Crédit Photo : S. Toubon
Un défibrillateur qui ne reconnaît pas le signal au moment de choquer un patient lors d’une urgence vitale ; une chute de peinture sur un champ opératoire ; une coupure d’électricité au bloc ; 7 à 8 minutes pour rallumer les machines…: entre septembre 2013 et mars 2017, plus de 26 000 fiches d’incidents plus ou moins graves ont été enregistrées par le CHU de Toulouse – dysfonctionnements techniques, pannes de matériel, défaut de personnel, risques divers pour les patients…
Ces documents confidentiels ont été rendus publics ce mercredi par Médiacités, éclairant une situation peu reluisante pour le CHU.
Mise en danger
Selon Médiacités, c’est une fuite interne qui a révélé cette longue liste d’anomalies et d'incidents survenus au CHU de Toulouse entre septembre 2013 et mars 2017. Il s’agit de fiches rédigées par le personnel soignant lui-même et transmises au service qualité dans le cadre de la politique de l’établissement. Or, si certains incidents sont bénins, d’autres relèvent de dysfonctionnements graves pouvant mettre en danger la vie des patients.
« Cela ne fait malheureusement que confirmer ce que nous dénonçons depuis des mois : par manque de moyens et de personnels, les procédures de prise en charge sont dégradées au CHU de Toulouse, accuse Pauline Salingue élue CGT et membre du CHSCT. Nous pointons régulièrement ces situations en conseil de surveillance et, s’il n’y a aucun doute sur le fait que les médecins les subissent autant que nous, nous déplorons un manque de soutien ouvert de leur part. »
20 % des dysfonctionnements liés aux soins
Les syndicats voient dans ces incidents la conséquence d’un manque criant de personnel dans de nombreux services. « La direction ne remplace plus les arrêts maladie ni les congés maternité et privilégie la mutualisation des équipes entre les services », dénonce Pauline Salingue.
Sollicité ce mercredi par le « Quotidien », le Pr Laurent Schmitt, président de la commission médicale d’établissement (CME) du CHU, ne cache pas sa colère au sujet de ces révélations. « Cette fuite est une campagne de harcèlement parfaitement orchestrée contre le service public. Sur ces 26 000 fiches, 20 % sont directement liées aux soins et traitées de façon prioritaire, assure-t-il. Et puis, il faut ramener ce chiffre à une moyenne de 5 000 incidents par an, ce qui est strictement superposable à l’ensemble des CHU français. » Selon le praticien, ce système de signalement systématique des événements indésirables est même « très bon signe car il témoigne de l’honnêteté de l’hôpital et de sa capacité à ne pas masquer ses défaillances ».
Un CHU debout
Anne Ferrer, directrice par intérim du CHU de Toulouse, s'est expliquée ce mercredi matin sur France Bleu Occitanie. « Ce qui a été diffusé dans la presse et relayé par une organisation syndicale correspondent à des événements qui sont tous traités, souligne-t-elle. Par principe, on demande à chaque agent de les relayer dès lors qu'ils en sont le témoin, dès lors qu'ils en sont à l'origine, dès lors qu'ils en ont connaissance (...). Chaque fiche est traitée, analysée. Elles sont signalées tous les jours pour des dysfonctionnements qui peuvent être anodins, un planning qu'on ne peut pas imprimer comme des problèmes dans les bâtiments ».
La directrice par intérim balaie l'hypothèse d'un CHU toulousain qui serait sur le point de craquer. « L'hôpital prend en charge plus de 800 000 consultants, 280 000 patients sont hospitalisés, les urgences sont ouvertes 24h sur 24h, nous avons des équipes prêtes à accueillir les patients. Il faut faire attention à ce qui se passe. Il faut faire attention aux "CHU leaks". Tout ce qui tend à être instrumentalisé par les organisations syndicales pour essayer de démontrer que les hôpitaux ne vont pas bien me semble délétère. »
De notre correspondante
Béatrice Girard
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