par Philippe Lohéac, délégué général de l’association pour le Droit de mourir dans la dignité publié le 16 décembre 2022
Depuis la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé, il est reconnu au patient le droit de prendre les décisions concernant sa santé. Il a également le droit – s’il le souhaite – d’être informé de son état de santé. Le patient – considéré jusqu’alors comme une sorte d’objet – devient l’acteur de son propre parcours de soins.
Certes, il n’est pas toujours simple, compte tenu de la technicité du domaine de la santé, du vocabulaire spécifique de la matière, de comprendre parfaitement sa propre situation sanitaire et donc de prendre les décisions en conséquence. Le corps médical fait alors preuve de pédagogie à l’égard du patient, réintégré dans sa qualité de citoyen qui dispose de ses droits, et notamment de sa liberté de décider pour lui-même et d’aller et venir (donc, de quitter un établissement de santé quand il le souhaite, sous réserve d’être informé des conséquences de sa décision).
Il est pourtant un domaine dans lequel les droits fondamentaux du citoyen sont encore bafoués : c’est lorsqu’il arrive en fin de vie.
Citoyen à part entière
Certes, il a le droit de se suicider. Un droit reconnu depuis 1804 ; mais exercé uniquement de manière violente puisque l’accès à certains médicaments est fortement limité. La pendaison, les armes à feu et les armes blanches, la défenestration sont acceptés par notre société, mais pas les médicaments !
Dès lors que son pronostic vital est engagé, parce qu’il est atteint d’une affection grave et incurable, en phase avancée ou terminale, et qu’il demande légitiment à être soulagé de ses souffrances et à bénéficier d’une aide active à mourir pour ne pas rentrer dans la phase agonique, sa parole est dévalorisée et les soignants restent sourds à ses appels de détresse.
Certains prétendent que, âgé ou malade, il ne saurait plus ce qu’il dit. Que sa vulnérabilité le rendrait inconséquent, incohérent. D’autres affirment que sa vie ne lui appartient pas tout à fait et qu’il n’a pas le droit d’en disposer comme il le souhaite.
Depuis 1980, l’association pour le Droit de mourir dans la dignité (ADMD) milite pour que le patient soit reconnu comme un citoyen à part entière. La proposition de loi votée par ses adhérents lors de sa 38e assemblée générale réaffirme la nécessité de légaliser l’euthanasie et le suicide assisté et de permettre un accès universel aux soins palliatifs. Parce que la vie lui appartient, à lui et à lui seul, parce qu’il a le droit de considérer que sa survie n’est pas sa vie, parce que toutes les souffrances ne sont pas apaisables, parce que l’agonie ne peut pas être imposée à celui qui ne veut pas la subir, le citoyen en fin de vie doit être écouté, sa parole doit être entendue, sa volonté doit être respectée. Et nul, pas même les médecins dont l’ADMD reconnaît le dévouement, et surtout pas les religieux, ne peut imposer sa propre vision de la fin de vie et, revenant sur la loi de 2002, bafouer son droit à décider de ses traitements ou de l’absence de traitements.
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