Tout amateur d'utopie ou passionné d'inutile a entendu parler du Palais Idéal du facteur Cheval dans la Drôme, voire de la Maison Picassiette de Raymond Isidore à Chartres (Eure-et-Loir), deux chefs-d'œuvre de l'architecture naïve. A Steenwerk (Nord), bien que moins fameuse, la Maison aux avions, menacée de péril, a toutefois suscité un formidable élan de soutien.
Des milliers d'anonymes en appellent aujourd'hui à la sauvegarde des lieux qui se dégradent inexorablement depuis que leur propriétaire, Arthur Vanabelle, un agriculteur de 92 ans, les a quittés en 2012 pour se rendre en maison de retraite. « Les mauvaises herbes grignotent murs en briques et personnages, et des modules se sont affaissés dans le fossé herbeux », relatait La Voix du Nord dans son édition du 14 janvier.
A partir de la fin des années 1950, Arthur Vanabelle a récupéré et collecté toutes sortes d'objets (enjoliveurs, matériels agricoles réformés, ressorts, abat-jours, téléviseurs, vieux pneus, tôle de cuisinières, jerrican, etc.) pour confectionner des sculptures dont l'univers esthétique évoque celui des objets et engins multicolores qui ornent les manèges dans les foires aux plaisirs : des canons, des chars d'assaut, des fusées, et surtout des avions de toutes tailles.
« ARTISTE PEINTRE OUTSIDER »
Sur le pourtour ou sur le toit de sa maison en brique, il a déployé cette spectaculaire mise en scène défensive pour, semble-t-il, à la fois se signaler depuis l'autoroute de Dunkerque toute proche et assurer la tranquillité de son univers qu'il partage avec son frère César, lui aussi célibataire.
Dans une région meurtrie par les guerres, entourée de cimetières militaires de toutes nationalités, cette geste artistique – Arthur Vanabelle parle de bricolage – portée par une personnalité bien éloignée des milieux de l'art a suscité l'empathie de la part de nombreux inconnus, et un certain intérêt auprès d'institutions culturelles. Grisha Rosov, autoproclamé « artiste peintre outsider », a lancé une pétition (Patrimoine régional : Sauvons la « Maison aux avions » de Steenwerck).
Le 22 janvier, près de 14 000 signataires avaient déjà répondu à l'appel. « Face aux nombreuses demandes », une association loi 1901 a été créée afin de « donner une existence juridique et des moyens d'agir aux milliers de soutiens pour le maintien sur place, l'entretien et la mise en valeur de la Maison aux avions ».
RÉUNION FIN JANVIER
Devant la caméra de France 3, le maire de Steenwerck, Joël Devos, évoque l'attrait provoqué par ces œuvres sur les Chinois, les Japonais ou les Russes. Il considère que « ce serait une erreur de ne pas faire ce qu'il faut pour préserver l'essentiel de cette exposition. » Son idée : permettre que le Musée de la vie ruraleimplanté dans sa commune puisse accueillir certaines des créations issues de la Maison aux avions.
Au Musée d'art contemporain de Villeneuve-d’Ascq (LaM), qui possède une maquette et des photos des lieux depuis 2010, la Maison aux avions fait l'objet d'une surveillance depuis 1997. Une réunion doit se tenir fin janvier à la Direction régionale des affaires culturelles (DRAC) Nord Pas-de-Calais. Le LaM y participera ainsi que, entre autres, la mairie de Steenwerck, le Musée de la vie rurale et le service de l'inventaire du conseil régional Nord Pas-de-Calais pour sceller le sort de la demeure singulière d'Arthur Vanabelle.
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