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jeudi 25 février 2016

Réflexions autour d’une économie au service de l’homme

LE MONDE  | Par Margherita Nasi


    Comment développer une économie au service de l’homme ? La formule est peut-être populaire, voire banale. Elle n’en reste pas moins « essentielle, révolutionnaire, dans la mesure où elle remet l’économie sur ses pieds, en posant la question même de sa finalité », affirme le docteur en sciences économiques Philippe Vadjoux. Alors que l’économie est devenue synonyme de mensonges et scandales, de dégâts sociaux et environnementaux, l’économiste s’aventure sur le « chemin étroit qui relie l’être humain au système économique ». Dans l’Economie a-t-elle un sens ?, il analyse la logique et les contradictions du système capitaliste et recense les innovations, expériences et idées pour esquisser un monde nouveau dans un bouillonnement parfois confus.
    L’ouvrage est construit à partir de trois grandes questions, qui correspondent aux trois parties du livre. Il s’agit tout d’abord de comprendre comment nous sommes devenus capitalistes. En remontant l’histoire, Philippe Vadjoux rappelle que bien des citoyens se sont révoltés contre cette vision restrictive d’un système dont la seule finalité est de produire de l’argent...Et pourtant le capitalisme s’est imposé.

    Un pacte faustien

    Comment expliquer que des décisions essentielles concernant notre mode de vie soient prises par des groupes puissants, dans leurs seuls intérêts ? La réponse est peut-être au fond de nous : progressivement, une contradiction s’est installée au coeur de chaque individu, avance-t-il en substance. L’« homo-economicus est à la fois un travailleur qui va défendre son emploi et son salaire contre l’employeur, c’est aussi un consommateur satisfait de voir baisser les prix des produits, c’est enfin un épargnant avisé qui va chercher les meilleurs placements financiers ». Nous aurions établi un pacte faustien avec le pouvoir en place, renonçant à exercer pleinement notre rôle de citoyen à condition de profiter de la société de consommation. Un pacte que « la classe ouvrière a passé au cours des Trente Glorieuses en abandonnant les idéaux du Grand Soir au profit de conquêtes matérielles et salariales ». Sa cnclusion: nous sommes ainsi tous devenus, consciemment ou pas, capitalistes.
    Pourquoi alors vouloir dépasser ce système ? Cette question est au coeur de la deuxième partie de l’ouvrage. Crises à répétition, inégalités sociales injustifiées, catastrophes environnementales… les contradictions inhérentes au capitalisme sont nombreuses. Si le capitalisme nous a permis d’accomplir des révolutions technologiques et économiques,« admettre que la seule boussole du monde puisse être le profit est une vision si réductrice de l’humanité qu’elle conduit à notre perte »,affirme l’auteur.
    Comment alors remettre l‘économie au service de l’humanité ? C’est la vraie question pour l’économiste, qui y consacre la dernière partie de son ouvrage. Il s’agit moins pour lui de revenir en arrière, en détruisant l’esprit d’entreprise ou la concurrence, que de « dépasser ce système par l’initiative, l’innovation ».
    L’esquisse de ce nouveau monde est déjà sous nos yeux dans l’économie participative: Associations de bénévolat, share economy, crowdfunding, micro-crédit, Finance Watch, commerce équitable… tous ces mouvements sont à la recherche d’une démocratie réelle, dans leurs objectifs comme dans leur fonctionnement.
    La naissance d’une économie hybride - économie marchande et économie solidaire - permettrait aux consommateurs de choisir entre deux modes de vie. L’auteur appelle aussi au changement dans l’évaluation de l’activité économique « afin de mieux définir l’utilité des investissements et des produits ». S’il ne fallait retenir qu’une citation tirée de ce livre qui abonde en références, ce serait une phrase de Einstein : « un système crée ses limites et ses contradictions. Pour en sortir il faut concevoir un autre système. Ce n’est pas en améliorant la bougie qu’on a inventé l’ampoule électrique ».
    L’économie a-t-elle un sens ? Philippe Vadjoux (L’Harmattan, 346 pages).

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