| 22.06.2017
Si le dépistage organisé est perfectible, il reste bien sûr indispensable. Face à la désinformation, les gynécologues jouent la carte de la contre-information en lançant une campagne* qui s’adresse aux femmes individuellement : « Et vous ? Pour vos seins, qu’en pensez-vous ? »
Une baisse du taux de participation de 60 % à 52 %
Le déclic pour cette contre-offensive ? Une désaffection « historique » vis-à-vis du dépistage du cancer du sein dans le département autrefois pilote du dépistage organisé, le Bas-Rhin (dès 1989, 2004 pour la France entière) : « Le taux de participation atteignait 60,2 %, il chute à 52 % cette année selon les tout derniers chiffres », se désole le Pr Carole Mathelin, responsable de la commission sénologie du Collège national des gynécologues et obstétriciens français et chef du service de sénologie du CHU de Strasbourg.
Les femmes, depuis les controverses sur l’efficacité ou la sûreté du dépistage, ne retiennent que la possibilité de faux négatifs, faux positifs, excès d’irradiation, surdiagnostic ou surtraitement, doutent sur les bénéfices en termes de mortalité. L’attitude vis-à-vis du dépistage étant rarement déterminée par la seule logique, il pâtit à l’évidence de cette atmosphère suspicieuse entretenue autour du dépistage et plus spécifiquement de son outil, la mammographie, par les réseaux sociaux. Et par ricochet, le diagnostic en souffre aussi, avec la réapparition de lésions délabrantes… « Nous voyons aujourd’hui davantage de cancers localement avancés, regrette-t-elle. Le diagnostic initial se faisant pour des tumeurs de 2,5 cm en moyenne (contre moins de 2 cm dans le cadre d’un dépistage satisfaisant, organisé et individuel, s’il touche 70 % des femmes environ). » Certes le dépistage est imparfait, mais il est perfectible et chacun des freins au dépistage peut être débattu, voire levé. « Ainsi, s’agissant de l’irradiation liée à la mammographie, renseigne le Dr Jean-Yves Séror, telle que proposée dans le cadre du dépistage organisé, les deux incidences pour chaque sein équivalent à trois mois d’exposition naturelle (0,6 mSv). » Une femme de 50 à 74 ans est exposée 26 fois lors de sa « période dépistage », pour au total 40 mSv, bien loin des valeurs limites recommandées.
La mortalité a diminué de 20 % grâce au dépistage
Le risque de cancer créé par la mammographie concerne davantage les jeunes femmes « mutées », aux seins plus radiosensibles, dont les capacités de réparation sont effondrées, et qui nécessitent un examen à intervalles plus rapprochés… En ce qui concerne les faux négatifs ou les cancers de l’intervalle (au génie évolutif particulier), le « dépistage à la française », qui associe examen clinique, échographie éventuelle et deuxième lecture, permet d’en « rattraper » un certain nombre. « Quoi qu’il en soit, résume le Dr Marc Espié, responsable du centre des maladies du sein de l’hôpital Saint-Louis (Paris), le pronostic de ce cancer est lié au stade toujours, y compris avec les nouveaux traitements. » Un cancer du sein n’est pas un cancer de la prostate ; il survient chez des femmes de 60 ans en moyenne, et il est sûrement plus facile de dire a posteriori, faute de marqueur prédictif, que tel ou tel cancer du sein aurait évolué plus lentement. « Le surdiagnostic est évalué entre 5 et 7 % … sans surtraitement associé puisque, depuis le dépistage, la taille des cancers des femmes dépistées a diminué, le taux de traitements conservateurs a augmenté et l’on constate une baisse de la mortalité, de 20 % au moins », conclut le Dr Espié.
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