Les individus ne sortent pas indemnes de la fin du religieux. Un nombre croissant d'entre eux souffrent de mal-être lié à la perte de repères et d’appartenance à une communauté. Décryptage avec le psychiatre Pierre Vallon.
Par Laurence Villoz
Ce thérapeute de 61 ans, au regard bleu perçant, me reçoit entre deux consultations dans son cabinet, situé en plein cœur de Morges. Pierre Vallon, qui se définit comme un «théologien amateur», explique comment ses patients vivent angoisses et dépressions dans un monde post-moderne, un monde «sans narration».
En quoi l'effacement du christianisme affecte-t-il l’individu?
Les histoires comme celles racontées dans la Bible offrent un cadre de références. En se remémorant des situations où l’émotion désagréable s’est déjà produite, l’individu sait qu’il peut y faire face, qu’il peut lutter car lui ou d'autres y sont déjà arrivés. Mais tout cela n’est possible qu’avec une forme de théorie qui leur sert de cadre, une histoire qui crée un lien partagé par la communauté et les individus qui la composent.
Il me semble pourtant que l'on a longtemps considéré les religions comme opprimant les individus.
Pendant des centaines d’années, la religion appartenait au clergé, qui donnait ses consignes au peuple pour lui dire comment se comporter. La Réforme protestante a permis à l'individu de commencer à penser par lui-même en s'affranchissant des dogmes de l’Eglise en place.
Mais le protestantisme a aussi amené son lot de névroses. On trouve dans ce courant beaucoup de culpabilité, de dépréciation et de dévalorisation, qui appartiennent aussi à la dépression.
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