Les groupes français d’EHPAD conquièrent l’Europe
14.09.12 - 10:35 - HOSPIMEDIA
Orpéa, Korian, Médica... ces groupes privés gèrent actuellement 20% du secteur des maisons de retraite médicalisées en France. Ils ne comptent pas s’arrêter là et partent à la conquête des pays voisins.
L’international ? "Un relais de croissance", selon le groupe français de maisons de retraite Korian qui, début septembre, a arrêté un chiffre d’affaires de 547,9 millions d'euros pour le premier semestre 2012 (lire notre brève du 06/09/2012). Une somme rondelette dont le tiers provient de la gestion de près de 80 établissements en Italie et en Europe, principalement des EHPAD. Cette activité hors de France "poursuit un rythme de développement soutenu avec une progression de 26%", révèle le groupe. Il n’est pas le seul à s’être exporté : son concurrent Orpéa possède 322 établissements en France mais aussi 21 en Espagne, 12 en Italie, 2 en Suisse et 43 en Belgique (lire notre brève du 18/07/2012). "Nous détenions 49% du groupe de maisons de retraite Medibelge, le numéro un sur la région bruxelloise, et nous venons d’acquérir les 51% restants", précise Steve Grobet, chargé de la communication du groupe. Le Noble Age inaugurera quant à lui son sixième établissement belge en octobre (lire notre brève du 27/07/2012).
Savoir-faire médical
Aujourd’hui, la plupart des grands groupes privés français de maisons de retraite achètent ou construisent des EHPAD dans les pays frontaliers afin de poursuivre leur développement. Sur place, ils font valoir leur savoir-faire. "En Espagne, les établissements n’étaient pas aussi en pointe qu’en France en termes de prise en charge de pathologies type Alzheimer, précise Pascal Brunelet, directeur général délégué au sein du Colisée Patrimoine Group. Nous avons donc mis en place des structures médicalement et architecturalement adaptées. Par exemple, des parcours de déambulation pour que les personnes atteintes de ces troubles puissent dépenser leur énergie et extérioriser leurs angoisses". Au sein des 24 établissements italiens gérés par Maisons de Famille, les standards de qualité français ont été transposés tels quels, assure Valérie Rivoire, directrice de la communication du groupe : "nous avons apporté des techniques d’accompagnement des personnes âgées comme le recours à des psychomotriciens ainsi que des techniques de management avec l’organisation régulière de réunions-cadres pour faciliter la circulation des informations." Ils se conforment en outre aux coutumes nationales. "En Italie, nos prestataires de service et nos personnels sont italiens. Les menus sont conformes aux habitudes locales", précise Valérie Rivoire. Et le prix des chambres est adapté au niveau de vie du pays. En Espagne, Orpéa propose ainsi un tarif moyen de 55 euros par jour pour l’hébergement contre 75 euros en France.
Bientôt la Chine ?
La stratégie européenne de ces groupes semble fonctionner puisqu’ils affichent tous un taux d’occupation des lits de 95% en moyenne au sein de leurs EHPAD "étrangers". Reste la crainte de voir se renouveler le cas de la faillite, en 2011, de Southern Cross, le plus important opérateur privé de maisons de retraite du Royaume-Uni chargé de la prise en charge de 10% des personnes âgées dépendantes du pays mais fortement endetté pour avoir levé des fonds importants sur les marchés. Malgré cette menace, les géants français souhaitent développer leurs activités dans les pays à fort potentiel démographique et économique dont la Chine.
Nathalie Ratel
- Inquiétude modérée des associations et autorités locales
- En Allemagne, où seuls 6% des EHPAD sont publics, les fusions ou acquisitions des groupes privés, y compris étrangers, étonnent peu. En Italie, le phénomène reste marginal d’après Giovanni Lamura de l’Institut national de santé et de recherche sur le vieillissement (INRCA) : "le secteur de la prise en charge à long terme des personnes âgées est dominé par le phénomène des assistants personnels, souvent de nationalité étrangère et directement engagés par les familles. Le pourcentage de personnes âgées hébergées en maisons de retraite est de 3%". Quant à Jesús Morala, de l’association espagnole d’aide aux familles touchées par la maladie d’Alzheimer, AFALcontigo, son inquiétude concerne "la qualité de l’attention portée aux personnes âgées bien plus que l’identité du prestataire. C’est cette qualité qu’il faut garantir".En Belgique, toutefois, le sujet inquiète : "un bon tiers des lits des maisons de repos du secteur privé" sont sous la houlette de groupes français ou belges, selon Brigitte Bouton, du Département des aînés et de la famille de la région wallonne. Elle redoute une envolée des prix. En effet, si les personnels de soins bénéficient de technologies et de protocoles leur permettant d’améliorer la qualité technique de leurs actes, ils sont "amenés à travailler dans plusieurs établissements, ce qui rend la relation avec les résidents plus lointaine", explique-t-elle. Et d’assurer que les interventions des syndicats dans ces établissements sont aujourd’hui "plus fréquentes".N.R.
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