté, la mixité et l’engagement. Mais par ce dispositif imposé uniquement aux jeunes, le gouvernement fait une lecture bien simpliste du défi ! Nous le répétons : la contrainte n’est pas la réponse. L’engagement ne peut être que volontaire. L’imposer est un non-sens.
Un manque de politiques publiques
Si notre pays souffre d’une absence de brassage social et territorial, c’est que nous manquons de politiques publiques permettant à l’ensemble de la population de se rencontrer. L’enjeu des mixités ne peut et ne saurait être porté par la jeunesse seule. Les travaux de la Fondation Jean-Jaurès et de Thomas Piketty montrent que ce n’est pas la jeunesse qui fuit les mixités mais les classes favorisées. Nous pensons que c’est à l’ensemble de la population de reconstruire nos communs, nos solidarités.
L’ETAT DOIT S’OBLIGER À METTRE LES MOYENS POUR PERMETTRE DE CONSTRUIRE CES MIXITÉS, CES RENCONTRES, CES ÉCHANGES, BREF DE L’OUVERTURE, L’ÉGALITÉ ET DE LA FRATERNITÉ
Notre société doit, dès l’école, permettre et imposer, la rencontre entre les personnes quels que soient l’âge, le territoire, le genre, l’origine, la classe sociale, la situation de santé, la sexualité ou le handicap. L’obligation doit être par tous et pour tous. L’Etat doit s’obliger à mettre les moyens pour permettre de construire ces mixités, ces rencontres, ces échanges, bref de l’ouverture, l’égalité et de la fraternité.
De nombreux dispositifs existent déjà aujourd’hui, mais sont sous-financés, voire carrément précarisés. Plutôt que d’investir entre 1 et 2 milliards d’euros dans le SNU, valorisons et soutenons les mécanismes existants (associations culturelles, sportives, de jeunesse, école, colonies, classes vertes, etc.).
Monsieur le Président, nous sommes déjà engagés !
S’engager, mais s’engager pour quoi et pour qui ? Pourquoi l’Etat impose-t-il à une tranche d’âge de s’engager alors que les jeunes s’impliquent déjà fortement dans la vie associative, syndicale, politique ou militante. Des formes d’engagement singulières et bien souvent peu reconnues. S’il existe des jeunes loin de toute forme d’engagement, ce n’est pas en les forçant qu’ils·elles s’engageront davantage. Et quand jeunesse rime avec précarité, comment s’engager bénévolement si on ne sait pas comment finir le mois ?
Les propositions du collectif
Pour reconstruire du lien, du brassage social et territorial, pour permettre aux jeunes de s’engager et à la place d’un SNU, nous proposons :
- De développer les espaces permettant aux jeunes d’accéder et de connaître leurs droits : droits sociaux, droit du travail, droit individuel et collectif.
- De penser et construire une école permettant les mixités, l’accueil universel de chaque enfant et jeune, ce qui passe par la refonte de la carte scolaire mais aussi des transports adaptés et des pédagogies inclusives, ouvertes et participatives.
- Le développement et l’accès pour tous et toutes (y compris par un soutien financier) à des formes d’engagement européen et international existantes : Erasmus +, volontariat de solidarité européen, etc.
- La reconnaissance et la valorisation des engagements politiques et citoyens de la jeunesse : un planning scolaire allégé, des moyens humains et financiers débloqués pour l’accompagnement d’enfants et de jeunes.
- La construction d’une politique publique autour des colonies de vacances, des centres de loisirs et des classes de découvertes permettant la rencontre et le faire-ensemble de groupes, de classes issus de territoires différents.
- Une attention et une écoute des revendications portées par les associations de jeunesse, pas uniquement des consultations de forme.
- Une valorisation forte de l’engagement des jeunes dans le sport, la culture et l’animation locale.
Ainsi, plutôt qu’un SNU, nous voulons des politiques publiques co-construites !
Les organisations à l’origine de cette tribune : Aline Coutarel, présidente par intérim du Mouvement Rural de Jeunesse Chrétienne (MRJC), Lola Mehl, présidente de la Jeunesse Ouvrière Chrétienne (JOC), Thibaud Eychenne et Claire Jacquin, co-présidents de Jeunes Générations, Louis Boyard, président de l’Union Nationale des Lycéens (UNL), Lilâ Le Bas, présidente de l’Union Nationale des Etudiants de France (UNEF), Théo Garcia-Badin, président des Jeunes Ecologistes,Pierre Msika, président des Eclaireurs et Eclaireuses Unionistes de France (EEUDF), Jacques Dupoyet, président de l’ Association pour la Formation des cadres de l’Animation et des Loisirs (AFOCAL), Marie Mullet-Abrassart, présidente des Scouts et Guides de France (SGDF).
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