Le concept de dépendance alimentaire est nouveau et complexe, mais il peut s’avérer important dans la compréhension et la résolution du problème d’obésité qui concernera 57,8 % de la population mondiale en 2013 d’après l’OMS.
Au cours des dernières décennies, les habitudes alimentaires ont radicalement changé. Le développement de l'industrie alimentaire a permis la création et la modification d’aliments aux propriétés « récompensantes » permettant d'améliorer les ventes. En outre, plus un aliment est abondant, facile d’accès, riche en calories, en gras, en sucre, en sel et en additifs, avec une faible valeur nutritive et plus il est addictif.
La dépendance alimentaire est alors définie comme une préoccupation extrême de la nourriture. Il s’agit de manger régulièrement de grandes quantités de nourriture addictive dans un court laps de temps. Ces épisodes peuvent se produire d'une fois par jour à une fois toutes les semaines, après quoi le sujets concerné ressent un sentiment de culpabilité, de honte, et de dépression qui engendre un stress émotionnel provoquant à nouveau la suralimentation. Cette suralimentation peut être recherchée afin de modifier les émotions négatives causées par la dépression ou le stress.
La même activation des processus de récompense du cerveau
Les études neurobiologiques montrent une véritable similitude dans l’activation des processus de récompense du cerveau lors de l'abus de drogues ou d’aliments addictifs. Les personnes dépendantes à l’alimentation rapportent des symptômes identiques aux autres dépendances : l’envie irrépressible de consommer, les symptômes de sevrage et l’escalade dans la consommation qui induit une tolérance.
Des expériences faites chez le rat montrent que l’utilisation de médicaments connus pour bloquer le circuit de la récompense diminue les envies de consommer ces aliments. D’autres expériences réalisées chez des femmes avec des scores plus élevés de dépendance alimentaire montrent une diminution de leurs capacités à inhiber le comportement et une mauvaise image d’elle-même.
Le principal outil diagnostic standardisé, et traduit en plusieurs langues, est l’échelle d’addiction alimentaire de Yale mise au point par l’équipe de Gearhardt en 2009. D’après cette échelle, la prévalence de ce trouble est de 11,4 % parmi les personnes de poids normal. Il n’a pas été mis en évidence de corrélation entre l’addiction alimentaire et l’indice de masse corporelle, mais le diagnostic était plus fréquent chez les personnes obèses.
Afin de prévenir l’addiction alimentaire, les auteurs préconisent de limiter les aliments addictifs et d’être attentif aux aliments qui peuvent faire perdre le contrôle. Les thérapies reconnues comme efficace en addictologie peuvent être utilisées chez les patients dépendants à l’alimentation en association à quelques mesures : éviter la sensation de faim et arrêter de manger à satiété, éviter le stress, contrôler ses émotions et pratiquer une activité physique régulière. Les organismes de santé publique ont aussi leur responsabilité dans la prévention et l’information sur ces aliments addictifs pouvant engendrer une addiction alimentaire chez certaines personnes vulnérables.
Dr Claire Lewandowski
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