par Marlène Thomas et Elsa Maudet publié le 4 mars 2021
Culpabilisation, manque d’empathie… Alors que «Libération» révèle les résultats de l’audit sur l’accueil des femmes victimes de violences dans les gendarmeries et commissariats, plusieurs concernées et leurs proches témoignent des difficultés rencontrées pour se faire entendre.
Dans la véranda de Lucien et Violette Douib, les aiguilles de l’horloge ne bougent plus. A tout moment du jour et de la nuit, il est 11h51. C’est à cette heure-là, le 3 mars 2019, que leur fille Julie a été tuée par balles à l’Ile-Rousse, en Haute-Corse. Pour ce meurtre, son ex-compagnon doit être jugé en juin. La trentenaire avait multiplié les allers-retours à la gendarmerie pour dénoncer la violence du père de ses deux garçons. En vain. Lors de son dernier déplacement, elle avait lâché : «Il faut qu’il me tue pour que vous me croyiez ?» Elle sera tuée par balles deux jours plus tard. Voilà donc deux ans que les époux Douib se battent pour que la lumière soit faite sur les dysfonctionnements qui ont mené à la mort de Julie. «Quand elle allait porter plainte, les gendarmes prenaient ça un peu à la rigolade. Ils n’ont pas été à l’écoute de tout ce qui s’est passé. J’ai besoin qu’on me dise pourquoi elle n’a pas été écoutée», réclame Lucien Douib. Sa mobilisation a été pour beaucoup dans l’organisation du Grenelle des violences conjugales, à l’automne 2019. Engagement avait alors été pris par le gouvernement de réaliser un audit de l’accueil des femmes dans les gendarmeries et les commissariats. Selon les résultats de sa deuxième édition, révélés ce vendredi par Libération, 90 % des victimes se disent satisfaites de la façon dont elles ont été reçues. Un résultat invraisemblable au vu des remontées de terrain ces dernières années.