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mardi 3 mars 2015

Kétamine : un coup dans le nez, c’est bon pour le moral !

26/02/2015




Environ un patient déprimé sur trois souffre d’une dépression résistant aux traitements médicamenteux disponibles actuellement. La plupart de ces traitements agissent sur le système mono-aminergique. Une nouvelle voie thérapeutique émerge : le récepteur au glutamate N-méthyl-D-aspartate (NMDA). La kétamine intraveineuse, un antagoniste du récepteur NMDA, a déjà démontré une efficacité rapide dans la dépression résistante. Cependant, son administration intraveineuse limite son accessibilité.
Kyle Lapidus et coll. ont présenté dans Biological Psychiatry une étude pilote évaluant l’effet antidépresseur de la kétamine en administration intranasale chez 20 patients souffrant d’une dépression résistante à au moins un traitement antidépresseur. Tous les patients recevaient soient 50 mg de  kétamine soit du sérum physiologique en administration intra-nasale (en 5 pulvérisations). Ils recevaient l’autre traitement une semaine plus tard après une période de « crossover ». L’évaluation de l’efficacité du traitement sur les symptômes dépressifs se faisait à l’aide de la Montgomery-Asberg Depression Rating Scale (MADRS) évaluée à 24 h. Dix-huit patients sur les 20 inclus ont reçu les deux traitements.

Les patients ayant eu la kétamine avaient en moyenne une MADRS inférieure de 7,6 points par rapport à ceux ayant reçu le placebo (intervalle de confiance à 95 % [IC95] 3,9-11,3). Le taux de réponse au traitement à 24 h (diminution de 50 % de la MADRS) était de 44 % (8 sur 18) après une administration de kétamine, contre 6 % après le sérum physiologique. On ne retrouvait pas d’effet résiduel à une semaine. Les effets psychomimétiques étaient très modérés, et n’étaient pas corrélés aux effets antidépresseurs. Aucun effet indésirable grave n’est rapporté.
Les concentrations sanguines de kétamine dans cette étude sont inférieures à celles mesurées après administration intraveineuse, pouvant expliquer selon les auteurs le taux de réponse inférieur à ce qui est retrouvé après une administration intraveineuse. Ce qui peut également expliquer la rareté des effets dissociatifs.
Il s’agit bien entendu d’une étude pilote, menée sur un petit nombre de patients, et qui nécessite d’être répliquée. Cependant, ce nouveau mode d’administration a l’avantage de rendre plus accessible ce traitement émergent qu’est la kétamine. Si son efficacité est démontrée de façon de plus en plus robuste au fil des études qui paraissent régulièrement, son utilisation (hors AMM) en pratique clinique reste rarissime et réservée à quelques services. Espérons que la facilité d’utilisation de l’administration intranasale contribuera à faire entrer à terme la kétamine dans la pharmacopée quotidienne du psychiatre.
Dr Alexandre Haroche
RÉFÉRENCES
Lapidus et coll. : A randomized controlled trial of intranasal ketamine in major depressive disorder. Biol Psychiatry. 2014;76: 970-6


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