La Journée internationale pour l'élimination de la violence à l'égard des femmes, fixée au 25 novembre par les Nations unies, ne suffira sans doute pas à faire reculer ce qu'ONU Femmes appelle une « pandémie ». Les chiffres sont accablants : jusqu'à 70 % des femmes dans le monde sont confrontées à la violence physique ou sexuelle au cours de leur existence. « Cette violence apparaît la plupart du temps dans le cadre de relations intimes, et de nombreuses femmes désignent leur conjoint ou partenaire comme étant l'auteur de ces violences », précise l'agence des Nations unies, créée en 2010 pour promouvoir « l'égalité des sexes et l'autonomisation des femmes ».
Cette statistique ne dit pas les nombreuses formes que prennent ces agressions : violences domestiques, mariages forcés et précoces, mutilations génitales, viols, harcèlement sexuel, traite, prostitution… Cette réalité touche toutes les régions du monde. « Les chiffres sont effarants, quel que soit le pays », estime Miren Bengoa, la présidente du Comité national France d'ONU Femmes, créé officiellement le 14 novembre.
Comment expliquer une telle difficulté à faire reculer ces violences ? En France, 83 000 femmes sont victimes de viols ou de tentatives de viol, selon les chiffres du Haut Conseil à l'égalité entre les femmes et les hommes. En réalité, elles sont certainement beaucoup plus. « 9,3 % des victimes seulement portent plainte parce que, dans 80 % des cas, l'auteur des viols est connu de la victime », estime Danielle Bousquet, la présidente du Haut Conseil.
« C'EST LA SPHÈRE PRIVÉE »
« De plus en plus de pays adoptent des législations pour protéger les droits des femmes, dit Miren Bengoa. Mais cela reste très difficile. Les gens ne se rendent pas compte de cette réalité, notamment dans les sphères de décision, où les personnes sont moins confrontées à ces faits. Et beaucoup considèrent qu'il s'agit de la sphère privée. »
La lutte contre ces violences n'est pas qu'une affaire de conscience. Elles ont un prix et des conséquences sur la vie économique des pays. « Le coût de la violence perpétrée par un partenaire intime aux Etats-Unis dépasse 5,8 milliards de dollars par an, dont près des deux tiers pour les frais médicaux et soins directs, le reste pour les pertes de productivité », d'après une étude de 2003 du Centre national de prévention et de contrôle des blessures américain, explique ONU Femmes. L'Australie, en 2009, a estimé ce coût à 13,6 milliards de dollars (10,06 milliards d'euros) par an.
Les femmes sont aussi souvent les premières victimes des conflits armés et des violences ethniques. Sibel Agrali, directrice depuis seize ans du centre de soins Primo-Levi qui, à Paris, accueille les victimes de la torture et de la violence politique, témoigne : « Depuis deux ou trois ans, nous accueillons de plus en plus de femmes, seules, avec leurs enfants, ou enceintes après avoir été violées avant leur départ ou pendant leur voyage, dont plus de la moitié viennent d'Afrique subsaharienne ». Le Centre Primo-Levi a pris en charge 331 patients en 2012, un chiffre en hausse par rapport aux années précédentes. « Le plus dramatique, dit sa directrice, c'est qu'à l'arrivée ces femmes sont confrontées à de nouvelles violences sociales, parce que soumises à la précarité. »
La tâche reste considérable. « De trop nombreux pays contestent aujourd'hui la validité universelle des droits des femmes, pour des raisons sociales, religieuses… Les pays les plus conservateurs freinent sur cette question », estime Miren Bengoa. Pour dénoncer cette situation, les initiatives en tous genres se multiplient. Après la manifestation du Collectif national pour les droits des femmes, le 23 novembre à Paris, un rassemblement est organisé, mercredi 27, pour soutenir les Saoudiennes qui réclament le droit de conduire leur voiture et de circuler en vélo.
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