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jeudi 5 janvier 2023

Comment nos bactéries intestinales nous motivent (ou non) à faire du sport

Publié le 06 janvier 2023 

CHRONIQUE

Eva Desvigne-Hansch

Présentes dans notre système digestif, certaines bactéries envoient un signal au cerveau à travers la moelle épinière, augmentant ainsi notre plaisir à faire du sport et donc notre motivation.

Dix mille pas et plus. Faites du sport, c’est bon pour la santé ! Cette injonction clamée par de nombreuses campagnes de prévention est pourtant plus facile à dire qu’à faire, la capacité à faire du sport dépendant en grande partie de la motivation. Mais d’où vient cette motivation ? Elle vient d’une molécule, la dopamine, qui, pendant un effort physique, est relâchée dans le striatum, une zone de notre cerveau impliquée notamment dans les impulsions… et la motivation. La dopamine, aussi appelée hormone du bonheur, est un neurotransmetteur. C’est-à-dire qu’elle transmet une information entre deux neurones au niveau de zones de contact nommées synapses. Lorsqu’elle est reçue en grande quantité par le neurone récepteur, c’est un signal de plaisir. Puisque ce plaisir est perçu pendant l’effort physique, le système de la récompense est activé et nous pousse à vouloir refaire du sport. Jusque-là, on se dit que la nature est bien faite.

Mais nous ne sommes pas tous égaux face à la motivation. Pourquoi certains d’entre nous se disent « accros » au sport quand d’autres peinent à se mettre à l’effort ? C’est ce à quoi ont voulu répondre des chercheurs de l’université de Pennsylvanie en comparant les performances physiques au sein d’une cohorte de souris. S’ils n’ont pas trouvé de gène spécifique de la force physique, un résultat a retenu leur attention. Les souris pour qui le microbiote (l’ensemble des bactéries bénéfiques colonisant notre intestin) a été supprimé présentaient des mauvaises performances sportives comparées à leurs congénères. En testant les effets de la suppression de certaines souches bactériennes, ils ont pu identifier que certaines d’entre elles, comme Eubacterium ou Coprococcus, avaient un effet positif sur la motivation à faire du sport.

De la dopamine en quantité

Mais comment ces bactéries parviennent-elles à jouer sur nos performances physiques ? Les chercheurs américains ont montré qu’elles stimulent le relargage de la dopamine dans le striatum pendant l’effort. En effet, certaines bactériesrelarguent des molécules au nom barbare de N-oleoylethanolamide. Ces métabolites vont être captés par des neurones sensoriels qui relient notre intestin à notre cerveau (à travers la moelle épinière). Ils vont plus spécifiquement se lier à des petits récepteurs présents sur la partie terminale intestinale des neurones et ainsi favoriser leur activation pendant le sport. Or, lorsqu’ils sont actifs, les neurones sensoriels inhibent dans le striatum la production d’une enzyme nommée monoamine oxydase (MAO). Cette enzyme est responsable de la dégradation de la dopamine au niveau des synapses.Lorsque l’enzyme est absente, la dopamine est maintenue en quantité suffisante pour induire un signal de plaisir. En activant les neurones sensoriels pendant l’effort, les bactéries garantissent donc la présence d’une quantité importante de dopamine dans le striatum, et donc un sentiment de plaisir qui va par la suite motiver à faire du sport.

Nous avons tous un microbiote différent et unique. Cela explique donc en partie que nous n’envisagions pas tous le sport de la même manière. La composition du microbiote dépendant en partie du régime alimentaire, ce mécanisme a pu être avantageux au cours de l’évolution pour coupler la disponibilité des aliments avec la capacité à fournir un effort physique prolongé. Mais la connaissance de l’implication des bactéries intestinales dans les capacités sportives donne aussi des pistes potentielles pour aider les personnes les plus réticentes à l’idée de faire du sport, comme des régimes alimentaires adaptés. Mais de nombreux autres facteurs de motivation existent. Il ne faudrait pas se reposer sur son microbiote.


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