Voilà
un livre revigorant et salutaire, écrit avec fougue, porté par l’élan
républicain qui a suivi le drame des attentats parisiens de janvier. Car
Laurent Joffrin, le directeur de la rédaction de Libération, n’y va pas par
quatre chemins pour dénoncer tous les défaitistes, déclinistes et autres
prophètes de la décadence française, si prisés ces temps-ci : « Il arrive un
moment où le dénigrement de son propre pays passe les bornes, où la mauvaise
foi des réquisitoires crée l’écœurement. »
Ainsi,
contre les tenants d’une identité française malheureuse ou menacée. Balivernes
!, répond Joffrin : sous quelque angle qu’on la considère – sa culture vivace,
son mode de vie original, sa passion de l’histoire intacte –, « l’identité
française se porte fort bien ». Quant à l’obsession de l’islam, qui « hante le
paysage mental de la France », elle a certes des racines objectives dont le
fanatisme et le terrorisme ne sont pas les moindres ; mais comment ne pas
comprendre que cet intégrisme exprime un combat perdu d’avance contre « la
force de la culture démocratique » ?
Réaliste
et pédagogue
Les
« identitaires » sont ainsi la première cible de Joffrin. Leur mélancolie,
martèle-t-il, n’est que le dernier avatar en date d’une « idéologie
réactionnaire » vieille de deux siècles, née avec la mort de l’Ancien Régime,
le triomphe des Lumières et la construction républicaine. Mais les identitaires
ne sont pas seuls : les libéraux contribuent largement, de leur côté, au «
masochisme national », tant ils noircissent le tableau pour mieux vendre leur «
projet inégalitaire » et les sacrifices qu’il implique pour les plus faibles.
Là
encore, Joffrin se veut réaliste et pédagogue. Les maux de l’économie française
sont connus, à commencer par un marché du travail mal organisé et un chômage
ravageur. Constats à l’appui, il rappelle cependant que la France « reste une
grande puissance économique, qu’elle traverse une crise mais qu’elle a tous les
moyens de la surmonter ». A condition de ne pas se laisser berner par le « troisième
courant du déclinisme français : celui de la gauche sinistre », en clair de la
gauche de la gauche qui, elle aussi, noircit la situation pour justifier son «
dangereux programme ».
La
responsabilité de tous ces Cassandre du déclin français est lourde, fustige
Joffrin. Soit ils nourrissent le découragement national et « finissent par
faire advenir ce qu’ils dénoncent ». Soit « ils favorisent l’attente chimérique
et stérile d’une introuvable rupture, nationaliste avec le FN, ultralibérale
avec le Medef, radicale avec la gauche de la gauche ». Dans tous les cas, ils
conduisent à l’impasse, alors que la République française est l’une des mieux
armées pour relever les défis de l’avenir.
Le
Réveil français, de Laurent Joffrin, Stock, 156 pages,
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