Commentant une étude britannique sur l’épidémiologie d’un premier épisode psychotique[1], l’éditorialiste de The American Journal of Psychiatry rappelle que certains éléments de l’environnement constituent des facteurs de risque « pour des psychoses non affectives comme la schizophrénie. » On constate en effet une incidence supérieure de cette maladie quand la densité de population est plus élevée, et quand au moins deux de ces quatre indicateurs (connus par les résultats des recensements) sont dégradés : accès à l’éducation, au travail, aux soins, et à un environnement de bonne qualité.
Ce constat épidémiologique ne permet pas toutefois de trancher, dans cette nouvelle mouture du débat classique (de type « poule ou l’œuf ») sur le déterminisme chronologique des phénomènes : l’incidence accrue des psychoses est-elle une conséquence directe de ces contextes sociologiques (densité importante de population, pauvreté, chômage...) ou, inversement, des sujets déjà à risque de développer des troubles psychotiques (notamment par susceptibilité génétique) tendent-ils plutôt à vivre dans des villes plus peuplées et/ou plus ? Vu la fréquence des addictions à des drogues (comme le cannabis) dans ces populations à risque, il est aussi difficile de départager les psychoses induites par une toxicomanie ou seulement révélées par elle.
Des indicateurs pour évaluer les demandes de soins prévisibles
Les auteurs de l’étude britannique en question estiment que, malgré la tentation compréhensible d’attribuer cette prévalence des psychoses au cannabis, la plupart des sujets concernés (dans cette population) « ne présentent pas une psychose induite par une drogue », bien que les intéressés eux-mêmes ou leurs familles apprécient les choses différemment, en disant au psychiatre « I thought it was the weed » (Je croyais que c’était à cause de l’herbe). Cette étude incite aussi à réfléchir sur la planification de l’offre de soins en psychiatrie, car le critère essentiel des décideurs (implanter les services thérapeutiques en fonction de la densité des villes) semble à l’évidence insuffisant, puisqu’à densité égale, une cité désavantagée ou a fortiori sinistrée aura des besoins accrus en matière de soins psychiatriques.
Les politiques sanitaires doivent donc tenir compte également des indicateurs sur l’adversité de l’environnement (comme le pourcentage de chômeurs) pour évaluer les demandes de soins prévisibles.
Dr Alain Cohen
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