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samedi 2 mars 2013

Deux rats séparés par un continent mais reliés par le cerveau

Le Monde.fr avec AFP | 
Le premier rat, hébergé au Brésil, a pu envoyer des signaux cérébraux pour guider son congénère, situé dans un laboratoire américain.
Le premier rat, hébergé au Brésil, a pu envoyer des signaux cérébraux pour guider son congénère, situé dans un laboratoire américain. | Nature Scientific Reports
Deux rats séparés par un continent mais reliés directement par des électrodes implantées dans leur cerveau ont pu communiquer et collaborer pour accomplir une tâche simple, ont annoncé jeudi 28 février des chercheurs dans une étude présentant ce premier "supercortex".
A l'aide de ce seul lien électronique, le premier rat, hébergé dans un institut de recherches au Brésil, a pu envoyer des signaux cérébraux pour guider son congénère, situé dans un laboratoire américain, et l'aider ainsi à obtenir une récompense.
ORDINATEUR "BIOLOGIQUE"
Pour le neurobiologiste brésilien Miguel Nicolelis, à l'origine de cet exploit, il serait donc possible en théorie d'associer ainsi plusieurs cerveaux d'animaux pour créer un ordinateur "biologique" d'un nouveau genre. Et cette trouvaille pourrait aussi bénéficier aux patients atteints de paralysie ou de syndrome d'enfermement ("locked-in syndrome"), assure le chercheur. "Nous avons établi une liaison fonctionnelle entre deux cerveaux. Nous avons créé un supercerveau comprenant deux cerveaux", a-t-il résumé.
L'équipe du docteur Nicolelis a d'abord entraîné les rats à résoudre un problème simple : presser un levier lorsqu'une petite lampe s'allumait au-dessus pour obtenir un peu d'eau. Ils leur ont ensuite implanté des électrodes ultra-fines dans la région du cortex contrôlant l'information liée au mouvement et ont ainsi connecté le cerveau des deux rats.
Le premier rat réalisait l'expérience normalement. Et lorsqu'il pressait le bon levier, son activité cérébrale était encodée en impulsions électriques, transmises en temps réel au cerveau de son binôme.
70 % DE RÉUSSITE AUX TESTS
Le rat "décodeur", lui, ne disposait d'aucun indice visuel pour savoir sur quel levier appuyer pour obtenir sa récompense et devait se reposer entièrement sur les signaux émis par son partenaire pour guider son choix. Les rats ainsi guidés par cette liaison cérébrale ont obtenu jusqu'à 70 % de réussite aux tests, précise l'étude, publiée dans la revue britannique Nature Scientific Reports.
"Le couple d'animaux a collaboré pour accomplir la tâche. Mais ce que le deuxième rat a reçu, ce ne sont pas des pensées ou des images", explique Miguel Nicolelis. Il reçoit des signaux, qu'il incorpore dans ses schémas visuels et tactiles. "Le deuxième rat apprend à reconnaître ces signaux qui décrivent une décision prise par le premier rat. Il crée une association entre cette structure et cette décision", poursuit le chercheur.
RÉSEAU CÉRÉBRAL
Mieux encore, ce processus fonctionne dans les deux sens car, en cas d'erreur du deuxième rat, le premier modifiait les signaux qu'il émettait pour les rendre plus forts et plus nets. Et après de tels ajustements, le décodeur prenait la bonne décision plus souvent, souligne l'étude.
Cela veut dire "qu'on pourrait créer un réseau cérébral formé par plusieurs cerveaux, interagissant tous ensemble", conclut Miguel Nicolelis, en précisant bien qu'une telle expérience ne porterait que sur des rats ou des singes, et non des êtres humains.
"Si vous connectez plusieurs cerveaux d'animaux, vous pourrez probablement créer un ordinateur biologique qui n'est pas une machine de Turing, c'est-à-dire une machine qui ne fonctionne pas à l'aide d'un algorithme", une série d'instructions prédéterminées, comme c'est le cas de nos ordinateurs classiques, explique-t-il.
INTERFACE CERVEAU-MACHINE
Selon lui, une telle machine reposerait au contraire sur "un mode de décision à base de probabilités" et pourrait résoudre des problèmes qui dépassent les capacités d'un cerveau isolé. La manière dont le rat"décodeur" parvient à s'approprier les signaux émis par son congénère et à les utiliser dans son propre cerveau reste toutefois mystérieuse, reconnaît le chercheur.
Voici une dizaine d'années, Miguel Nicolelis s'est rendu célèbre en permettant à des singes de laboratoire d'actionner un bras robotique par ses seules impulsions cérébrales. Prochain défi pour l'expert du Centre médical de l'université de Duke (Etats-Unis) et de l'Institut international pour les neurosciences de Natal (Brésil) : qu'un patient paraplégique donne le coup d'envoi de la prochaine Coupe du monde de football, au Brésil en 2014, à l'aide d'une jambe artificielle commandée par une interface cerveau-machine.

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