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samedi 23 mars 2024

Peut-on se préparer au syndrome du nid vide ?

Darons daronnes


 Par Clara Georges

J’ai la chance, depuis mon salon, d’avoir vue sur un spectacle gratuit dont on ne se lasse jamais : un jardin. C’est une chance parce que, en ville, c’est rare, et comme l’explique ma collègue Cécile Cazenave dans sa chronique « Chaud devant », observer les bourgeons du sureau avec ses enfants est peut-être plus utile pour les éveiller à la fragilité du vivant que leur livrer des informations écoanxiogènes. C’est une chance parce que c’est chaque matin différent.

Et c’est une chance parce que, depuis plusieurs années, je regarde, dès le mois de mars, le même couple de merles y préparer son nid consciencieusement, amasser des brindilles, former ce cercle à l’architecture fascinante, dans un coin isolé. Ces jours-ci, la merlette couve. En s’approchant, on voit dépasser sa queue. Le merle sautille, creuse deux-trois trous dans l’herbe, surveille les alentours. Si tout va bien, nous allons ensuite assister à ce moment que nous avons découvert avec émerveillement pour la première fois pendant le confinement de mars 2020 : la naissance des merleaux. Ils sont affreux, avec des becs démesurés et grand ouverts, un gosier gigantesque, un corps dépourvu de plumes. Et ils ne font que piailler. Mais soudain, alors qu’on n’y a pas prêté attention pendant quelques jours, les voici déjà dans le jardin, tout gros et pleins de plumes, à suivre leur mère d’un pas incertain tandis qu’elle les entraîne à voler. Des toutes petites étapes : une branche basse ; un muret ; le sol, et on recommence. Cela dure ainsi quelque temps ; ils s’aventurent de plus en plus haut dans le sureau. Et un matin, à peine deux mois après l’installation des parents, les merleaux sont partis.

C’est comme assister à ma propre vie en accéléré. Mes trois enfants, je les ai trouvés parfaits à la naissance, alors qu’ils ressemblaient certainement, dans leur genre, à des merleaux déplumés. Et voilà qu’à présent j’ai à peine cligné des yeux, et ma fille aînée, 9 ans, me demande comment l’on s’y prend pour dire à quelqu’un qu’on l’aime. Si je n’y prends garde – et même si j’y prends garde ! –, il suffira d’un nouveau clignement d’œil pour qu’elle et les deux autres nous annoncent, avec une joie mêlée de crainte, qu’ils quittent la maison. Au-delà des branches basses et du muret, de l’autre côté, là où notre regard de parent ne pourra plus porter.

Comment se préparer à ce moment ? Peut-on s’y préparer ? J’ai déjà abordé cette question dans une précédente lettre, mais j’y reviens parce que je voudrais partager avec vous de nouvelles lectures qui m’ont amenée à réfléchir.

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