2 septembre 2013
Depuis la fin du XIXe siècle, les congés des écoliers se sont allongés de plusieurs semaines et les journées de cours ont fait l’objet de nombreuses expérimentations. Historique des emplois du temps.
Mais quelle histoire, quel sens du rythme. C’est peu dire que depuis le grand Jules (Ferry) et sa républicaine école gratuite et obligatoire, le temps de travail des écoliers ressemble à s’y méprendre à «trois pas en avant, trois pas en arrière, trois pas sur le côté, trois pas de l’autre côté». Avec une succession de ministres de l’Education (près de trente sous la seule Ve République) à un rythme, pour le coup, frénétique.
Seul point fixe de cette longue épopée, la journée de classe qui jusqu’à aujourd’hui n’a jamais varié d’un pouce : 6 heures. Et une tendance lourde : le temps global de présence en classe depuis la fin du XIXe siècle ne cesse de rétrécir. Là où, en 1894, les primaires ingurgitaient 1 338 heures de cours en 223 jours de classe, nous en étions l’an passé à 864 heures de cours en 144 jours de classe. Total, plus d’un tiers des heures d’enseignement parties en fumée…
Schéma. Comment se fait-ce ? Et l’enfant là-dedans ? Pour la faire courte, la longue histoire du calendrier scolaire, équation qui conjugue journée d’apprentissage, répartition dans la semaine et repos, a d’abord été marquée par un allongement des vacances, comme le souligne l’historien de l’Education Claude Lelièvre (1). Six semaines l’été, une à Pâques et quelques extras (la Toussaint, le jour de l’An…) : tel était le schéma en 1894.
Dès 1922, voilà deux semaines de rab. Il faut reconstruire, et les bras des enfants dans les champs sont requis. 1938 : rebelote : deux semaines de plus. Pour faire plaisir aux enfants ? Cette fois, il s’agit plutôt de donner des gages à des instituteurs plutôt que de les augmenter de façon substantielle, comme le souligne Claude Lelièvre.
Le mouvement se poursuit avec un pic en 1960-1961, et des vacances d’été qui s’étalent du 28 juin au 16 septembre. Pour remédier à une grande fatigue des jeunes classes ? Le calendrier a surtout été fixé en accord avec le ministère du Tourisme.
Il faut attendre un rapport du Conseil économique et social en 1980 épinglant notre équation «période de vacances scolaires la plus longue pour une journée type en classe la plus chargée» pour qu’on en revienne à davantage de raison (huit semaines de congés d’été). Et de louables tentatives d’imposer un rythme dit 7-2 (sept semaines de travail, deux semaines d’arrêt). C’est ce que prônent les spécialistes de l’enfant, mais qui suppose une France découpée en deux zones.
Sous François Mitterrand, le ministre Jean-Pierre Chevènement s’y est courageusement essayé un an avant d’être remplacé en 1986 par un René Monory plus sensible aux sirènes du lobby du tourisme. Même échec deux plus tard pour le ministre socialiste Lionel Jospin qui voulait pourtant mettre l’école «au service de l’élève».
La semaine de travail n’a quant à elle que peu varié. Tout juste si l’on se souvient que le ministre gaulliste Olivier Guichard a supprimé l’école le samedi après-midi en 1969, ce qui a conduit à faire du mercredi (au lieu du jeudi) un jour de repos pour mieux équilibrer la semaine. Et puis, il y a eu l’UMP Xavier Darcos en 2008 et sa démagogique semaine de quatre jours, que Vincent Peillon tente de ramener à 4 jours et demi.
Pics et creux. Et la journée de cours ? Qui s’est penché sur le rapport des médecins Robert Debré et Daniel Douady soulignant dès 1962 «la fatigue des écoliers français» ? Qui a retenu les travaux des chronobiologistes sur les pics et les creux d’attention des plus petits au cours d’une journée ? Euh… «Se préoccuper de la journée en l’allégeant d’une demi-heure, c’est vraiment nouveau même si, avant Peillon et de façon fugitive, deux ministres ont tenté de s’y atteler», épingle Lelièvre.
Ainsi, Chevènement (encore lui) invita quelque 7 000 classes à mieux aménager la journée avec le «monde socio-culturel» et sportif ou encore le ministre des Sports Guy Drut, un proche de Chirac, en 1996-97 s’essaya sur 170 sites pilotes «à une politique d’aménagement des rythmes scolaires sur cinq jours avec réduction de la durée quotidienne de classe et des propositions d’activités complémentaires», rappelle Lelièvre. Louable, mais vite balayé par un Claude Allègre, chargé de l’Education par Jospin, avec cette phrase : «Figurez-vous que, pour moi, l’école ce n’est pas un jardin d’enfants, c’est d’abord fait pour apprendre.»
(1) Il a publié, entre autres, «Histoire des institutions scolaires, 1789-1989», Nathan (2008) et «les Politiques scolaires mises en examen, onze questions en débat», ESF Editeur (2004).
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