Le tribunal administratif de Pontoise a ordonné lundi 7 octobre à l'Etat de"prendre toutes dispositions" pour qu'une place en hébergement spécialisé soit trouvée pour Amélie, une jeune femme de 19 ans lourdement handicapée qui avait attaqué l'administration. L'agence régionale de santé (ARS) d'Ile-de-France doit "prendre toutes dispositions pour qu'une offre de soins permettant la prise en charge effective, dans un délai de quinze jours, de la jeune femme, par un établissement médico-social adapté à son état, soit présentée à ses parents", a jugé le tribunal, sous peine d'une astreinte de 200 euros par jour de retard.
"Eu égard à l'absence de prise en charge médico-sociale" de la jeune femme "et à l'épuisement psychique de la famille, il y a une atteinte au droit à la vie", a avancé son avocat, Me Karim Felissi. Dans la famille d'Amélie, la fin de la prise en charge par des établissements spécialisés, auxquels elle a eu accès jusqu'à sa majorité, a marqué un bouleversement. En octobre 2012, elle a dû quitter l'institut médico-éducatif qu'elle fréquentait et qui, selon sa mère, "n'était plus adapté".
"NOUS DEVONS TROUVER UNE SOLUTION TEMPORAIRE"
"Amélie est complètement isolée, elle n'a plus de relations sociales" depuis qu'elle reste à la maison, s'est désolée sa mère lors de ce procès. "Le fait qu'elle soit [à la maison] sans activité, ça développe tous ses troubles", a-t-elle expliqué. Le syndrome de Prader-Willi, une anomalie génétique rare dont elle est atteinte, a entraîné un retard mental et l'a rendue obèse. Elle souffre aussi de troubles autistiques et de troubles envahissants du développement, et doit être surveillée 24 heures sur 24, une tâche éprouvante et épuisante pour ses proches.
Le conseil général du Val-d'Oise et l'ARS d'Ile-de-France se sont défendus en affirmant qu'une solution d'hébergement a été trouvée, mais dans un établissement à Baumont-sur-Oise encore en travaux, qui ne peut l'accueillir dans l'immédiat. "Nous devons trouver une solution temporaire", a concédé Marion Leroux, directrice générale adjointe en charge de la solidarité au conseil général, ajoutant toutefois que le département avait déjà "fait énormément de recherches" pour la jeune femme. "Ses comportements assez destructeurs font qu'il est très difficile de trouver un établissement adapté", d'autant que "la famille refuse de s'en séparer totalement, refusant une place dans un établissement belge à cause de l'éloignement", a-t-elle souligné.
DES STRUCTURES SATURÉES
Au-delà de ce cas, une fédération d'associations spécialisées dans la défense des personnes handicapées mentales, l'Unapei, espère que ce précédent permettra aux handicapés d'obtenir non seulement des dommages et intérêts, comme c'est le cas actuellement, mais une obligation pour l'Etat, sous astreinte par exemple, de leur trouver une place. "Nous voulons montrer que c'est un déni de citoyenneté", a déclaré la présidente de l'Unapei, Christel Prado, regrettant que les lois prévoyant l'accueil des personnes handicapées "dans des établissements adaptés à leurs besoins ne soient pas appliquées". Plus d'une "dizaine de milliers"d'enfants et d'adultes handicapés cherchent en vain un hébergement spécialisé en France, selon cette fédération.
En région parisienne, les capacités d'accueil d'adultes et d'enfants handicapés dans des établissements spécialisés ont augmenté ces dernières années mais les institutions restent saturées. La région Ile-de-France dispose de 3 515 places pour adultes handicapés en maison d'accueil spécialisée, et 3 050 places en foyer d'accueil, pour des adultes plus légèrement handicapés, selon l'ARS.
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