Le Congrès français de psychiatrie, qui s’est tenu à Nantes du 26 au 29 novembre 2014, a souligné l’extension des connaissances du mécanisme physiopathologique de plusieurs maladies mentales. Ce qui ouvre le champ à de nouveaux traitements de la dépression, ainsi qu’à de nouvelles hypothèses étiopathogéniques sur la schizophrénie. L’intérêt des psychothérapies de type TCC a été confirmé.
Va–t-on vers une psychiatrie plus « cérébrale » et moins « psychique » ? La sémiologie de la dépression a été revisitée par le nouvel intérêt porté à la dimension cognitive des troubles mentaux, lors du congrès français de psychiatrie, (Nantes, 26-29 novembre 2014). L’apport de la connaissance des réseaux neurocognitifs cérébraux permet en effet de mieux comprendre comment s’organise la pathologie dépressive, notamment les ruminations dépressives, le fonctionnement en boucle, le « réseau par défaut » (quand le sujet n’arrive plus à se concentrer sur une action ou l’écoute de quelqu’un).
Nouveaux traitements pour les dépressions résistantes
De nouveaux modes thérapeutiques pour traiter les dépressions résistantes se sont affirmés comme les traitements de demain. Ces prises en charge passent d’abord par l’arrivée d’un antidépresseur, la vortioxétine, qui a comme particularité, et c’est une première, de ne s’adresser qu’à la deuxième intention de traitement, en cas d’échec des médicaments existants.
Une autre thérapeutique de la dépression résistante, la stimulation neurologique magnétique transcrânienne a montré son intérêt. Cette technique consiste à appliquer de façon répétitive une impulsion magnétique sur le cortex cérébral à travers le crâne de façon indolore au moyen d'une bobine. Cela induit un champ électro magnétique qui modifie l'activité des neurones situés dans le champ. Une étude du Dr C. Priam et col. (centre médical Duvivier, Paris) a été menée sur 23 patients dépressifs traités de cette façon lors d’une cure de dix jours, avec ou sans médicaments. Ce travail a mis en évidence que, bien que la stimulation transmagnétique permette une diminution significative de l’intensité de la dépression et l’anxiété, une vulnérabilité psychologique est maintenue au travers de schémas dysfonctionnels. Les auteurs concluent qu’une psychothérapie associée au traitement et visant le changement de ces pensées négatives semble nécessaire afin, notamment, d’éviter les rechutes dépressives.
Les stratégies de stimulation cérébrale profonde par implantation de sonde intracérébrale montent également en puissance. Les indications en sont les dépressions extrêmement résistantes. Moins d’une centaine de malades bénéficient dans le monde de ce « pacemaker de l’humeur?» qui donnerait également des résultats dans certains TOC et anorexies sévères.
Schizophrénie : vitamine D et anti-inflammatoires à l’honneur
La physiopathologie de la schizophrénie fait depuis longtemps l’objet de nombreux débats. À côté de la piste de la rencontre d’un gène et de facteurs de risques connus comme le cannabis, de nouveaux facteurs de risque ont été mis en avant. Le Pr P. Vidhailet (CHU de Strasbourg) a ainsi insisté sur le rôle probable de la carence en vitamine D. Les patients schizophrènes y sont en effet particulièrement exposés, du fait de leur mode de vie (hospitalisations au long cours, faible exposition au soleil). Cette carence est, de plus, aggravée par les psychotropes qui leur sont prescrits. Plusieurs études montrent ainsi que les patients schizophrènes présentent deux à trois fois plus de risques de carence en vitamine D que la population générale. Et cette carence existe dès le premier épisode de la maladie. Elle pourrait participer à la survenue du trouble et à l’évolution défavorable de celui-ci. D’où l’intérêt d’évaluer le taux de vitamine D chez les schizophrènes, avec une éventuelle supplémentation à la clé.
Une autre piste physiopathologique, celle de l’inflammation, a été évoquée. En effet, une hypothèse actuelle conduit à penser la schizophrénie comme le résultat de réactions inflammatoires précoces qui perturberaient le développement cérébral. Des essais randomisés essaient de tester l’action d’anti-inflammatoires couplés aux traitements habituels, sur les symptômes schizophréniques résistants. L’aspirine a montré une efficacité significative à ce niveau, mais seulement à forte dose, d’où un problème de rapport bénéfice-risques. Les oméga 3 semblent également intéressant dans la prévention de la transition
psychotique. De même, l’acétylcystéine, testée à plus d’un gramme par jour semble montrer une certaine efficacité.
L’intérêt de la remédiation cognitive
Enfin, la prise en charge des symptômes négatifs de la schizophrénie fait de plus en plus appel à la remédiation cognitive, a pointé le Pr B. Giordana (Nice). En effet, 80% des schizophrènes sont atteints de troubles cognitifs, altérant leurs capacités professionnelles, leurs interactions personnelles, leurs capacités à gérer la vie quotidienne.
La remédiation cognitive fait appel à des programmes de thérapie cognitive et comportementale, visant à compenser les défaillances du patient à l’aide d’un entraînement adapté, d’exercices, et de stratégies sur les processus de pensée avec de bons résultats en terme de réinsertion.
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