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samedi 2 juillet 2016

Comment la psychologie peut-elle aider à (re)construire l’Europe ?

02/07/2016

Les rapports si complexes entre la langue et notre façon d’appréhender et de comprendre le monde ont donné lieu à de très nombreux essais philosophiques et linguistiques. Certains ont parfois pu être tentés par des théories déterministes rigides associant trop étroitement la langue et la façon de penser. Si ces considérations trop strictes ont été souvent abandonnées, impossible cependant d’ignorer comment les lacunes lexicales traduisent parfois des différences de perception ou combien les constructions grammaticales peuvent influencer des constructions théoriques.

Bilinguisme : sujet d’étude

Dans le sillage des philosophes et des linguistes, la neurologie et la psychologie se passionnent pour la question. Les performances particulières des personnes bilingues leur offrent pour cette quête un terrain d’investigation privilégié. Ces dernières ont donc fait l’objet de multiples observations ces dernières années qui ont permis notamment de supposer qu’elles seraient davantage protégées contre les troubles cognitifs. Une équipe de chercheurs allemands et britanniques, emmenée par Panos Athanasoupoulos du département de linguistique et de langue anglaises de l’Université de Lancaster s’est pour sa part intéressée aux conséquences possibles sur la perception du monde du bilinguisme.

Ping pong entre l’anglais et l’allemand

Publiés dans la revue Psychological Science, ces travaux rappellent tout d’abord les différences existant entre la réception de mêmes images par un Anglais et un Allemand. Par un homme parlant l’anglais, la vidéo d’une femme marchant vers un supermarché sera le plus souvent décrite comme la présentation d’une personne marchant. Pour un homme s’exprimant en allemand, la même scène est perçue comme celle d’une personne se rendant dans un centre commercial. Quand on se focalise sur l’action en anglais, on préfère une vision globale en allemand. La construction grammaticale induit sans doute en partie cette différence : la célèbre forme en « ing » qui correspond (sans l’imiter totalement) à notre participe présent n’existe pas dans la langue de Goethe où le placement du verbe à la fin invite par ailleurs à ne pas uniquement se concentrer sur l’action.

Brexit

Que se passe-t-il chez ceux qui maîtrisent parfaitement les deux langues ? Les vidéos présentées aux participants étaient ambiguës et il était demandé aux sujets de déterminer si selon eux la scène était animée par un objectif clair ou si elle concernait plus certainement une action sans motivation. Quand le test est réalisé en allemand, les réponses tendent plus fréquemment à voir les images comme tendues par un but. Quand l’anglais est utilisé, le discours se concentre plutôt sur l’action. Des différences ont également été observées en fonction de la langue la plus couramment utilisée par l’individu.
Ces enseignements pourraient inspirer l’Union européenne à l’heure où certains estiment que le retrait de la Grande-Bretagne devrait avoir une influence sur la langue utilisée dans l'Union !
Aurélie Haroche

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