Plus d’un an de pandémie au compteur, et un bilan à tirer. Ce dimanche, la Fédération des associations générales étudiantes (Fage) publie une enquête au titre évocateur : «Un an après : l’urgence d’agir pour ne pas sacrifier la jeunesse». Commandée auprès de l’institut de sondage Ipsos, elle retrace les problématiques concernant l’ensemble des jeunes : étudiantes et étudiants, stagiaires, mais aussi les personnes à la recherche d’un emploi ou actives. L’occasion pour l’organisation étudiante d’analyser l’évolution des difficultés des jeunes, et d’évaluer les mesures prises par le gouvernement pendant la crise sanitaire pour les accompagner.
Impact de la crise sur les ressources financières, santé fragilisée, difficultés académiques, accès à l’emploi… Cette enquête a été réalisée auprès de 1 000 personnes âgées de 18 à 25 ans entre les 22 et 25 mars 2021. Les résultats sous le nez, force est de constater que «les choses n’évoluent pas dans le bon sens», souligne Paul Mayaux, président de la Fage. En juillet 2020, une première enquête portant sur les mêmes points avait été publiée par l’association. «On a voulu en faire une seconde dans la continuité de ce qu’on avait lancé. Le constat global, c’est que, sous tous les aspects, on voit soit une stagnation soit une dégradation de la situation des jeunes», résume Paul Mayaux. Et de déplorer : «Les mesures pour lutter contre la précarité ne semblent pas avoir fonctionné.»
La précarité stagne
Dans l’enquête parue en 2020, près de trois quarts des 18-25 ans déclaraient avoir rencontré des difficultés financières depuis le début de la crise sanitaire (74 %). Un chiffre qui a à peine décru, puisque 72 % des personnes interrogées tirent encore le même constat, selon les nouvelles données publiées par l’organisation étudiante. Concrètement, il a été compliqué pour nombre de ces jeunes de subvenir à des besoins de première nécessité. Par exemple, le paiement des charges liées à leur logement (50 %), avoir une alimentation saine et équilibrée (52 %) ou encore, pour les personnes menstruées, acheter des protections hygiéniques (31 %). «C’est d’autant plus compliqué que beaucoup de jeunes en difficultés, qui ne peuvent pas être aidés par leurs parents, ont perdu leur emploi», constate Paul Mayaux.
Paul Mayaux avait pourtant bon espoir face à l’annonce par Emmanuel Macron, en janvier, de la généralisation de deux repas par jour à 1 euro dans les restos universitaires. Le président de la Fage parle d’une «très bonne mesure», mais «tardive et mal mise en place» : «Il y a des points de restauration qui ne sont pas ouverts, ou pas à proximité de là où se trouvent les jeunes… C’est bien de pouvoir se restaurer pour 1 euro, mais compliqué quand il faut faire quarante minutes de transport pour aller jusqu’au RU.» Même déception concernant les aides d’urgence du Crous ou encore l’accès aux bourses. «Il y a un fort taux de non-recours aux aides, et il est urgent d’élargir l’accès aux bourses qui exclut trop de jeunes dans le besoin»,insiste Paul Mayaux.
Décrochage en hausse
Au niveau académique, l’enquête met en lumière un mouvement inquiétant : 94 % de la population étudiante déclare que la crise a provoqué un décrochage des études, contre 84 % lors de la première enquête. «Une augmentation qui montre l’incapacité des services universitaires à s’adapter au distanciel», souligne le président de la Fage, déplorant les promesses non tenues concernant le recrutement de tuteurs pour accompagner les étudiantes et étudiants : «Seulement la moitié des postes prévus ont été pourvus, et beaucoup de jeunes n’étaient pas informés sur ce dispositif.»
Les jeunes ayant fini leurs études ne s’en sortent pas mieux. En effet, 8 personnes interrogées sur 10 considèrent que la période actuelle handicape leur recherche d’emploi. Un chiffre élevé qui ne faiblit pas avec le temps, puisqu’il a même augmenté de 3 points depuis la dernière enquête de la Fage. Pour lutter contre ces difficultés, la Fage défend la généralisation de la «garantie jeunes»pour l’ensemble des moins de 25 ans.
Santé mentale en chute libre
Des chiffres en particulier interpellent Paul Mayaux, ceux qui portent sur la santé mentale des jeunes. Sur l’ensemble des personnes ayant répondu à l’enquête, 76 % déclarent avoir été affectées par la crise au niveau psychologique, affectif ou physique. Une proportion qui s’élève à 83 % chez les étudiantes et étudiants. Une détresse d’autant plus grave qu’elle se traduit, chez 27 % des répondants, par des pensées suicidaires. Soit une augmentation de 4 points en neuf mois. Du côté des jeunes en recherche de leur premier d’emploi, l’augmentation est encore plus visible : 42 % ont eu des pensées suicidaires depuis le début de la crise sanitaire, soit 20 points de plus qu’en juin 2020.
Là encore, Paul Mayaux pointe du doigt des mesures tardives et bien trop modestes pour enrayer la gravité de cette crise. «On ne peut pas se satisfaire du chèque psy. L’annonce a été faite en février et on a encore aujourd’hui des centres de santé universitaires qui n’ont pas mis en place le dispositif», déplore le président de la Fage. Pour lui, cette mesure, comme les autres, n’est pas à la hauteur des enjeux. Il voit la publication des résultats de cette enquête comme un ultime cri d’alerte. «Il est déjà trop tard. Mais si le gouvernement n’agit pas d’ici la fin de l’année, la prochaine rentrée va être encore pire», s’alarme-t-il, avant de conclure : «Si rien n’est fait maintenant, on pourra vraiment dire que cette génération a été sacrifiée.»
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