« La médecine hospitalière est une cocotte-minute »
3 questions au Dr Norbert Skurnik, président de la CMH (Coordination médicale hospitalière)
Décision Santé. Comment expliquer la bienveillance avec laquelle vous avez accueilli le « pacte de confiance » pour l’hôpital lancé le 7 septembre dernier par Marisol Touraine ?
Norbert Skurnik. Nous n’avons pas accueilli avec bienveillance le pacte de confiance. C’est le discours de présentation de Marisol Touraine que nous avons salué. Il reprenait des arguments développés au cours de la campagne électorale ou lors de l’allocution d’ouverture d’Hôpital Expo. Faut-il en revanche rappeler qu’ils n’ont pas été repris au cours des quatre derniers mois. Nous avons même reçu au cœur de l’été des signaux inverses.
En ce qui concerne la mission confiée à Edouard Couty, nous approuvons la méthodologie. Simplement nous jugerons sur pièce. Nous espérons que les paroles déjà entendues ne soient pas que des paroles. Voilà pour la forme.
Sur le fond, la ministre a exprimé certaines idées-forces auxquelles nous sommes attachés. Par exemple, des intersyndicales puissantes et représentatives et contre l’éparpillement. Autre revendication de la CMH, la ministre a appelé à une révision du volet gouvernance de la loi HPST afin de rééquilibrer les pouvoirs au sein de l’hôpital. Enfin, Marisol Touraine a répondu favorablement au respect – comme nous l’avions demandé – de l’accord-cadre signé avec le précédent gouvernement.
Nous attendons désormais du concret. Notre patience n’est pas inusable. Le temps est compté. Nous n’abandonnerons pas la maîtrise du temps à nos partenaires politiques.
D. S. Comment recevez-vous le discours de rigueur dispensé par François Hollande qui concerne directement l’hôpital ?
N. S. Le président de la République adopte une posture adaptée à sa fonction. Les comptes doivent être rigoureux. Simplement la médecine hospitalière est une cocotte-minute qui risque à chaque instant d’exploser. De nombreux chantiers comme celui du statut avec la mise en place d’un système de valence ont été laissés à l’abandon. On peut également citer la question de l’équipe, du service qui ont perdu leur identité avec l’instauration des départements. Il est temps de redonner l’envie de travailler en équipe avec un responsable coopté disposant de responsabilités transparentes. Cela était prévu dans l’accord-cadre. Au final, les médecins sont démotivés. Et pour certains d’entre eux désertent l’hôpital public. Comment faire encore des économies alors que de nombreux services fonctionnent avec un nombre réduit de médecins ? Les usagers de l’hôpital comme les médecins sont dans le même bateau. Et doivent faire avec le manque d’attractivité de l’hôpital. On ne peut exiger des efforts excessifs à un corps professionnel qui se délite.
D. S. Seriez-vous prêt à renégocier le compte épargne-temps (CET) ?
N. S. Rappelons d’abord qu’une part notable des médecins hospitaliers ne prend pas ses vacances faute de temps. A ce jour, ce sont des congés légaux. Y a-t-il en France aujourd’hui d’autres professions plongées dans une telle situation ? Lorsque ce droit a été octroyé, la démographie médicale n’était pas celle d’aujourd’hui. Nous disposons certes d’un droit mais qui demeure théorique pour des raisons de fonctionnement de service
Dans ce contexte, nous ne refusons pas le principe d’une négociation sur ce sujet en échange d’avancées statutaires. Pour autant, je crains que le gouvernement pour des raisons budgétaires ne souhaite pas forcément conclure sur un certain nombre de dossiers. La stratégie serait alors de gagner du temps. Si cela dépasse le raisonnable, nous n’accepterons pas ces règles du jeu.
Propos recueillis par Gilles Noussenbaum
Information du 13.09.12 10:15
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