Longtemps, dans les médias, le sujet de l'hyperactivité a surtout été abordé sous l'angle du traitement médicamenteux par méthylphénidate (Ritaline), la question étant essentiellement de savoir si ce psychotrope n'est pas trop - ou mal - prescrit en France. Deux ouvrages récents, écrits par des spécialistes de la prise en charge des patients atteints du trouble déficit de l'attention/hyperactivité (TDAH), dépassent largement ce débat et explorent, chacun dans leur style, bien d'autres facettes de cette pathologie qui n'est pas, loin s'en faut, l'apanage des enfants.
Le docteur Marie-France Le Heuzey, psychiatre à l'hôpital Robert-Debré (Paris), se centre surtout sur l'adolescent hyperactif - titre de son livre. Chef du service de neuropsychiatrie de l'enfant au CHU de Lyon et lui-même hyperactif, Olivier Revol témoigne, quant à lui, de sa double expérience dans On se calme ! Enfants agités, parents débordés. A travers les tranches de vie des petits patients qu'il prend en charge et la sienne, il livre un récit instructif, optimiste, et déculpabilisant pour les principaux intéressés et leurs parents.
De longs passages sont consacrés à l'hyperactivité de l'adulte, souvent méconnue y compris des médecins. « De nombreux adultes ouvrent les yeux et découvrent leur propre TDAH au moment de l'évaluation de leur enfant, écrit Olivier Revol. C'est un moment fort, qui a un double impact positif. Sur l'enfant, enfin compris par son entourage, et sur des parents, qui réalisent soudain de quoi eux-mêmes ont souffert ».
Poser un diagnostic d'hyperactivité chez l'adulte peut être un véritable défi, tant les symptômes sont différents de ceux d'un enfant, souligne le pédopsychiatre lyonnais. En effet, l'agitation motrice qui caractérise les enfants a disparu ; l'agitation est toujours là, mais s'est transformée en « tension intérieure ». Quant à l'impulsivité, elle se traduit « par un comportement souvent socialement inapproprié : tendance à couper la parole, à ne pas écouter, à quitter un travail du jour au lendemain »... Un tableau dans lequel bien des adultes se reconnaîtront, sans forcément se sentir malades ou très handicapés.
UN SYMPTÔME COMME LA FIÈVRE
De fait, insiste Olivier Revol, « l'hyperactivité n'est pas une maladie. Juste un symptôme comme la fièvre ou les maux de tête », que le médecin doit apprendre à décrypter, et le patient à gérer. Bien comprise, cette hyperactivité peut alors devenir une force inattendue, relève le praticien, de nombreux exemples, dont le sien, à l'appui.
Tout un chapitre est consacré aux pionniers de la psycho-éducation au Québec, qu'il est allé rencontrer dans les années 1990, et dont il a rapporté des méthodes en France. Dans ces approches originales, la règle de base est la participation de l'enfant, qui, dès la première séance, choisit lui-même parmi plusieurs items ce qu'il souhaite améliorer dans son quotidien, par exemple parler au bon moment ou prendre soin de son matériel de classe. L'ensemble du programme est conçu pour que le petit patient apprenne à se connaître, et tous les partenaires (parents, médecins, éducateurs, enseignants...) sont impliqués.
Dans un style plus neutre, mais également grâce à des cas concrets, Marie-France Le Heuzey décortique, de son côté, les troubles hyperactifs des adolescents, leurs pièges, les risques associés (conduites à risque, addictions...), les aides possibles. Les deux auteurs se rejoignent sur plusieurs points, à commencer par le constat de diagnostics trop tardifs du TDAH, malgré, pour certains, des consultations en psy dès l'enfance.
Les docteurs Revol et Le Heuzey soulignent aussi de concert la souffrance des parents, confrontés à l'incompréhension, voire à l'hostilité du milieu scolaire et familial. « Il est vraiment temps qu'une information claire sur le TDAH de l'enfant et de l'adolescent soit développée dans notre pays pour les familles, les enseignants et les autres adultes responsables de la santé et du bien-être des jeunes », préconise Marie-France Le Heuzey. Les ateliers de « guidance parentale » qui se développent dans les hôpitaux spécialisés sont aussi un précieux soutien.
L'Adolescent hyperactif, de Marie-France Le Heuzey (Odile Jacob, 176 p., 20,90 €). On se calme !, d'Olivier Revol (JC Lattès, 266 p., 18,5 €).
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