Dans deux tribunes, le sociologue donnait un sens à cette « nouvelle classe d’âge », attirée par « un message d’extase sans religion, sans idéologie », véhiculé notamment par un « très viril » Johnny.
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A l’occasion de l’hommage à Johnny Hallyday, nous republions ces deux articles d’Edgar Morin publiés dans Le Monde en juillet 1963, dans lequel le sociologue analyse le phénomène « Salut les copains », incarné par Johnny. Après la parution de ces textes, il avait eu l’occasion de rencontrer le chanteur, qui l’avait alors renommé « le meilleur ami des jeunes »
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I. UNE NOUVELLE CLASSE D’ÂGE
La vague de rock’n’roll qui, avec les disques d’Elvis Presley, arriva en France ne suscita pas immédiatement un rock français. Il n’y eut qu’une tentative parodique, effectuée par Henri Salvador, du type Va t’faire cuire un œuf, man ! La vague sembla totalement refluer ; mais en profondeur elle avait pénétré dans les faubourgs et les banlieues, régnant dans les juke-boxes des cafés fréquentés par les jeunes. Des petits ensembles sauvages de guitares électriques se formèrent. Ils émergèrent à la surface du Golf Drouot, où la compétition sélectionna quelques formations. Celles-ci, comme Les Chats sauvages, Les Chaussettes noires, furent happées par les maisons de disques. Johnny Hallyday monta au zénith. Il fut nommé « l’idole des jeunes ».
Car ce public rock, comme aux Etats-Unis quelques années plus tôt, était constitué par les garçons et filles de 12 à 20 ans. L’industrie du disque, des appareils radio comprit aux premiers succès que s’ouvrait à la consommation en France un public de sept millions de jeunes ; les jeunes effectivement, poussés par le rock à la citoyenneté économique, s’équipèrent en tourne-disques, en radios transistors, se fournirent régulièrement et massivement en 45-tours.