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dimanche 1 mars 2015

La réserve citoyenne, nouvelle forme d’engagement


LE MONDE | 18.02.2015 | Par Aurélie Collas

La ministre de l'éducation nationale, Najat Vallaud-Belkacem, et Robin Renucci (à droite), à Ajaccio, le 17 février.

Il est le premier réserviste connu et déclaré. L’acteur et réalisateur Robin Renucci s’est porté candidat à la réserve citoyenne de l’éducation nationale – l’une des onze mesures annoncées par le chef de l’Etat après les attentats de janvier dans le cadre de la « grande mobilisation de l’école pour les valeurs de la République ».

En visite au lycée Laetitia-Bonaparte d’Ajaccio, mardi 17 février, avec la ministre de l’éducation nationale, Najat Vallaud-Belkacem, M. Renucci a fait figure d’ambassadeur de ce nouveau dispositif. Le premier des quelque 1 500 candidats réservistes déjà enregistrés par le ministère, après son appel lancé le 9 février.

Pour l’éducation nationale, c’est une forme d’engagement nouvelle qui se dessine, permettant à toute bonne volonté – bénévole associatif, professionnel, retraité, étudiant –, d’apporter son concours à l’école, sur son champ d’expertise : citoyenneté, médias, histoire, arts, droit, santé… Dans chaque académie, des listes de réservistes seront constituées à compter du printemps, auxquels les enseignants feront appel pour illustrer leur cours.

Sur le fond toutefois, rien de bien nouveau. Robin Renucci le reconnaît d’ailleurs : pour celui qui est directeur des Tréteaux de France, un centre dramatique national itinérant,et président de l’association d’éducation artistique et culturelle L’Aria, il s’agit d’un prolongement de son engagement. Participer à cette réserve lui permet, dit-il, de « contribuer à une action qui va dans le sens de ce que l’on cherche à faire : instaurer un lien plus étroit entre l’école et le monde extérieur ».

De fait, les portes de l’école ne sont pas fermées. Chaque jour, les enseignants font appel à des intervenants, par le biais ou non d’associations. L’éducation nationale en compte plus de 150, agréées ou subventionnées, auxquelles s’ajoutent des partenaires locaux. A elles seules, les associations de la Ligue de l’enseignement mobilisent « plusieurs dizaines de milliers de bénévoles qui interviennent chaque jour à l’école », rapporte Eric Favey, administrateur national.

« Une idée jeune »

Dans l’entourage de la ministre, on met toutefois en avant deux vertus nouvelles. La première est de faciliter le travail des enseignants. Aujourd’hui, il leur revient la tâche de chercher des intervenants. La réserve citoyenne leur donne accès à « une liste de personnes immédiatement mobilisables ». La seconde est de lever des barrières pour les volontaires. Rue de Grenelle, on se dit « convaincu qu’il y a des milliers de bonnes volontés qui ne sont pas mobilisées, parce qu’elles se heurtent au fait que, pour intervenir, il faut souvent passer par des structures, des procédures qui peuvent paraître lourdes ».

Un avocat, un pompier, un journaliste… pourront intervenir à l’école quelques heures ici ou là, en fonction de leurs disponibilités, sans s’engager sur le long terme dans une association. Au fond, « cette réserve reflète l’évolution des formes d’engagement citoyen », observe Eric Favey. Un engagement qu’il perçoit « plus individuel, plus ponctuel », qui « ne passe pas forcément par des réseaux constitués ou une adhésion globale à un mouvement collectif ».

« C’est une idée jeune, qui ne serait sans doute pas venue d’un politicien de 60 ou 70 ans, renchérit l’historien de l’éducation Claude Lelièvre. La ministre de l’éducation nationale est dans sa génération : elle croit en une mobilisation moins professionnalisée, plus sporadique et amateure, mais qui peut toutefois être forte et éclairée. »

« Il ne faudrait pas qu’il y ait des dérapages »

Reste la crainte que cette forme d’engagement échappe au contrôle. « Parmi les postulants, il y aura sans doute le meilleur et le pire, souligne Christian Chevalier, du syndicat des enseignants de l’UNSA. Il ne faudrait pas qu’il y ait des dérapages. »

Parmi les « filtres » mis en avant par le ministère, l’installation, dans chaque rectorat, d’une petite équipe de personnes chargée d’entrer en contact avec les volontaires, après avoir reçu CV et lettre de motivation. En outre, « aucun réserviste ne sera laissé seul en classe, il sera toujours sous l’œil de l’enseignant ».

La communauté éducative n’en reste pas moins perplexe. « J’y vois une façon assez superficielle de répondre à la situation, s’agace Frédérique Rolet, du SNES-FSU. Au lieu de réfléchir à la manière dont on transmet les valeurs, on se demande qui doit intervenir, comme si des intervenants extérieurs seront plus efficaces que les enseignants. » « Ces interventions seront-elles utilisées à bon escient ? Auront-elles les effets souhaités ?, s’interroge Frédéric Sève, du SGEN-CFDT. Ce n’est rien d’annoncer une telle mesure. Il faut voir quelle sera la mise en pratique. »


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