LE FAIT
Après le Conseil de l'Europe, le comité des droits de l'enfant de l'Onu a récemment épinglé la France lui demandant notamment de mettre fin légalement à la pratique du packing. Le sujet est sensible. Un reportage évoquant l'hôpital San-Salvadour à Hyères (Var) a fait polémique. L'établissement en question aurait cessé cette pratique depuis 2014.
L'ANALYSE
Le témoignage de la maman d'un enfant autiste, diffusé dans le cadre du magazine télévisé "Sept à huit" sur TF1 fin septembre a relancé certains questionnements autour des pratiques d'enveloppements corporels humides (dits packing). Il y est notamment question de l'hôpital San-Salvadour de Hyères (Provence-Alpes-Côte d'Azur) qui relève de l'Assistance publique-hôpitaux de Paris (AP-HP). Fin décembre, l'association Vaincre l'autisme montait au créneau et alertait les autorités et la direction de l'établissement. "Ce reportage, repris par de nombreux autres médias, laisse croire au grand public, aux familles aux professionnels et aux pouvoirs publics que l'hôpital psychiatrique et le packing sont le traitement efficace dans l'accompagnement et le traitement des comportements à problème des enfants autistes", déplore le président de l'association, M'Hammed Sajidi, interrogé par Hospimedia mais aussi dans un courrier adressé le 30 décembre à Martin Hirsch, directeur général de l'AP-HP. Depuis 2009, son association demande un moratoire des pratiques de packing dans la prise en charge des troubles du spectre de l'autisme (TSA).
Pas de packing sans protocole à l'AP-HP
Dans sa réponse datée de ce 25 janvier, le patron du CHU francilien est catégorique. Il écrit que l'établissement épinglé n'a plus recours au packing depuis 2014. Et d'expliquer qu'effectivement l'hôpital San-Salvadour a par le passé pratiqué le packing mais "dans un cadre particulièrement limitatif, sur prescription médicale et après une discussion collégiale de l'équipe en charge des patients". Et d'ajouter que ces soins ont essentiellement concerné des adultes. Seules trois indications pédiatriques ont été, selon lui, relevées entre 1995 et 2014. Quant au déploiement du packing, l'assistance "veille à ce qu'il n'y soit éventuellement fait recours dans d'autres sites de l'AP-HP que dans le strict cadre des recommandations de bonnes pratiques notamment portées par la HAS".
Opposition de la HAS et de l'Anesm
Il faut dire que la situation actuelle peut paraître plutôt confuse. En 2012, dans leur recommandation de bonnes pratiques, la Haute Autorité de santé (HAS) et l'Agence nationale de l'évaluation et de la qualité des établissements et services sociaux et médico-sociaux (Anesm) se sont déclarées "formellement opposées à l'utilisation de cette pratique, en dehors des protocoles de recherche autorisés respectant la totalité des conditions définies par le Haut Conseil de la santé publique". Elles ont aussi motivé leur choix : "En l'absence de données relatives à son efficacité ou à sa sécurité, du fait des questions éthiques soulevées par cette pratique et de l'indécision des experts en raison d'une extrême divergence de leurs avis, il n'est pas possible de conclure à la pertinence d'éventuelles indications des enveloppements corporels humides (dits packing), même restreintes à un recours ultime et exceptionnel." De là à interdire la pratique, il y a un pas que personne n'a pour l'instant franchi. Les associations comme Vaincre l'autisme ou Autisme France ont dénoncé à plusieurs reprises cette situation mais aussi les manquements de l'État français en matière de prise en charge des enfants autistes.
Une condamnation internationale
La communauté internationale elle-même semble se ranger du côté des associations. Mi-janvier, la France a en effet été auditionnée par le comité des droits de l'enfant de l'Organisation des Nations unies (Onu). Suite à ce rendez-vous, le ministère des Affaires sociales, de la Santé et des Droits des femmes reconnaît que le comité a soulevé des axes d'amélioration nécessaires notamment dans le domaine de l'autisme. De son côté, Autisme France précise, par communiqué également, que l'Onu prie instamment "la France de lutter contre les maltraitances institutionnelles, de mettre en place des inspections régulières et indépendantes, de créer les outils nécessaires pour dénoncer les maltraitances, et d'interdire légalement le packing, pratique barbare et maltraitante qui fait honte à la France". L'association rappelle au passage que ce n'est pas la première fois que le Gouvernement français est rappelé à l'ordre, et d'indiquer que le Conseil de l'Europe l'a même condamné cinq fois pour discrimination à l'égard des enfants autistes. Il faut toutefois noter, cette fois, que le Gouvernement s'est engagé à suivre les recommandations de l'Onu vianotamment le Haut Conseil de la famille, de l'enfance et de l’âge (HCFEA). Cette future instance a été créée par la loi relative à l'adaptation de la société au vieillissement, promulguée le 28 décembre. La formation enfance du HCFEA devrait donc être chargée du suivi des observations du comité. Mais il faudra encore attendre sa mise en place.
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