L'Union syndicale de la psychiatrie (USP) fait connaître ses vives inquiétudes quant à plusieurs dispositions prévues dans le projet de loi relatif au droit des étrangers en France, qui doit être discuté à l’Assemblée nationale à compter du 20 juillet (lire ci-contre). L’USP estime en premier lieu qu'il "contribue à pérenniser la précarité du droit au séjour des étrangers et la suspicion à leur égard". Elle insiste plus particulièrement sur deux changements introduits par ce projet de loi lui paraissant "particulièrement nocifs". L'union demande ainsi le retrait de l’évaluation médicale de personnes étrangères malades par des médecins dépendant du ministère de l’Intérieur (article 10 du projet de loi) et du libre accès par les préfectures et les consulats "à des données très nombreuses détenues par des administrations et des entreprises privées sur des personnes étrangères".
Sur le premier point, l'USP explique qu'actuellement lorsqu’une personne demande en préfecture la délivrance d’un titre de séjour dit "étranger malade" — lorsqu’il n’y a pas de "traitement approprié" dans son pays d’origine —, l’évaluation médicale consiste en un avis donné par les médecins des ARS, "dépendant donc du ministère de la Santé, dans une logique de protection" sanitaire. "Avis dont nous rappelons qu’ils sont de moins en moins suivis par les préfets lorsqu’ils sont favorables", affirment les psychiatres. Le projet de loi prévoit de revenir à la notion "d’accès effectif au traitement approprié" dans le pays d’origine, "ce qui est mieux", commente l'USP. "Mais l’intérêt de ce changement est balayé par celui de l’évaluation médicale qui serait effectuée par un collège de médecins de l’Office français de l’immigration et de l’intégration (OFII)", pointe-t-elle. Or ces médecins ont "des compétences exclusives de médecine de contrôle et dépendent directement du ministère de l’Intérieur, dans une logique de contrôle des étrangers et des flux migratoires", pointe l'union syndicale.
Un des arguments mis en avant pour ce changement est "la variabilité des avis des médecins des ARS d’un département à l’autre et la compétence des médecins de l’OFII habitués à la problématique des étrangers puisqu’il font passer 200 000 visites médicales par an". Or, souligne l'USP, "la variabilité des avis médicaux est une constante dans tout le champ médical". Par exemple en psychiatrie, les soins sous contrainte varient dans une proportion de 1 à 10 suivant les départements, sans différence épidémiologique liée aux pathologies diagnostiquées pouvant l’expliquer, avance l'union. De plus, "l’indépendance des médecins ne saurait être garantie par leur seule déontologie mais dépend aussi de la solidité de leur cadre statutaire et du sens de leurs missions", estime-t-elle. Elle appuie donc que l’évaluation doit rester confiée à des médecins dépendant du ministère de la Santé.
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