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dimanche 16 septembre 2012

Le cri d'alarme des maires face à la crise sociale

LE MONDE | 
Barbe grisonnante et ventre avenant, Jean-Michel Thénard, maire socialiste de Saint-Julien-en-Genevois, ville favorisée de Haute-Savoie, reprend une métaphore médicale : "Nous, les petits maires, sommes les globules blancs du corps de la République. En cas d'attaque, nous sommes les premiers sur place pour combattre le problème."
En première ligne sur le front de la crise, les maires, que Le Monde a interrogés à Castelnaudary (Aude) à l'occasion des 15eassises des petites villes de France, racontent tous la même difficulté à faire face aux tensions sociales : chômage, risque de perte de logement, surendettement, implosion de la cellule familiale, déclassement...

Un chômage galopant
Symptôme d'un chômage galopant, la hausse des demandes d'accompagnement à la recherche d'emploi. "Les demandes de rendez-vous liés à des recherches d'emploi ont été multipliées par 3 en cinq ans", témoigne Jean-Yves de Chaisemartin, maire radical valoisien de Paimpol (Côtes-d'Armor). "Depuis trois ans, j'ai reçu plus de 3 000 courriers sollicitant une aide dans ce domaine", raconte Liliane Faure, maire socialiste de Montbrison (Loire), une commune de 14 000 habitants. Loïc Hervé, maire centriste de Marnaz (Haute-Savoie), évalue la hausse du chômage à 50 % dans sa commune.
Premières victimes, les jeunes, "en très grande difficulté pour décrocher leur premier emploi", se désole Liliane Faure. Même constat de Luc Ademar, maire divers droite de Gourbeyre (Guadeloupe) où un taux général de chômage de 25 % laisse peu d'espoir à sa jeunesse et"encourage les déviances comme le trafic de stupéfiants".
La perte d'emploi est le premier rouage d'un engrenage de difficultés susceptibles d'écraser les familles. "A proximité des bassins industriels, de nombreux travailleurs sont en intérim. En période d'emploi, les familles sont dans une situation précaire mais elles vivent. Elles ont accès au crédit, achètent une auto... Mais lorsque le contrat est rompu, certaines ne voient pas d'autre choix que de couper dans le paiement du loyer. Cela entraîne une suspension des aides aux logements, puis de l'électricité et la menace d'expulsion... Lorsqu'elles nous appellent à l'aide les familles ont la tête dans le sable", raconte François Guégan, maire communiste d'Harfleur (Seine-Maritime).
Une déchéance qui n'épargne pas les campagnes. "Il y a de plus en plus de personnes en déshérence. Souvent des familles monoparentales, des personnes sans emploi, sans projet, isolées dans des zones rurales sans moyen de mobilité ni de garde d'enfant et avec comme seule échappatoire l'alcool", rapporte M. de Chaisemartin, le maire de Paimpol.
La crise n'épargne aucun territoire ni aucune catégorie sociale comme en témoigne Guy Sautière, maire UMP de la très chic Saint-Rémy-lès-Chevreuse (Yvelines). "Les gens ici aussi sont soucieux de leur avenir. A quelques kilomètres de la commune se situe le siège social de PSA où 700 à 800 postes seraient menacés", explique-t-il, inquiet.
  • Les problèmes de logement
Les tensions liées au logement sont la seconde source d'alerte pour les élus. A Harfleur, on enregistre depuis 2007 une hausse de 30 % des impayés dans le parc social de la ville. Loïc Hervé, élu à Marnaz, souligne, pour sa part, que "le turnover au sein du parc de logements aidés de la ville est quasi nul. Personne ne souhaite se déplacer vers le marché privé".
L'élu observe parallèlement une raréfaction des demandes de permis de construire sur sa commune. "Les gens ont peur de s'embarquer sur un projet de 300 000 euros et de se mettre sur le dos un prêt de vingt-cinq ans." Une inquiétude qui nourrit à son tour la baisse de l'emploi local dans le secteur du bâtiment.
A contrario, à Gruissan, station balnéaire de l'Aude, ce sont les anciens qui frappent à la porte du maire pour un logement social."Beaucoup de jeunes retraités en provenance de la région parisienne ou de l'est de la France viennent s'installer chez nous", note Louis Labatut, premier adjoint au maire. "Mais pour beaucoup, leur retraite est insuffisante pour se maintenir dans une location dans le privé et ils demandent à leur tour un logement social..."
A l'inverse, les listes d'attente pour un logement social sont un lointain souvenir à Saint-Jean-de-Maurienne. Dans cette vallée de Savoie où plusieurs sites industriels ont été durement touchés par la crise "le foyer de jeunes travailleurs est à moitié vide, témoigne Pierre-Marie Charvoz, le maire divers droite. Ici, lorsqu'il n'y a pas de travail, les gens partent".
  • Le difficile financement des activités périscolaires
Autre thermomètre des petits maires, les activités périscolaires des communes. "Nous relevons une hausse des impayés dans les cantines scolaires, régulièrement précédées d'une perte d'emploi", signale Jean-Michel Morer, maire socialiste de Trilport (Seine-et-Marne).
Idem à Baillif en Guadeloupe où Marie-Lucile Breslau, maire divers droite, regrette que la hausse de la prime de rentrée scolaire ait bénéficié aux parents, sans contrôle possible. "C'est la commune qui finance le matériel scolaire, les livres, l'entretien des installations et qui doit faire face aux impayés de cantine, alors que la caisse des écoles est vide. On peut se demander de quelle façon les enfants ont bénéficié de cette augmentation", s'indigne-t-elle.
"Les familles les plus défavorisées ne retirent leurs enfants qu'en ultime recours. Pour beaucoup, la cantine offre le seul repas équilibré de leurs enfants", souligne pour sa part Jean-Michel Morer.
Le maire d'Harfleur fait le même constat : les familles les plus précaires, à qui l'on demande environ 50 centimes d'euros par repas, conservent la cantine pour leurs enfants.
D'autres parents n'ont pas le choix. "Pour les familles gagnant le smic qui paient 2,50 euros pour un repas revenant à 8 euros à la commune, la cantine représente une véritable charge dès lors qu'il y a plusieurs enfants dans le foyer", témoigne-t-il. Travailler, même à plein-temps, n'est plus toujours suffisant pour répondre aux besoins primaires d'une famille.  

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