« Partout nous subissons des attaques en règle de nos professions. Ce n'est pas normal d'être rappelé le soir ou le weekend pour gérer la pénurie de personnel ! Nos services ne sont plus hospitaliers, ils sont maltraitants ! » A la tribune, l'énumération des efforts imposés au secteur de la santé se succèdent : suppression de RTT, non-remplacement des congés maternité ou arrêts maladie, gel des salaires, urgences saturées, conditions d'accueil et de soin des patients dégradées…
Un peu partout en France, plus de 100 établissements hospitaliers ont participé à la manifestation qui se tenait devant le ministère de la santé mardi 23 septembre, sous la bannière d'un nouveau mouvement baptisé « Convergence des hôpitaux en lutte contre “l'hôstérité” ».
« Tu ne penses qu'aux sous, on ne pense qu'aux soins », peut-on lire sur les dossards blancs. De Bordeaux, Toulouse, Lille, Rennes, du Jura ou de la région parisienne, plus de 1 000 infirmières, psychologues, personnel technique ou administratif se sont mobilisés. « Ce n'est pas qu'on veuille des RTT à tout prix, de toute façon le fric pour partir en vacances on ne l'a pas…, lâche une psychologue de la maison d'arrêt de Fresnes (Val-de-Marne), qui préfère rester anonyme. Mais on a besoin de temps de repos, surtout en psychiatrie. Si on nous les retire, on va devenir dingues ! »
« SI L'HÔPITAL CONTINUE DE TOURNER, C'EST GRÂCE À NOUS ! »
Après deux heures d'échanges et de discours en tribune, les manifestants prennent la direction de l'hôpital Cochin, où se tient une assemblée générale à 14 h 30. Avant de prendre la parole, Abdoulaye Thiam, l'un des membres non syndiqués de la délégation reçue par la ministre de la santé Marisol Touraine un peu plus tôt, confie : « Légalement, on pourrait refuser de faire des remplacements au pied levé ou de refuser de travailler sans les 12 heures de pause réglementaires… Mais on ne le fait pas, car si l'on reste chez nous, nos collègues vont souffrir du sous-effectif et les patients seront pas ou mal pris en charge. »
Pour M. Thiam, infirmier psychiatrique à l'hôpital Paul-Guiraud de Villejuif (Val-de-Marne), les soignants sont écartelés entre devoir de soin et nécessité de faire entendre leurs revendications : « Aujourd'hui, si l'hôpital continue de tourner c'est grâce à nous, et c'est par cette conscience professionnelle que le gouvernement nous tient ! »
Les revendications du mouvement — appelé plus brièvement « la convergence » — portent sur trois axes : sur la lutte contre les restrictions budgétaires de 10 milliards d'euros annoncées dans le secteur de la santé d'ici 2017, sur le manque de dialogue social au sein des établissements et avec le gouvernement ainsi que sur le rejet du projet de loi de santé qui devrait être présenté en octobre par Mme Touraine en conseil des ministres.
MANIFESTATION DE LA CGT LE 16 OCTOBRE
C'est à Caen que les prémices du mouvement sont apparues au printemps 2013. Odile André, infirmière à l'Etablissement public de santé mentale (EPSM) d'où sont montées les premières revendications, est l'une des 120 membres de la délégation caennaise. « Depuis juin 2013, on est en lutte contre le plan de modernisation de l'hôpital qui vise à supprimer 5 RTT par agent, soit la suppression mécanique de 20 emplois. Pour que le plan passe, il doit être voté au comité technique d'établissement, au comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail et à la commission médicale d'établissement. Or depuis 2013, on empêche ces instances de se tenir ! » Malgré deux sanctions du tribunal administratif et le risque de 1 000 euros d'amende qui plane désormais au-dessus de la tête des grévistes de l'EPSM, ils n'ont pas l'intention de stopper la lutte.
A ce jour, la CGT n'a pas rejoint le mouvement des salariés et usagers d'hôpitaux et a appelé à sa propre manifestation nationale le 16 octobre. Mardi après-midi, l'assemblée générale du mouvement a tranché en faveur d'une participation à l'action de la CGT, nourrie par les mêmes craintes et les mêmes espoirs.
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