Dans son livre, « On ne peut éternellement se contenter de regarder les cadavres passer sous les ponts », l’ancien procureur considère que nous sommes tous « complices » de la montée du populisme.
Il faut être un écorché vif pour écrire ce petit opuscule. La colère d’Eric de Montgolfier, ancien procureur de la République, est à la mesure de sa culpabilité. Il souhaite faire devenir nôtres ces deux sentiments.
Rien ne trouve grâce à ses yeux, ou si peu ! D’une traite, sans chapitre, mais avec une ponctuation faite de points, contrairement aux arrêts de la Cour de cassation, il aborde tout, de la corruption consubstantielle selon lui au cumul des mandats, à la séparation des Eglises et de l’Etat en passant par l’article 49.3, le présidentialisme de nos institutions et la laïcité.
Face au risque de voir les mouvements populistes récolter les fruits d’une telle situation, la seule question que l’auteur adresse à ses lecteurs est : qu’avez-vous fait ? Car selon lui, si le « tous pourris » est faux (ouf !), en revanche il affirme un plus dérangeant « tous contaminés ». Et surtout, tous plus ou moins complices. Les politiques, bien sûr, puisque le pouvoir corrompt, mais les journalistes également, par leur veulerie et leur flagornerie, et les citoyens par leur passivité et leur manque d’engagement.
« En contraignant notre instinct à plier devant les principes qu’exprime la devise de la République, en nous soumettant aux lois nées de l’intérêt général quand bien même il nuirait au nôtre, peut-être alors nous sera-t-il permis de nous lamenter sur notre sort, sans nous en sentir responsables, ni en être coupables », écrit ce retraité de la magistrature – depuis 2013. Le combat contre la corruption de celui qui s’était illustré dans l’affaire du match truqué VA-OM à l’ère Bernard Tapie puis dans une guerre avec la franc-maçonnerie niçoise ne faiblit pas.
« Epuisante générosité »
Selon Eric de Montgolfier, la pratique du cumul des mandats entre mairie et département ou région est une insulte à « la règle qui interdit à celui qui organise la défense d’en profiter ». Et de citer l’exemple de M. Estrosi (encore Nice) pour mieux dénoncer « le peu de cas que font des lois ceux qui les votent ».
Quant aux ministres, trop souvent occupés à soigner leur circonscription d’origine, ils participent à cette « épuisante générosité dont la collectivité fait les frais ». L’exemple de la Corrèze, choyée par François Hollande après Jacques Chirac, amène celui qui a rejoint mi-février l’équipe de campagne de Benoît Hamon à suggérer le mandat unique pour le président de la République.
Bref, les élus ne respectent pas leurs électeurs qui préfèrent courir derrière la première rumeur non vérifiée et n’hésitent pas à réélire des personnes dont la justice a démontré qu’ils les ont trompés. Quant aux médias qui érigent en critère de capacité à exercer le pouvoir le fait de connaître le prix du pain au chocolat, ils ne remplissent pas leur rôle. « Le quatrième pouvoir a perdu celui de contribuer à l’équilibre démocratique. » Peut-être qu’une telle avoinée était nécessaire pour secouer quelques consciences endormies. La citoyenneté « n’autorise qu’à vivre debout ».
On ne peut éternellement se contenter de regarder les cadavres passer sous les ponts, Eric de Montgolfier, Cherche Midi, 64 pages,
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