Le Pr Chafik Chraïbi, gynécologue-obstétricien, a été démis de ses fonctions de chef de service de la maternité des orangers duCHU de Rabat, après la diffusion le 11 décembre 2014 sur France 2 du reportage « Maroc : les avortements clandestins ».
La sanction est tombée le 27 janvier dernier, une lettre émanant du ministre de la Santémarocaine, El Hossein El Ouardi, attestait de la décision de renvoi du PrChafik Chraïbi. « Il ne s’agit pas de pénaliser des gens pour leurs idées. Je suis moi-même très favorable à la lutte contre l’avortement clandestin et souhaite ouvrir un débat », a expliqué à l’AFP, le ministre de la Santémarocain.
Les raisons éthiques vs les positions du médecin
Le ministre de la Santé marocain a soutenu que cette décision, qui émane selon lui d’une « commission scientifique indépendante » avait été prise pour des raisons éthiques lors du tournage du reportage et non pour les positions du médecin. « C’est une sanction logique pour des considérations éthiques », a affirmé à l’AFP, El Hossein El Ouardi, ajoutant que des personnes « avaient été filmées sans leur consentement écrit ».
Pourtant, le Pr Chraïbi conteste l’argument évoqué par le ministre de la santé. « Le tournage a été fait avec toutes les autorisations nécessaires des autorités compétentes, avait-il confirmé dans une interview effectuée par le Huffington Post Maghreb-Maroc. Ceci a bien été dit au début du reportage, avait indiqué le médecin. Toute l’administration de l’hôpital était au courant de ce tournage, (ce dernier n’ayant pas été fait en secret) d’autant plus que l’équipe de tournage est restée plusieurs jours au sein de la maternité. »
Entre 600 et 800 avortements clandestins par jour
L’annonce de cette sanction a vite été relayée sur les réseaux sociaux et dans les médias. Le paradoxe, c’est que le médecin « attendait des félicitations de la part du ministère » suite au reportage, qui selon lui, n’a pas « été nuisible à l’image de notre maternité, ni de notre pays. Il a montré une réalité quotidienne que nous vivons tous, sur laquelle les autorités compétentes doivent se pencher », avait-il affirmé auHuffington Post Maghreb-Maroc.
Entre 600 et 800 avortements clandestins sont effectués par jour au Maroc au mépris de toutes règles sanitaires pouvant engendrer des complications graves, voire mortelles.
Travailler sur le code pénal marocain afin d’assouplir la législation
Le code pénal marocain punit l’avorteur d’un à cinq ans de prison, ainsi que la femme avortée et la personne intermédiaire, même quand celui-ci n’a pas abouti (délit d’intention). Cependant, l’un des articles (453) stipule que l’avortement n’est pas puni quand il vise à sauvegarder la vie ou la santé de la femme. « Or ce terme de santé est vague et mal compris par le législateur, car l’OMS le définit comme un état de bien-être physique, psychique et social. C’est justement sur cet article 453 qu’il faudrait travailler pour élargir le champ législatif », a expliqué le médecin au Huffington Post Maghreb-Maroc.
Selon, l’Association marocaine de lutte contre les avortements clandestins (Amlac) dont le Pr Chraïbi en est le président, l’avortement n’est malheureusement pas autorisé en cas de viol, d’inceste, de femmes qui souffrent de pathologies psychiatriques ou pour les mineures. Le Pr Chraïbi a fait part de son intention de contester la sanction administrativement.
Sophie Martos
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