Lanceurs d’alerte : l’Académie de médecine met en garde contre la proposition de loi sénatoriale
Tandis que les sénateurs doivent poursuivre mercredi l’examen de la proposition de loi visant à créer une haute autorité de l’expertise et de l’alerte en matière de santé et d’environnement, l’Académie nationale de médecine formule de sérieuses réserves sur cette initiative parlementaire.« Créer une haute autorité de l’expertise scientifique et de l’alerte en matière de santé et d’environnement reviendrait à nier la valeur de l’expertise scientifique et la légitimité des agences et des académies à l’assurer », argumente l’Académie de médecine. Réclamée par le groupe écologiste du Sénat, cette nouvelle instance compliquerait davantage « un dispositif d’expertise officielle qui gagnerait au contraire à être simplifié et clarifié », poursuit l’Académie. Dans leur exposé des motifs, les sénateurs écologistes précisent que cette haute autorité de l’expertise ne vise pas à remplacer les mécanismes existant mais uniquement à les« compléter » par des procédures permettant à de nouveaux types d’alertes de voir le jour et d’être instruites. Cette haute autorité « pourra constituer une instance d’appel en cas d’expertises contradictoires » et être ainsi « garante de l’instruction des situations d’alerte ».
L’expertise assujettie à l’opinion ?
Pour favoriser l’instruction d’un maximum d’alertes « informelles », les sénateurs proposent de renforcer le statut du lanceur d’alerte en encadrant l’application des articles 2 et 3 de la Charte de l’environnement adossée à la Constitution française (qui stipulent que« toute personne a le devoir de prendre part à la préservation et à l’amélioration de l’environnement » ; « toute personne doit (…) prévenir les atteintes qu’elle est susceptible de porter à l’environnement ou, à défaut, en limiter les conséquences »).
« Tout en adhérant à la demande de nos concitoyens en faveur de davantage de débat public et de transparence dans la décision en santé publique élargie aux questions environnementales », l’Académie estime que « légitimer l’alerte au détriment de l’expertise risquerait de faire passer la prise de décision politique avant l’évaluation scientifique ». L’Académie met donc en garde « contre une légalisation d’un statut de lanceur d’alerte non seulement injustifiée mais dangereuse », laquelle« risquerait de la même façon que l’inscription dans la Constitution du principe de précaution, d’assujettir notre avenir scientifique et technologique à la pression d’une opinion souvent mal informée »
› DAVID BILHAUT
lequotidiendumedecin.fr 19/11/2012
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