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mercredi 23 mai 2018

Un décret autorise les ARS à suivre via Hopsyweb les personnes placées en soins sans consentement


Comme annoncé en février par Édouard Philippe, dans le cadre du plan de prévention de la radicalisation, le Gouvernement veut assurer un meilleur partage de données entre ARS sur les hospitalisés sans consentement. Un décret publié ce 24 mai vient ainsi autoriser la mise en œuvre par les agences sanitaires de l'outil Hopsyweb.

Un décret autorisant les traitements de données à caractère personnel relatifs au suivi des personnes en soins psychiatriques sans consentement est paru au Journal officiel du 24 mai. Ce texte, notamment signé par le Premier ministre, Édouard Philippe, et la ministre des Solidarités et de la Santé, Agnès Buzyn, autorise l'utilisation de l'outil dénommé Hopsyweb par les ARS pour la "gestion" de ces soins, après avoir recueilli l'avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (Cnil) et du Conseil d'État. Il vient traduire règlementairement l'une des annonces faites par Édouard Philippe en février dernier dans le cadre de la présentation du plan gouvernemental de lutte contre la radicalisation à Lille (Nord), dont quelques mesures visent à renforcer la mobilisation des acteurs de la psychiatrie dans la prévention de cette radicalisation (lire notre article).

Accès aux "données sensibles"


Une mesure du plan dévoilé à Lille prévoyait en effet "d'actualiser les dispositions existantes relatives à l’accès et la conservation des données sensibles contenues dans l’application de gestion des personnes faisant l’objet d’une mesure de soins psychiatriques sans consentement" (Hopsy). Leministère de la Santé a précisé à l'époque à Hospimedia qu'il est envisagé de permettre un meilleur échange d'informations, uniquement entre ARS, pour le suivi de personnes qui seraient hospitalisées sans consentement successivement dans différentes régions. Il a aussi tenu à souligner qu'aucune mesure nouvelle prévue par le plan ne porterait atteinte au secret médical ni ne modifierait de quelque manière que ce soit les conditions d'exercice des professionnels. Une manière de désamorcer par avance de nouvelles inquiétudes éventuelles des professionnels de la psychiatrie sur ce terrain sensible (lire notre article).

L'article 3 du décret indique que le directeur général (DG) de l'ARS "désigne, pour chaque département, les personnels de cette agence habilités à enregistrer et accéder aux données et informations mentionnées [dans le décret] aux fins de suivi des personnes" concernées. Son article 4 précise que les autorités préfectorales ou de police, les intervenants pénitentiaires ou judiciaires (juges, avocats, etc.) et le directeur de l'établissement d'accueil — ou l'agent placé sous son autorité qu'il désigne à cette fin — "sont destinataires des seules données et informations du traitement de données "Hopsyweb" nécessaires à l'exercice de leurs attributions".

Échéanciers pour contrôler les délais prescrits


L'outil Hopsyweb doit notamment permettre, selon l'article 1 du décret, la tenue d'un échéancier des certificats médicaux et des arrêtés du représentant de l'État dans le département, avec contrôle des délais prescrits et des saisines du juge des libertés et de la détention (JLD), au titre de la procédure de contrôle des mesures sous forme d'hospitalisation complète. Il doit aussi permettre la production des projets d'actes et de documents prescrits dans le cadre des soins sans consentement et la production des courriers aux destinataires des informations statistiques, dûment habilitées par le ministère de la Santé. Enfin, il viendra appuyer la tenue du secrétariat des commissions départementales des soins psychiatriques — qui est du ressort des ARS mais ce rôle semble inégalement tenu sur le terrain avec des agences qui ne convoquent parfois pas les commissions comme elles le devraient, comme l'a rappelé un rapport parlementaire en février 2017 (lire notre dossier). Enfin, une consultation nationale des données collectées dans chaque département est visée grâce à la mise en œuvre de cet outil Hopsyweb.

Les catégories de données recueillies sont notamment celles permettant d'identifier la personne en soins psychiatriques sans consentement, ses avocats, son tuteur ou curateur éventuel mais aussi les médecins, auteurs des certificats médicaux ou des rapports d'expertise concernant ce patient et les personnes chargées de son suivi. 

Identification des référents hospitaliers du suivi

Les informations sur la situation administrative ou juridique des personnes en soins sans consentement seront aussi consignées, notamment l'adresse de l'établissement de santé d'accueil, l'identification de la personne référente dans cet établissement, les dates de différents documents et/ou procédures tels que certificats médicaux, arrêtés préfectoraux, sorties de courte durée, arrêtés de passage en programme de soins et levée de la mesure, saisines du JLD, audiences, décisions judiciaires, etc.

Enfin, le ministère de la Santé a indiqué en février qu'une réflexion devait être menée sur le délai de conservation de ces données. Le décret précise que celles-ci sont conservées "pendant trois ans à compter de la fin de l'année civile suivant la levée de la mesure de soins sans consentement". Les droits d'accès et de rectification des données, prévus aux articles 39 et 40 de la loi du 6 janvier 1978 dite "informatique et libertés", sont exercés auprès du DG de l'ARS territorialement compétent. Cependant, le droit d'opposition prévu à l'article 38 de la même loi — qui prévoit que "toute personne physique a le droit de s’opposer, pour des motifs légitimes, à ce que des données à caractère personnel la concernant fassent l’objet d’un traitement" — ne s'applique pas pour la mise en œuvre d'Hopsyweb, signale pour finir le décret.
Caroline Cordier

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