« Mais qui est donc cetteSarah Mastouri, que personne n’arrive à identifier ? » Il y a quelques jours, les médias ont largement relayé cette question, assortie d’une photo montrant le visage d’une jeune femme brune. Le côté inhabituel de l’affaire est que la question est venue de façon très officielle du service de psychiatrie de Thuir dans les Pyrénées-Orientales.
En janvier la jeune femme était hospitalisée sans papier d’identité. Elle a alors décliné avec assurance cette identité de Sarah Mastouri et a affirmé être née en Algérie le 4 juillet 1984. Elle a ensuite fourni des éléments précis et persistants sur sa biographie. Notamment elle a évoqué avoir été victime d’une agression fin juillet 2012, au cours de laquelle ses papiers d’identité auraient été dérobés. Mais, « Je suis incapable de me souvenir des noms des personnes qui peuvent se souvenir de moi », racontait-elle.
Sarah n’existe pas
L’hôpital a alors entrepris de faire des recherches, mais cela n’a donné aucun résultat. Selon les registres, Sarah n’existe pas. On a alors évoqué un cas d’amnésie avec perte d’identité. Mais il fallait tout de même savoir qui était cette jeune femme.
L’hôpital a alors pris l’initiative rare de faire lancer un appel à témoins par la gendarmerie, pour que la patiente retrouve identité et famille. Une démarche couronnée de succès. La famille de la patiente s’est manifestée et a pu attester auprès de la police de sa véritable identité. Une femme domiciliée à Reims a appelé affirmant qu’elle était sa mère. D’autres membres de la famille ont appelé et transmis des photos très ressemblantes.
Sarah en fait s’appelle Michèle, elle est née en France en 1990 et aurait des origines réunionnaises et non algériennes.
Elle est en train d’entamer une phase de reconstruction qui va être longue, a souligné le Dr Philippe Raynaud, un médecin de l’hôpital psychiatrique de Thuir, lors d’une conférence de presse.
Un diagnostic a été posé
Contacté par le Quotidien, le praticien a confirmé qu’il « ne s’agit pas d’un canular », « ni d’un cas d’affabulation ». La patiente était bel et bien convaincue de l’identité qu’elle donnait.
On ne sait pas si l’agression qu’elle dit avoir subie a pu être à l’origine du trouble de l’identité, s’il y a eu ou non traumatisme crânien, perte de connaissance ou autre. Il s’agit probablement d’une agression dans la rue « chez quelqu’un qui était dans l’errance », selon le Dr Raynaud.
Il est également difficile de savoir si elle a présenté des épisodes antérieurs de même nature. Et on ne sait pas non plus si l’identité de Sarah Mastouri est celle d’une personne réellement rencontrée.
Un diagnostic a été posé, mais bien évidemment les praticiens sont tenus par le secret professionnel, « indispensable aussi pour que la patiente retrouve sa place et son identité », a expliqué par ailleurs le praticien. Au « Quotidien », il lâche toutefois : « Ce n’est pas une curiosité diagnostique, ni une amnésie. » Les cas de perte d’identité sont relativement fréquents en psychiatrie, a rappelé le praticien. La patiente reste hospitalisée et reçoit donc désormais une prise en charge adéquate.
› Dr BÉATRICE VUAILLE
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