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Articles, témoignages, infos sur la psychiatrie, la psychanalyse, la clinique, etc.

mercredi 9 février 2011

"Les Récidivistes.
Représentations et traitements de la récidive XIXe-XXIe siècle"

J.P. Allinne et M. Soula

Faut-il reprendre à son compte des catégories d’État sans en interroger la genèse et la construction, sans dépasser le langage impersonnel et neutralisant du droit, sans en analyser l’efficience et les effets ? Faut-il admettre que les « récidivistes », désignent historiquement un même groupe homogène et véhiculent les mêmes impensés, les mêmes peurs, les mêmes fantasmes depuis plus de deux siècles ? Ou faut-il poser comme point de départ à toute tentative de compréhension des objets " récidive" et "récidivistes " que ce sont des catégories juridiques historiquement situées, des construits politiques qui se sont imposés par la force du droit et qui ont perduré au prix de changements de sens masqués par l’apparente neutralité de la qualification juridique. Tentant d’ouvrir cette seconde voie, cet ouvrage se propose de redonner aux « récidivistes » une dimension historique, d’analyser la consolidation de cette catégorie au XIXème siècle et les raisons et les effets de sa permanence, dont on mesure aujourd’hui encore toute l’actualité. Fruit d’une rencontre de chercheurs issus de différentes disciplines (Histoire, Socio-histoire, Droit, Histoire du droit, Sociologie), ,Les récidivistes essaie d’éclairer la question en multipliant et confrontant les points de regard dans la perspective d’embrasser le plus largement un objet tout à la fois juridique, historique, politique et sociologique. C’est au prix (de la poursuite) d’une telle discussion interdisciplinaire que les enjeux liés à la récidive peuvent être mis à jour et par la suite analysés et éclairés.

Faut-il reprendre à son compte des catégories d’État sans en interroger la genèse et la construction, sans dépasser le langage impersonnel et neutralisant du droit, sans en analyser l’efficience et les effets ? Faut-il admettre que les « récidivistes », désignent historiquement un même groupe homogène et véhiculent les mêmes impensés, les mêmes peurs, les mêmes fantasmes depuis plus de deux siècles ? Ou faut-il poser comme point de départ à toute tentative de compréhension des objets " récidive" et "récidivistes " que ce sont des catégories juridiques historiquement situées, des construits politiques qui se sont imposés par la force du droit et qui ont perduré au prix de changements de sens masqués par l’apparente neutralité de la qualification juridique. Tentant d’ouvrir cette seconde voie, cet ouvrage se propose de redonner aux « récidivistes » une dimension historique, d’analyser la consolidation de cette catégorie au XIXème siècle et les raisons et les effets de sa permanence, dont on mesure aujourd’hui encore toute l’actualité. Fruit d’une rencontre de chercheurs issus de différentes disciplines (Histoire, Socio-histoire, Droit, Histoire du droit, Sociologie), ,Les récidivistes essaie d’éclairer la question en multipliant et confrontant les points de regard dans la perspective d’embrasser le plus largement un objet tout à la fois juridique, historique, politique et sociologique. C’est au prix (de la poursuite) d’une telle discussion interdisciplinaire que les enjeux liés à la récidive peuvent être mis à jour et par la suite analysés et éclairés.
La violence des femmes
Histoire d’un tabou social

de Chistophe Regina
Présentation de l’éditeur

La place des femmes dans nos sociétés fait plus que jamais débat. Christophe Régina se revendique du même féminisme qu'Élisabeth Badinter : toute prétention à l’égalité se doit d’être totale. C’est en ce sens qu’il a mené et rédigé son étude sur la violence des femmes. Derrière ce thème, il livre une véritable réflexion sur le genre.

L’auteur définit le concept de violence tel qu’il l’acceptera pour l’ensemble de ses analyses : la violence est une impatience dans le rapport avec autrui, un moment dialectique de difficulté sociale. S’appuyant sur de nombreux témoignages de femmes violentes ou de personnes ayant subi la violence d’une femme, ici retranscrits, il s’attache à qualifier la violence des femmes en termes de pratiques et en termes de perceptions. Durant des milliers d’années, la réalité de la violence des femmes a toujours été transformée, détournée. Ces mensonges restent prégnants aujourd’hui. Il revient notamment sur les hommes battus par des femmes. Ils seraient 130 000 chaque année en France. Pourtant aucun centre d’accueil n’existe pour eux dans notre pays, aucune campagne d’information n’est diffusée. Parallèlement, l’auteur questionne les campagnes sur les violences faites aux femmes. Par exemple, Amnesty International n’envisage à aucun moment les violences exercées par des femmes et contribuerait à la mondialisation de la femme victime.

Concernant l’infanticide maternel, l’opinion publique et les médias se prennent de passions. Si le meurtrier est le père, la compassion disparaît. L’existence même de ces crimes pose la question du lien qui unit les parents à leurs enfants et remet en cause le concept selon lequel une femme est une mère. L’auteur, tel Simone de Beauvoir, rappelle que la maternité n’est ni un devoir ni une obligation mais une possibilité. Christophe Régina montre ici la persistance des stéréotypes de genre. Par exemple, il est admis que les crimes de femmes seraient surtout liés à des affaires amoureuses et qu’ils ne seraient pas motivés par l’argent. Or 74 % des meurtres commis par des femmes sont liés à l’argent. De même, l’auteur revient sur la cruauté dont les femmes seraient incapables. Que dire d’Irma Gresse, SS à Ravensbrück puis à Auschwitz condamnée à mort pour crimes de guerre, assassinats sommaires, fusillades massives, humiliations sexuelles ?

L’auteur, Christophe Regina, prépare une thèse sur Les expressions de la conflictualité féminine à Marseille au siècle des Lumières

Table des matières ici


Violences juvéniles urbaines en Europe
Histoire d’une construction sociale
de Xavier De Weirt [2], Xavier Rousseaux [3] (dir.)

Présentation de l’éditeur

De nos jours, dans les villes, la violence des jeunes alarme, inquiète. « Ils sont de plus en plus violents, de plus en plus jeunes », entend-on régulièrement de l’opinion publique. Pourtant, ces commentaires ne reposent sur aucune base scientifique fiable : ils relèvent d’un discours construit depuis près de deux cents ans sur des faits peu représentatifs et des impressions non critiquées.
Jusqu’ici, ville et violence, jeunesse et violence, voire jeunesse et ville étaient analysées de manière séparée ; en revanche, la problématique de la violence des jeunes dans l’espace public urbain n’avait pas donné lieu à des recherches croisées.
Par la confrontation systématique des sources (répressives, discursives) et selon une pluralité d’approches méthodologiques (travail sur archives, enquête orale), les auteurs de ce livre, historiens, criminologues ou sociologues, tentent de cerner l’écart existant entre perception et réalité du phénomène aux différentes périodes de l’histoire.
Sur la base de recherches récentes, ils proposent de mieux comprendre quand, comment et pourquoi s’est construite dans la société européenne cette représentation de la jeunesse comme vecteur de violence associé à la vie urbaine.

Table des matières ici

« L'éducation thérapeutique entraîne à repenser l'organisation de l'hôpital »

Alors qu'elle est inscrite dans la loi, l'éducation thérapeutique (ETP) conduit, pour fonder son action pédagogique, le clinicien à développer son sens clinique. Voire l?hôpital à se réorganiser. En effet, l'éducation nécessite que les soignants maîtrisent des compétences de soins et que l'organisation des soins favorise l'intégration de temps d'éducation. En attendant, sur le terrain persiste un flou tant pour le financement que dans l'attribution des autorisations de programme. Bilan d'étape avec l'un des pionniers en France de ce concept.

Entretien avec le Pr Rémi Gagnayre


Décision Santé-le Pharmacien Hôpital. 2011 sera-t-il l'an I de l'éducation thérapeutique

Pr Rémi Gagnayre*. D'une certaine manière, la publication des décrets relatifs à la loi HPST installe l'éducation thérapeutique et lui a procuré une reconnaissance, une visibilité. La loi est un accélérateur et incite à opérer des changements rapides. Maintenant, si l'on inscrit cet épisode dans l'histoire de l'éducation thérapeutique qui reste à écrire, on est plutôt dans la continuité. À cet égard, était-il nécessaire de passer par une loi ou opter plutôt pour le développement d'une pratique intégrée aux soins ? La réponse est loin d'être simple.

D. S.-P. H. Qu'est-ce que la loi a changé ?

Pr R. G. Avec la loi, une pratique et le champ d'étude qui l'accompagne sont désormais jugés indispensables à la prise en charge des maladies chroniques bien sûr, mais aussi aiguës. En effet, au-delà des maladies historiques comme le diabète ou l'asthme, certaines situations spécifiques comme la survenue d'escarres, un traitement de courte durée par exemple nécessitent des apprentissages ponctuels. Ce qui change, c'est d'abord la nature des motivations des professionnels. Entre ceux qui s'intéressent à l'éducation thérapeutique par intéret personnel et ceux qui y sont conduits par la force de la loi, on a là une forte hétérogénéité des demandes. À ce premier creuset d'hétérogénéité s'ajoute un second degré corrélé à la création des agences régionales de santé. Elles disposent en effet du pouvoir pour délivrer ou non des autorisations de programme. Mais nul ne connaît vraiment les critères qui leur permettent de sélectionner un programme et d'en écarter un autre. Si des critères méthodologiques sont établis, d'autres critères liés aux politiques de santé régionales sont certainement utilisés, alors qu'ils ne sont pas toujours connus des acteurs. Au total, on dispose certes d'une loi qui reconnaît et impulse une direction. Mais l'instrument c'est-à-dire la grille administrato-sanitaire reste parfois peu clair.

D. S.-P. H. Comment aujourd'hui ces programmes sont-ils financés ?

Pr R. G. Si le versant technico-méthodologique a été au cSur des préoccupations et largement débattu, le volet financier a été traité avec une grande pudeur. Reste qu'un projet de circulaire portant sur le financement des programmes d'éducation thérapeutique devrait préciser les possibles modalités. À cet égard, rappelons qu'autorisation ne veut pas dire financement.

D. S.-P. H. Justement, les laboratoires pharmaceutiques qui ont été écartés de l'élaboration et de la mise en Suvre des programmes d'éducation thérapeutique ne seront-ils pas dans un second temps invités à participer au financement ?

Pr R. G.
C'est ce qui semble envisagé dans les possibilités de financement des programmes que l'on peut faire. L'industrie pharmaceutique a compris depuis longtemps l'intérêt de financer des programmes d'éducation thérapeutique au titre de son image par exemple, mais pas seulement& Certains laboratoires ont joué un rôle majeur dans l'essor de l'ETP. Le développement des écoles de l'asthme par exemple où le laboratoire GSK s'est impliqué dès la création est un exemple. C'était une prise de risque pour ceux qui au sein du laboratoire ont participé à cette aventure.

S'il ne sert à rien de diaboliser les laboratoires pharmaceutiques, l'essentiel est plutôt d'envisager les procédures de contractualisation. Il s'agit aussi de savoir en quoi consiste le retour attendu par le financeur, quelles sont les conséquences pour le patient, le système de soins de leur investissement. L'important est de l'analyser systématiquement et de se donner les moyens de pouvoir dire non.

Quant aux autres acteurs comme les mutuelles, les caisses d'assurance à l'exception de la MSA pionnier dans la mise en Suvre de programmes d'éducation thérapeutique n'ont pas encore pris toute la dimension de ce champ de pratiques et d'étude.

D. S.-P. H. Vous avez toujours défendu le principe que l'éducation thérapeutique devait être uniquement dispensée par des soignants. Cette position est-elle tenable, alors que s'aggrave la crise démographique ?

Pr R. G.
Au cours de la XVIIe journée de l'Ipcem2 qui s'est déroulée en novembre dernier, André Grimaldi a rappelé pourquoi l'éducation devait être thérapeutique en rappelant entre autres, la complexité, l'incertitude des traitements. Pour quelques années encore et de par son champ d'action, l'éducation thérapeutique doit être conduite par des soignants dotés de compétences en physiopathologie, en pharmacologie. Soulignons que l'éducation thérapeutique est aussi une formation continue au contenu. Il y a un rapport évident entre les propositions éducatives et les enjeux thérapeutiques.

Certes, le défi de masse est une véritable question. Pour autant, je ne suis pas certain qu'il faille étendre le principe de dispenser l'éducation thérapeutique par le plus grand nombre possible d'éducateurs qui ne verraient pas les patients dans le cadre d'une relation thérapeutique et qui ne pourraient pas assurer la maîtrise des contenus. Je ne parle pas ici des expériences menées avec les patients ressources qui intègrent les équipes médicales pour la conception et l'animation des programmes d'éducation thérapeutique.

En revanche, il peut être légitime de réfléchir sur les formats d'éducation. Pour l'instant, le législateur a retenu la notion de programme qui renvoie à des modalités précises selon le temps d'éducation plus ou moins long. On peut envisager des formats plus réduits, plus courts.

Qu'est-ce qu'un format ? C'est une modalité d'intervention dépendant du contexte et du temps dédié qui permet de mobiliser avec le patient une compétence, une attitude estimée utile pour aider le patient à gérer une situation. En ce qui concerne le médecin généraliste, des travaux en cours formalisent par exemple ce que peut être un temps dédié à l'éducation. Cependant, cette éducation nécessite quand même de revoir les conditions d'exercice, les temps de consultation, en fonction de la situation de santé des patients et des types de rémunération.

D. S.-P. H. Certains auteurs comme Philippe Barrier3 remettent en cause le concept même d'éducation thérapeutique.

Pr R. G.
Je ne pense pas qu'il le remette en cause. Il préconise une autre dénomination « instruction normative de santé » au regard de ces travaux sur l'autonormativité. Cependant, dans son ouvrage, il ne récuse pas le pédagogique. Bien au contraire.

À noter que nous avons mis beaucoup de temps à stabiliser ce terme, l'éducation, qui en France a toujours soulevé de nombreuses interrogations en référence à sa double étymologie, à savoir faire advenir la personne et la nourrir avec un va-et-vient extériorité-intériorité. Notons qu'actuellement, on ne revient pas sur cette dénomination, d'autant plus que la nouvelle loi de santé publique confirme ce terme. Même si le terme éducation a été dévoyé, celui-ci reste un beau mot. Il garde toute sa pertinence, notamment dans le domaine de la santé.

En revanche, dans les pays anglo-saxons, on parle de « patient education » (éducation du patient). Bref, c'est un beau mot.

D. S.-P. H. Dans les pays étrangers, on parle donc d'éducation pour la santé et non pas d'éducation thérapeutique ?

Pr R. G.
On observe deux champs contigus, dont le continuum reste encore à expliciter. l'éducation pour la santé et l'éducation du patient. Il y a la reconnaissance pour l'existence de deux champs : celui où l'on est « indemne » de toute affection. Dans ce cas, les interventions visent à promouvoir une réflexion sur le maintien de sa santé. En cas de survenue d'une maladie second cas une éducation est proposée, dite du patient qui tient compte de cet événement de vie. Ces deux entités ne renvoient pas aux mêmes dynamiques ou ressorts motivationnels. En France, on a donc ajouté le qualificatif de thérapeutique suite aux propositions de groupe de travail de l'OMS-Région Europe en 1998 pour souligner qu'elle tire son origine des interactions entre l'intelligibilité de soi, la maladie et les soins. Elle représente une action complémentaire et intégrée aux soins qui confère au patient des compétences pour se prodiguer pendant une période donnée ses propres soins.

L'un de ses objectifs, à savoir qu'elle s'occupe des traitements, des prises en charge soignantes pour rendre le patient compétent à équilibrer les rapports et permettre au malade d'être un peu soignant un moment donné. Elle renforce l'idée qu'il s'agit d'une fonction éducative soignante en premier lieu versus éducation pour la santé où le spectre d'intervenants est plus large.

D. S.-P. H. Le partage de savoir ou de pouvoir entre le soignant et le patient n'a-t-il pas été un frein à la diffusion de l'éducation thérapeutique ?

Pr R. G.
Certainement. En particulier, la croyance fort entretenue dans la formation initiale des soignants que le patient serait un réceptacle des choix, décisions sans participation active à leur élaboration. L'avancée consiste en la présence d'un patient avec ses représentations, son histoire, ses réaménagements, sa logique puis ses décisions apparaîssent désormais comme une donnée concrète. Avec l'éducation thérapeutique, le patient acquiert une présence agissante. L'une des conséquences de cette attitude se traduit pour le clinicien par une plus grande sensibilité clinique, parce qu'il doit privilégier le principe d'éducabilité et le préférable thérapeutique. Finalement, par l'ETP, il devient de plus en plus soignant.

D. S.-P. H.
Faut-il être empathique lorsque l'on dispense une éducation thérapeutique ?

Pr R. G.
Oui d'une certaine manière. Mais ce qui doit être dominant dans la pratique d'éducation thérapeutique est plutôt l'élucidation de la logique de l'autre. Il s'agit d'approcher la compréhension du patient et de la relier à des réussites, des difficultés. Cela s'inscrit dans une attitude classique de l'éducateur. Par ce moyen, on écoute alors davantage. On s'efforce non pas d'être d'accord mais de s'accorder avec le patient. Il découle par cette attitude pédagogique, une approche empathique du patient. Il faut bien sûr éviter tout relativisme où la parole du patient serait toute puissante. L'éducation thérapeutique n'est pas un long fleuve tranquille. Elle se nourrit d'opposition respectueuse, de référence différente à l'origine d'accord ponctuel. Tout ne se vaut pas.

D. S.-P. H.
En période de crise économique, l'éducation thérapeutique n'est-elle pas un luxe ?

Pr R. G. Oui, et c'est un luxe selon l'étymologie du mot qui doit être accessible au plus grand nombre de personnes.
C'est déontologique de favoriser l'accès à des compétences de soins, à une compréhension de soi. L'éducation thérapeutique ne peut se réduire à une technique. Ce n'est pas du « counseling ou du coaching ». Elle représente un changement de perspective avec une répercussion sur la dimension organisationnelle des soins que l'on sous-estime souvent. Rappelons que les hôpitaux sont structurés à partir d'une logique biomédicale et actuellement selon des contraintes économiques. Cependant, ces établissements sont aujourd'hui confrontés à la chronicité et à la multifactorialité des histoires médicales. En un sens, l'éducation thérapeutique est un signal parmi d'autres d'une nécessaire réorganisation, avec comme paradoxe qui devrait être anticipé par les décideurs que l'élévation du niveau éducatif des patients ou des aidants naturels vis-à-vis de leurs autosoins entraîne des temps de lâcher-prise, et par conséquent la création de lieux de soins le permettant.

La haute technologie médicale est indispensable. Simplement, il faut en envisager le pendant humain au sens émotionnel, cognitif et perceptif. L'éducation thérapeutique est l'opportunité de repenser les espaces, les scénographies du soin, l'organisation du travail. Là où elle se dispense, elle révèle encore un lieu de marginalité institutionnelle, au sein duquel une pensée alternative est encore autorisée. Souhaitons que la loi soit l'occasion de favoriser ces lieux.

1. Médecin et professeur en sciences de l'éducation. Université Paris XIII, Bobigny.

2. L'Ipcem participe à la réflexion sur le thème de l'éducation thérapeutique, notamment par des colloques et des formations. Cf. leur site Internet www.ipcem.org. Décision Santé organise sur ce sujet une formation intitulée "éducation therapeutique: favoriser l'apprentissage du patient" les mardi 22 et mercredi 23 mars 2011 : voir le site www.decision-sante.com rubrique formation

3.La blessure et la force, Éd PUF 2010, 18 euros.

Article du : 21.01.2011


Le gène du suicide n’est pas encore identifié, heureusement ?

Le suicide constitue l’un des événements les plus tragiques auxquels les psychiatres se trouvent confrontés dans leur pratique, et malgré les efforts de maintes générations de médecins, le passage à l’acte suicidaire demeure aussi commun que difficile à prévoir. Il est donc tentant d’essayer de réduire cette marge d’imprévisibilité, en recherchant notamment des facteurs génétiques de prédisposition au suicide. « Sonder le génome pour comprendre le suicide » : une idée d’autant plus plausible qu’on connaît avec certitude certaines familles (comme celles du philosophe Ludwig Wittgenstein et de l’écrivain Ernest Hemingway) comportant plusieurs cas de suicide.

Portant sur près de 2 millions de variants génétiques chez près de 6 000 sujets avec troubles bipolaires et 3 000 avec dépression majeure, une étude récente n’a toutefois pas pu mettre en évidence un éventuel « gène du suicide. » En particulier, elle n’a apporté aucune confirmation du rôle de 19 gènes dont l’implication était pourtant suspectée. Par conséquent, aucun test génétique n’est actuellement envisageable pour prédire une majoration du risque suicidaire. Et heureusement, pourrait-on dire, vu la réaction possible devant une telle révélation !

Plusieurs mécanismes contribuent sans doute à ce résultat négatif, explique l’auteur. D’une part, le suicide survient souvent chez des sujets jeunes, avant toute procréation : ils meurent donc avant d’avoir pu transmettre le(s) gène(s) éventuel(s) de prédisposition au suicide qu’ils portaient. Autre hypothèse : le(s) gène(s) concerné(s) pourrai(en)t être un (des) varian(t)s rare(s), demandant des études sur des échelles de population bien plus grandes. Enfin, il est difficile de départager le rôle des gènes et celui de l’environnement, en particulier le rôle interférant tenu peut-être par les médicaments antidépresseurs, généralement prescrits chez les sujets (déprimés) enrôlés dans ce type d’études sur l’épidémiologie du suicide.

Recruter à cet effet des cohortes de personnes dépressives introduit-il un biais systématique ? Il semble que non, car la prédisposition génétique au suicide (apparemment indéniable) serait « indépendante de toute (autre) susceptibilité génétique à une maladie mentale », de sorte que les résultats observés chez des sujets dépressifs seraient a priori transposables pour d’autres populations. Au total, en l’absence de « gène du suicide » précis et donc de tout « dépistage » génétique possible d’une telle prédisposition, le meilleur indicateur d’une éventuelle susceptibilité au suicide demeure l’anamnèse personnelle et familiale.                
Dr Alain Cohen

Uher R et Perroud N : Probing the genome to understand suicide. Am J Psychiatry, 2010 ; 167-12 : 1425-1427.
Publié le 26/01/2011



Détecter la schizophrénie grâce aux scanners

Les cerveaux de personnes atteintes de schizophrénie fonctionnent différemment que ceux des personnes dites "normales", ressort-il d'une étude menée par le psychiatre anversois Jan Van Hecke auprès de patients qui ont dû effectuer des tâches alors qu'ils étaient dans un scanner, peut-on lire mardi dans le quotidien Gazet van Antwerpen.

"Cette différence en terme d'activité cérébrale doit aider à diagnostiquer plus rapidement et plus certainement la maladie et ainsi la soigner", explique le psychiatre anversois.

"Aujourd'hui, près d'une personne sur cent est confrontée à la schizophrénie durant sa vie. En Flandre nous estimons en ce moment que cela concerne près de 30.000 personnes. Pour la grande majorité le diagnostic ne sera posé qu'après une crise ou une psychose. La plupart de ces patients ont déjà alors un long parcours derrière eux. Plus vite le bon diagnostic est posé, meilleur sera le traitement".

Le professeur a cherché, pour son doctorat, une méthode de détection plus fiable. Il a utilisé pour cela des scanners MRI qui montrent quelle zone du cerveau est active lorsqu'une personne effectue un exercice cérébral et cette méthode a montré une différence entre les personnes atteintes de schizophrénie et les autres. (belga)
01/02/11





Le secrétariat à la Jeunesse lance une mission sur le suicide des jeunes

La secrétaire d'État à la Jeunesse Jeannette Bougrab a confié jeudi au psychiatre Boris Cyrulnik une mission sur le suicide des enfants et des jeunes, la deuxième cause de mortalité des 16-24 ans en France, derrière les accidents de la route, a-t-elle indiqué à l'AFP.

La secrétaire d'État à la Jeunesse Jeannette Bougrab a confié jeudi au psychiatre Boris Cyrulnik une mission sur le suicide des enfants et des jeunes, la deuxième cause de mortalité des 16-24 ans en France, derrière les accidents de la route, a-t-elle indiqué à l'AFP.

Bien que plusieurs faits divers récents aient mis en lumière des cas de suicides de jeunes adolescents ou d'enfants (9 et 14 ans), Mme Bougrab a précisé avoir décidé de lancer cette mission avant ces événements.

"On refuse de voir notre propre échec, à savoir que des enfants se donnent la mort, c'est quelque chose qu'on a du mal à concevoir et à imaginer", a-t-elle affirmé.

"C'est un phénomène complexe, qui commence dans la toute petite enfance et qu'il faut aborder de manière évolutive et non pas ponctuelle", a-t-elle poursuivi.

L'idée de la mission est de s'interroger sur tout l'environnement de l'enfant, sa famille mais aussi "le lien social" en général, comme les assistantes maternelles qui peuvent aider à la détection des enfants fragiles ou encore les associations qui proposent des activités aux jeunes (sport...).

"Le lien social protège et offre des référents adultes auxquels peut s'adresser l'enfant en souffrance", selon Mme Bougrab.

Le rapport, que M. Cyrulnik doit remettre en juin, ne s'attaquera pas en revanche à la question de la prise en charge sanitaire (psychiatrie, médicaments...).

En janvier, une fillette de 9 ans, souffrant de diabète chronique, a mis fin à ses jours en se jetant du cinquième étage de l'appartement familial dans la banlieue lyonnaise, tandis qu'une adolescente de 14 ans a tenté de mettre fin à ses jours en sautant du quatrième étage de son collège de Seine-Saint-Denis.

Si le suicide d'enfants est considéré comme très rare par les psychiatres, le suicide représente environ 16% des causes de décès chez les 16-24 ans, selon l'Inserm. En 2008, l'Inserm a dénombré 26 suicides chez les 5-14 ans et 529 chez les 15-24 ans.
AFP
03/02/2011

mardi 8 février 2011

Nouvelles psychanalytiques

De la folie dans l’art à l’art des fous


Par Marie-Hélène ROUVIÈRE – A propos du livre Images de la folie de Claude Quétel

Après une “histoire de la folie” parue en 2009, Claude Quétel rassemble dans ce nouvel ouvrage un choix d’images de la folie, représentations artistiques ou documentaires qui, de l’Antiquité à nos jours, retracent à leur manière l’histoire de cette affection troublante et dérangeante. Le propos de l’auteur n’est pas de dresser un catalogue indifférencié d’ illustrations de la folie mais, à travers certaines d’entre elles, de nous faire percevoir les préoccupations philosophiques, religieuses, morales et médicales qui ont prévalu à tous les moments de l’histoire. Car le mot folie a toujours été ambivalent, signifiant à la fois, au sens philosophique, l’absence de sagesse et au sens médical, la perte de la raison. Cette dualité de sens se retrouve dans la diversité et souvent l’équivoque des représentations.

A l'aube de la Renaissance, la figure emblématique du bouffon, celle du fou qui divertit les seigneurs et les rois par son délire audacieux, est largement représentée dans les gravures, les enluminures et jusque dans les cartes de jeux de tarots. Symbole de l'errance, de l'insouciance et de la liberté, elle illustre la folie au sens philosophique du terme et devient rapidement l'allégorie de la folie du monde (Le sabbat de bouffons d'après Pieter Bruegel en témoigne). Cette signification est reprise et consacrée par Sébastien Brant, dans son ouvrage de morale chrétienne, La Nef des fous (1494), maintes fois réédité et imité. Sont répertoriés et représentés les vices des contemporains, allégoriquement embarqués dans des bateaux ivres dérivant vers nulle part. (…)

Lire la suite sur nonfiction


dimanche 6 février 2011

Nouvelles psychanalytiques

Journées d’études “Les psychoses”


Espace analytique, Association de Formation Psychanalytique et de Recherches Freudiennes, les 19 et 20 mars 2011 - Faculté de Médecine - Amphi Binet 45 rue des Saints-Pères 75006 Paris

Même si le psychanalyste, que ce soit dans la libéralité de son cabinet, ou dans les rets d’une structure institutionnelle, est quotidiennement confronté à la folie, la psychanalyse est longtemps restée dans une prudente réserve vis-à-vis de la psychose. Lacan en 1978, dit « La psychanalyse guérit des névroses, voire des perversions … » en faisant l’impossible impasse sur la psychose. Si la psychanalyse ne s’autorise qu’avec une extraordinaire prudence à imaginer qu’elle puisse prétendre guérir la folie, elle ne peut refuser d’y être en prise. La psychose convoque la psychanalyse, laquelle se trouve dans l’impossibilité de se dérober. De son côté, Freud, bien qu’apportant une approche théorique de la paranoïa avec le président Schreber reste discret sur le traitement de la psychose.

La psychanalyse a largement contribué à fissurer les murs de l’asile afin que la parole soit opérante là où sévissait uniquement l’enfermement. Aujourd’hui la politique de santé mentale, dans sa logique répressive, opère une régression catastrophique.

Au troisième congrès de Bonneval, en 1946, Lacan s’opposait à Henri Ey qui refusait la seule psychogenèse des psychoses. Cette question se trouve à nouveau soulevée avec les neurosciences. Lorsqu’il écrit : « Un demi-siècle de freudisme appliqué à la psychose laisse son problème encore à repenser, autrement dit au statu quo ante », on est, on ne peut plus, au coeur de l’actualité.

PROGRAMME DES JOURNÉES

Samedi 19 mars


- 9h30-12h30 :

Introduction : Patrick Landman

Théorie de la psychose


Président : Guy Sapriel
Discutant : Alain Vanier

Ginette Michaud : Le corps dans la psychose
Jacques Sédat : L’image du corps du schizophrène dans l’oeuvre de Gisela Pankow
Gérard Pommier : Du fantasme à l’hallucination
Luis Edouardo Prado de Oliveira : La forclusion
Thierry Sauze : Du rejet psychotique et ses incidences thérapeutiques

- 14h30-17h30 :

Psychose et transfert


Présidente : Claude Boukobza
Discutant : Christian Hoffmann

Arlette Costecalde : Où est la folie ? Dans celui qui l’incarne ou dans le désir de l’Autre ?
Gorana Manenti : Instaurer le transfert avec le psychotique
Pierre Poisson : Irreprésentabilité, transfert et psychose
Frédéric de Rivoyre : Comment faire sortir un chapeau d’un lapin ?
Guy Dana : Quelle réserve de savoir avec les psychoses ?

Dimanche 20 mars

- 9h30-12h30 :

Difficulté de la prise en charge

Présidente : Catherine Vanier
Discutant : François Kammerer

Dominique Tourrès-Gobert
: A l’adolescence Jean-Paul Mouras : Psychose et exclusion : quels liens la modernité nous permet-elle de faire ?
Thierry Jean : La mélancolie : ne pas céder sur l’éthique
Olivier Douville et Marielle David : Freud, Binswanger, Aby Warburg
Patrick de Neuter : La folie au pouvoir, Louis II de Bavière

- 14h30-17h30 :

Psychose et structure


Présidente : Sabine Parmentier
Discutante : Monique Lauret

Solal Rabinovitch : « …Un petit schéma, où l’imaginaire se continuerait avec le réel »
Francisco Rengifo : Le réel et les voix
Silvia Lippi : Le corps à la place du nom : un cas de psychose ordinaire
Jean-Claude Aguerre : La langue psychotique dans l’art
Berta Roth : Artaud, histoire familiale, histoire psychiatrique

Conclusion : Alain Vanier

Comité d'organisation :

Jean-Claude AGUERRE, Arlette COSTECALDE, Marielle DAVID, Patrick LANDMAN,
Gorana MANENTI, Gérard POMMIER, Eduardo PRADO DE OLIVEIRA, Dominique TOURRÈS-GOBERT


Renseignements :

Centre Octave et Maud Mannoni 12 rue de Bourgogne, 75007 Paris
Tél. : 01 47 05 23 09


espace.analytique@wanadoo.fr
www.espace-analytique.org

Prévention des suicides : le coup de gueule du Pr Lançon
05 février 2011

Un psychiatre de Marseille dénonce l'absence de politiques publiques


En matière de prévention des suicides "il n'y a pas de politique publique digne de ce nom en France". C'est le coup de gueule poussé, hier, par le professeur Lançon. Le chef du service psychiatrie de l'hôpital Sainte-Marguerite de Marseille n'a d'ailleurs pas été franchement contredit par le docteur Pierre Verger, directeur adjoint de l'Office régional de la Santé, qui présentait hier la 15e journée nationale de prévention du suicide, qui se déroule aujourd'hui.

Le taux de suicide était d'environ 17 pour 100000 habitants en Paca et 20 pour 100000 dans toute la France entre 1979 et 1981 et il était, tant pour notre région que pour l'ensemble de l'Hexagone, d'environ 16 pour 100000 lors de la période 2006-2008 (derniers chiffres disponibles), avec une différence du simple au double entre les hommes et les femmes. Le suicide des jeunes, qui horrifie tant les adultes parce qu'ils ne le comprennent pas, est en nette régression (de 16 à 10 pour 100000 entre 1991 et 2008), alors qu'il diminue peu pour les plus de 65 ans mais est plus important en nombre (de 33 à 28 pour 100000, selon la même période).

" En France nous avons réussi à diviser par deux le nombre d'accidents de voiture. Mais le taux de suicide diminue lentement, alors que dans d'autres pays européens qui ont mis sur pied des politiques volontaristes, il a diminué de 50%", a affirmé le professeur Lançon. Signes avant-coureurs Quelles politiques? "90% des gens qui se sont suicidés avaient vu un médecin dans le mois précédent leur passage à l'acte", note-t-il.

Sans vouloir alourdir la barque déjà bien chargée des généralistes, il estime nécessaire qu'ils soient formés à détecter les signes avant-coureurs de la dépression. Le stress au travail, l'absence de considération de ses responsables hiérarchiques, le harcèlement, comme stratégie de management ou simplement exercé par un pervers, sont autant de facteurs dépressifs qui peuvent conduire au suicide.

Il réclame aussi une meilleure information du grand public: "Une personne qui a des idées suicidaires ne se confiera jamais à une personne de sa famille. Il aura peur de lui faire de la peine. Il pourrait se confier à un collègue, si celui-ci lui disait : "Qu'est-ce que tu as? Je te trouve bizarre en ce moment". Mais en France, cette question est souvent taboue". Pour l'heure la politique publique de prévention des suicides consiste à distribuer dix mille brochures tous les deux ans aux professionnels de santé. Pas assez pour informer les médecins et dire aux simples citoyens que s'intéresser aux collègues, amis, voisins qui semblent aller mal, c'est peut-être les inciter à consulter afin de ne pas passer à l'acte.
Thierry NOIR (tnoir@laprovence-presse.fr)
Le PH "moderne" : un antifuite triple épaisseur ?
04 Février 2011

Si vous me permettez la caricature un tant soit peu carabine, je vous proposerais de représenter le praticien hospitalier "moderne" d'un pôle de psychiatrie publique, travaillant en intrahospitalier, non pas avec - cela nous aurait fait rire un peu -, mais comme un anti-fuite triple épaisseur. Il faudrait lui adjoindre au dessus de lui, la menace qui planerait de voir son salaire indexé aux chiffres de  l'évaluation de son activité professionnelle. Nous retiendrions les trois types de "chiffre", qu'on lui opposerait désormais le plus fréquemment (vu leur facilité apparente de calcul, mais qui ne sont pas sans portée idéologique) : la durée moyenne de séjour, le nombre des suicides, et celui des fugues.

Autrement dit, le patient "moderne" de notre PH "moderne" ne devrait plus avoir aucune possibilité d'échapper à la guérison, à la maîtrise, à l'emprise de son soignant. Il ne devrait plus avoir aucune possibilité de fuite, que ce soit dans le délire, dans la fugue, ou dans la mort. La durée moyenne de séjour imposerait de "refroidir" le délire en moins de 17 jours. Refroidir est un mot qui fait froid dans le dos. En médecine, en référence au symptôme, il contient la notion importante de l'urgence d'attendre. Passé en psychiatrie, où le symptôme (le délire) est mal démêlable du sujet, on ne sait plus très bien qui ou quoi devrait, sans attendre cette fois, se retrouver "refroidi".

Nous n'oublierions pas en conclusion, qu'Henri Laborit, le grand-père des neuroleptiques (les antifuites chimiques par excellence) par ses travaux sur l'hibernothérapie au début des années cinquante, a écrit à la fin des années soixante et dix : "Éloge de la fuite".
Luc Diaz Psychiatre Montpellier
Soins aux détenus : l’UHSA a tenu « son pari », selon les psychiatres
04.02.2011

« L’UHSA n’est pas un hôpital-prison ! », ont martelé - une nouvelle fois - hier les intervenants médicaux lors des journées d’études « psychiatrie et prison » qui se poursuivent aujourd’hui à l’ENS de Lyon. Leur objectif est d’analyser cet objet thérapeutique encore peu identifié qui a fait coulé beaucoup à son ouverture le 18 mai dernier au sein du centre hospitalier du Vinatier. L’Unité hospitalière spécialement aménagée, « n’est pas un lieu de rétention, de sûreté, un hôpital pour pédophiles » ou encore « un outil d’éradication de la maladie mentale en prison », lance d’emblée le Dr Eve Bécache, la responsable de l’UHSA. L’unique « objet » de l’UHSA est d’apporter une égalité de soins aux personnes détenues souffrant de troubles mentaux, rappellent la psychiatre et le directeur du Vinatier, Hubert Meunier.

Dotée de 3 unités de 20 lits, l’UHSA s’adresse à une population de plus de 7 000 détenus, répartis sur une région allant de Dijon à Aurillac, de Privas à Besançon. Au 26 janvier, elle avait accueilli 164 patients de toutes les prisons de la région mais une majorité était issue de Corbas. Seules 15 femmes et 4 mineurs figuraient parmi les patients âgés pour la plupart de moins de 49 ans. 99 patients étaient des condamnés et 65 des prévenus. Psychoses, dépressions sévères… les pathologies des patients de l’UHSA sont « très lourdes » et « nous sommes confrontés de manière permanente à la mort et aux pulsions de mort », explique le Dr Bécache en soulignant que les 117 soignants doivent subir, eux-aussi, l’enfermement. Avec 49 patients condamnés pour homicide et 26 pour viols, l’UHSA est aussi une « concentration des crimes de sang », cependant il n’y a « jamais eu de violences ». Le premier décès par suicide a été enregistré récemment mais l’équipe a aussi encadré 11 libérations de détenus dont 2 sont rentrés chez eux (les autres restant hospitalisés dans d’autres unités). « Il faut toujours se dire qu’ils seront libres un jour et travailler avec les services qui les prendront en charge », souligne Eve Bécache. Seuls 2 patients sont là depuis l’ouverture, les autres restent en moyenne 46 jours. Mais l’UHSA est « pleine » en permanence. Bref, après 9 mois d’expérience, la responsable de l’unité estime que « le pari et les objectifs ont été tenus » et que l’UHSA est « exclusivement un outil de soins ».
Sylvie Montaron

L'ordinaire des urgences
03.02.11
Point de vue

L'affaire du Mediator focalise aujourd'hui tous les regards sur les relations pour le moins problématiques entre les laboratoires pharmaceutiques et l'Etat. Le scandale sera sans doute chassé par un autre, mais il y en a qui pourrait se révéler encore plus explosif et qui relève du fonctionnement même des hôpitaux. Il suffit d'un malaise pour se retrouver en moins de deux dans la cour des miracles des urgences.

Tout va bien avec les pompiers, professionnels, calmes, mais tout se complique à Bichat (groupement hospitalier universitaire parisien). Conduit le mardi 11 janvier aux alentours de 10h30, j'en repars à 16 h après avoir attendu pendant près de cinq heures l'arrivée du médecin au demeurant exemplaire et qui me délivre enfin mon bon de sortie. Dès l'accueil, vu la pénurie de lit, on m'annonce que je dois plutôt prendre une chaise, option abandonnée quand on s'aperçoit que je suis incapable de m'asseoir. On m'emmène au bilan. L'infirmière assistée d'un stagiaire affolé prépare mon dossier, direction le box rouge n°6. J'ai juste la chance d'échapper encore une fois à la chaise et l'on me gare dans ma cellule.
Groggy, au bout d'une heure je demande à voir un médecin, je comprends bien que ceux qui passent devant moi, réclament des soins immédiats : une épileptique, une vieille dame à qui l'on fait un vestiaire, autrement dit on l'a déshabille devant tout le monde au milieu du couloir. Seul, je bénéficie d'un privilège exorbitant. Le monsieur d'à côté gémit, la vieille dame veut aller aux toilettes. Les infirmiers courent dans tous les sens. Le haut-parleur de mon box crachote des ordres à l'infini, "des infirmiers psychiatriques à l'accueil", "on demande des chaises".

SOUS-EFFECTIF CHRONIQUE


L'accueil au bord de la crise ne peut plus traiter ceux qui débarquent, les cardiaques, les quinteux, les esseulés, et tous ceux qui, atterrés, désespèrent au parking de l'attente. La bande son poursuit sa plainte : "Yvette localise-toi !" "Asia où es-tu ?" "A tous rendez-vous à la régul(ation)", sans doute pour examiner la feuille de route d'un après-midi ordinaire. A mon tour, j'exprime le souhait d'aller aux toilettes, un infirmier compatissant happé au hasard de sa course me soutient, on passe par une salle collective comble, les toilettes sont au bout impraticables ; ils débordent comme les urgences, comme les angoisses.

L'infirmière qui pose l'électrocardiogramme de mon salut avoue son incapacité à suivre le rythme, elle va aller ailleurs. Un sous-effectif chronique oblige le personnel à se débarrasser des patients, pour désengorger le service, et s'accorder à la rotation frénétique de la valse continue des demandeurs de soins. Les visiteurs entraînés dans la dégradation d'un système hospitalier à bout de souffle qui les dessaisit de leur identité n'ont plus que le choix de subir le stress des urgences ou de prier le ciel de les sortir de là le plus vite possible. Faudra-t-il attendre que les malades soient à leur tour victimes de l'hôpital pour que l'affaire des urgences prenne le relais du Médiator ?
Bertrand Raison, consultant

Enfin des fonds pour la recherche
Anne Jeanblanc

03/02/2011

Une personne sur cinq a été, est ou sera touchée par une maladie psychiatrique en France. Ces affections représentent une des premières causes d'hospitalisation en France. Or elles ont été longtemps ignorées par la médecine. Les choses vont peut-être changer : le projet de cohorte - regroupement de patients - sur les maladies psychiatriques proposé par la Fondation FondaMental figure parmi les dix lauréats retenus dans le cadre des Investissements d'avenir du ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche.

Une victoire pour sa directrice, le professeur Marion Leboyer, qui se bat pour améliorer le diagnostic précoce, mettre en place des stratégies de prévention et développer des thérapeutiques innovantes. La création d'une cohorte va, selon elle, " donner une impulsion décisive à la recherche en psychiatrie et permettre de couvrir un champ de la santé publique insuffisamment soutenu et exploré ". Son ambition est de suivre 1 000 patients atteints de troubles bipolaires, 200 du syndrome d'Asperger (une forme d'autisme) et 800 de schizophrénie.
Le secrétariat à la Jeunesse lance une mission sur le suicide des jeunes
AFP - Publié le 03/02/2011

La secrétaire d'État à la Jeunesse Jeannette Bougrab a confié jeudi au psychiatre Boris Cyrulnik une mission sur le suicide des enfants et des jeunes, la deuxième cause de mortalité des 16-24 ans en France, derrière les accidents de la route, a-t-elle indiqué à l'AFP.

La secrétaire d'État à la Jeunesse Jeannette Bougrab a confié jeudi au psychiatre Boris Cyrulnik une mission sur le suicide des enfants et des jeunes, la deuxième cause de mortalité des 16-24 ans en France, derrière les accidents de la route, a-t-elle indiqué à l'AFP.

Bien que plusieurs faits divers récents aient mis en lumière des cas de suicides de jeunes adolescents ou d'enfants (9 et 14 ans), Mme Bougrab a précisé avoir décidé de lancer cette mission avant ces événements.

"On refuse de voir notre propre échec, à savoir que des enfants se donnent la mort, c'est quelque chose qu'on a du mal à concevoir et à imaginer", a-t-elle affirmé.

"C'est un phénomène complexe, qui commence dans la toute petite enfance et qu'il faut aborder de manière évolutive et non pas ponctuelle", a-t-elle poursuivi.

L'idée de la mission est de s'interroger sur tout l'environnement de l'enfant, sa famille mais aussi "le lien social" en général, comme les assistantes maternelles qui peuvent aider à la détection des enfants fragiles ou encore les associations qui proposent des activités aux jeunes (sport...).

"Le lien social protège et offre des référents adultes auxquels peut s'adresser l'enfant en souffrance", selon Mme Bougrab.

Le rapport, que M. Cyrulnik doit remettre en juin, ne s'attaquera pas en revanche à la question de la prise en charge sanitaire (psychiatrie, médicaments...).

En janvier, une fillette de 9 ans, souffrant de diabète chronique, a mis fin à ses jours en se jetant du cinquième étage de l'appartement familial dans la banlieue lyonnaise, tandis qu'une adolescente de 14 ans a tenté de mettre fin à ses jours en sautant du quatrième étage de son collège de Seine-Saint-Denis.

Si le suicide d'enfants est considéré comme très rare par les psychiatres, le suicide représente environ 16% des causes de décès chez les 16-24 ans, selon l'Inserm. En 2008, l'Inserm a dénombré 26 suicides chez les 5-14 ans et 529 chez les 15-24 ans.
L'hystérie, c'est son champ d'études

BRIVE-LA-GAILLARDE

2 février 2011
Mathilde Drouffe n'a pas 30 ans. Mais elle vient déjà d'inscrire son nom en lettres d'or au palmarès du plus réputé congrès de psychiatrie de France. Le congrès de l'Encéphale qui réunit, depuis neuf ans, près de 4.500 spécialistes francophones (France, Belgique, Suisse...).

Un rendez-vous incontournable qui décerne, à chaque édition, les prix congrès, du comité scientifique et poster. C'est dans cette dernière catégorie que le docteur Drouffe s'est illustré, s'imposant devant pas moins de 495 confrères.

Une belle surprise et une première pour la région Limousin. Et le point d'orgue d'une jeune carrière prometteuse, lancée depuis le 1er novembre à l'hôpital de Brive.
Quelle justice pénale pour quelles libertés ? 

Couverture ouvrage
Quelle justice pénale ? Revue "Hommes et Liberté"
Collectif
Éditeur : Ligue des Droits de l'Homme

Résumé : Un numéro de la revue de la Ligue des Droits de l'Homme, "Homme&Libertés", qui analyse le rôle de la justice pénale dans la régulation de notre société.

Que ce soit en tant que ministre de l’intérieur à partir de 2002, candidat à l’élection présidentielle en 2007 ou président de la République, Nicolas Sarkozy a toujours montré une grande appétence pour le droit pénal. Cette matière est en effet un support naturel à une politique en grande partie orientée par la volonté de répondre à la demande de sécurité de la part de nos concitoyens.

Souhaitant dépasser le constat quantitatif1, la revue "Hommes et Libertés" (n°149) a voulu procéder à une analyse des mouvements à l’oeuvre dans le champ de la justice pénale.

L’objectif affiché par la revue publiée par la Ligue des Droits de l’Homme est de permettre au lecteur de "prendre de la hauteur", selon le rédacteur en chef Pierre Tartakowsky, et ce, dans une matière dont on mesure presque quotidiennement combien elle est soumise aux aléas de l’actualité.

Henri Leclerc, Antoine Garapon, Christian Mouhanna, Daniel Zagury, Jean Danet et Jean-Pierre Dubois, analysent dans ce dossier certains aspects de la justice pénale qui en structurent les débats.

A la lecture des contributions composant ce dossier intitulé "Quelle justice pénale ?", trois lignes de force peuvent être dégagées dans les réformes pénales successives qui sont en réalité révélatrices d’un état de notre société :

- les finalités devant être assignées à la peine
- la montée de l’individualisme
- la recherche d’efficacité.

Les Livres de Psychanalyse
2 février 2011

Divangations Fantaisies analytiques
Marcel Sanguet

Erès


N'en déplaise à ses contempteurs, la psychanalyse contemporaine fait preuve de vivacité ! Ces fantaisies de divan en témoignent en nous invitant à un vagabondage littéraire autant que psychanalytique.
L'ouvrage se découpe en petits chapitres introduits par d'improbables pensées consignées par un narrateur au cours de sa psychanalyse. Devenu depuis lui-même analyste, il commente ces notes en procédant de l'association libre pour lier ensemble des éléments culturels, artistiques, littéraires ou scientifiques sur un thème donné.
Au final, ce recueil illustre la clinique actuelle, ses enjeux narcissiques, ses accointances privilégiées avec le pouvoir et son désir insatiable de soumission.

Marcel Sanguet est psychologue clinicien, psychanalyste, il exerce en Savoie dans un foyer de l'Aide sociale à l'enfance et dans un CAMSP/SESSAD ainsi qu'en cabinet privé.


L'œuvre de Lacan. Cours de J.A. Miller du 19 janvier 2011.

« Les tweets du cours de JA Miller ne valent pas pour être le prononcé du cours. Ils sont une adaptation en direct pour Twitter des propos de JA Miller. » Luc Garcia

A lire ici

L'œuvre de Lacan. Cours de J.A. Miller du 2 février 2011.

« Les tweets du cours de JA Miller ne valent pas pour être le prononcé du cours. Ils sont une adaptation en direct pour Twitter des propos de JA Miller. » Luc Garcia

A lire ici


jeudi 3 février 2011

Soutien psychologique : le rugby français montre l’exemple

Blog Fortes têtes
Récemment, nous apprenions que le syndicat des rugbymen professionnels, Provale, avait mis en place un dispositif destiné à accompagner les joueurs en difficulté psychologique sous la forme d’une permanence téléphonique offrant l’anonymat. Cette dernière est effectuée à tour de rôle par deux psychiatres et quatre psychologues. Le service, quant à lui, est basé au CHU de Bordeaux, au Centre d’Accompagnement et de Prévention pour les Sportifs (CAPS), créé en 2001 par Serge Simon, médecin et ancien international.
En tant qu’intervenante en psychologie du sport, il est toujours agréable de constater que la prise en compte du sportif dans son entier prend de l’essor et que le versant psychologique tend à « être regardé en face ». Ces hommes et ces femmes que nous avons coutume de nommer les « Dieux du stade » lors de grandes performances, n’en restent pas moins, nous en avons souvent discuté ici, faillibles, humains. Pourtant, dans certaines pratiques, il semble plus sûr, pour la réussite de l’athlète concerné, de se faire passer pour un gladiateur indestructible… même s’il n’en est rien. David Attoub, qui vient de retrouver les terrains après une suspension d’un an pour mauvais geste, avoue : « Si ce dispositif avait existé, j’aurais pu composer ce numéro d’aide, sans fard. L’anonymat est très important. Dire à l’encadrement du club que ça ne va pas, c’est risquer de se retrouver sur le banc. Du coup, on reporte le malaise sur ses proches, sa famille. Cela peut être horrible… » (p.30).

Le président de Provale, Mathieu Blin légitime l’initiative et raconte : « En onze ans de professionnalisme, j’ai constaté chaque saison qu’un ou deux coéquipiers étaient en souffrance (…). En un match, tu peux ressentir de la tristesse, du ras le bol, de la colère, de l’injustice. Tu ne te maîtrises plus, tu perds l’envie de respecter les règles. Sans compter la mise en danger de notre intégrité physique et de celle des autres ». Serge Simon, à son tour, précise : « Il existe une fragilité particulière du sportif de haut niveau. C’est de plus en plus vrai dans le rugby, avec le professionnalisme et la médiatisation. Les joueurs sont hyper-investis, constamment dans une machine à laver émotionnelle, où ils passent par des très hauts et des très bas ».

Si cette initiative doit être soulignée et félicitée compte tenu de l’intérêt qu’elle témoigne aux rugbymen français et à leurs souffrances éventuelles, nous partageons le sentiment de Nadine Debois, Présidente de la Société Française de Psychologie du Sport (SFPS), Docteur d’Université en STAPS et Professeur agrégé détachée à l’INSEP, lorsqu’elle précise que « la relation directe reste primordiale » et qu’ « il vaut mieux repérer les fragilités en amont plutôt qu’en aval ». Pour cette raison « former les entraîneurs à la psychologie comme le font les fédérations d’athlétisme, de cyclisme et bientôt de ski est aussi une excellente chose ».

Cependant, devant la réticence de certaines disciplines à « franchir le pas » d’une réelle prise en compte des aspects psychologiques de la performance et du vécu de leurs sportifs, l’écoute que cette permanence téléphonique offre reste très intéressante… Néanmoins, il faut reconnaître que ceux qui finiront par composer le numéro auraient dû rencontrer de l’aide antérieurement… Peut-être même certains d’entre eux n’en auraient-ils pas eu besoin grâce à la formation psychologique et mentale et à l’accompagnement reçus en amont… Allons savoir… 

mercredi 2 février 2011

La psychiatrie, ça sert à quoi au juste ?
Chroniques de La Quinzaine
Roger Gentis

Il y a des ouvrages qui ont le mérite d'être inattendus. C'est le cas de ce recueil de chroniques, impulsé par Patrick Faugéras, qui furent publiées en leur temps dans La Quinzaine littéraire. Pourquoi inattendu ? Peut-être parce que la personnalité de Roger Gentis l'est tout autant, ainsi que son sens acéré de l'écriture, devenue trop rare ces temps-ci. Celle-ci donne un coup de jeunesse aux problématiques les plus contemporaines à travers des textes pourtant anciens. Ces chroniques concernent le champ de la psychiatrie au sens large et la parution d'ouvrages devenus, pour certains, des classiques à l'instar de leurs auteurs, des noms qui comptent dans le domaine du soin psychique. Certains controversés (Bruno Bettelheim), voire plus (Wilhelm Reich), et d'autres à reconsidérer, comme Ludwig Binswanger ou encore Edouard Zarifian. Mais Roger Gentis sait à qui il a affaire et le dit en quelques mots dans sa langue vigoureuse, réhabilitant certains à leur juste place en tenant compte de la portée de leurs œuvres, tel le commentaire quasi visionnaire datant de 1976 à propos de Fabriquer la folie de Thomas Szaz.

D'autres analyses concernent plus précisément la situation de la psychiatrie en France qui n'a rien à envier, à l'époque, à celle d'aujourd’hui. Ainsi, l'ouvrage de Francis Jeanson, intitulé La Psychiatrie au tournant, où la situation est qualifiée de "merdier idéologique" et où sont dénoncés les comportements indolents des médecins. Bref, que de l'actuel, mais aussi un plaidoyer pour une psychiatrie enthousiaste, libérée de ses carcans et de ses acteurs les plus rétrogrades. Un peu d'air frais en somme. À lire aussi, dans la même collection – "Des travaux et des jours" : Freudaines du même auteur.
Patrick Conrath

La psychiatrie, ça sert à quoi au juste ?
Chroniques de La Quinzaine
Roger Gentis
Erès, 2010
220 p.


Rêve ou cauchemar ?
31.01.11

Le rêve reste une source d'inspiration pour les artistes. A Paris, les Ateliers d'art de France invitent à découvrir diverses "chambres" du rêve, à travers l'imagination de quarante créateurs et artisans. En quatre lieux - L'Atelier Bastille, Collection Le Marais, Talents Etoile et Talents Opéra - cohabitent des oeuvres de papier, de verre, de céramique, de bois, de métal ou de tissu (Hybrids rouges, de Géraldine Gonzalez ; Curiosité, de Sophie Dalla-Rosa ; Des-Composition, d'Alexandre Bour). Les mots de Daniel Sibony, psychanalyste et écrivain, explorent et décrypte ce parcours onirique. Au fil de sa pérégrination, le visiteur passe d'un univers du rêve à l'autre. Le Marais a choisi la volupté ; à la Bastille, c'est l'éden ; à l'Etoile, c'est l'heure du réveil, de l'interrogation et de la recherche de sens. Quant au quartier de l'Opéra, c'est à croire que les fantômes y rôdent toujours : c'est le contre-pied de la thématique du rêve, le cauchemar, qui y est présenté, non sans humour.

Du 4 février au 26 mars.
Tél. : 01-44-01-08-30.
Sur le Web : Ateliersdart.com.


Melina Gazsi
"Les évadés du bocal"

Festival du 4 Mars au 3 Avril 2011 au bar-restaurant le Lieu-Dit, 6 rue Sorbier, Paris XXe


C’est avant tout une histoire de rencontres. De rencontres et d’ouverture à autre. Tout part d’une conversation, suivie de la proposition d’Hossein Sadeghi, le propriétaire du Lieu-dit, à une personne qu’il rencontrait pour la première fois, de mettre à disposition son lieu pour un événement politique sur l’art et la folie. Cette proposition engendra d’autres rencontres : entre des soignants en formation (Utopsy), des soignants révoltés (le collectif des 39), des artistes (collectif Pounchd), un collectif philosophique et radiophonique (Zones d’attraction), de Nouveaux cahiers pour la folie, un Théâtre du reflet… Ainsi est né le collectif des évadés du bocal.

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À quel réel répond le discours psychanalytique ?

Colloque de la Fondation européenne pour la psychanalyse
à l’hôpital Sainte-Anne à Paris
(amphithéâtre Raymond Garcin,
entrées 2 rue d’Alésia ou 1 rue Cabanis, 75014 Paris)

le 28 mai 2011, de 9h30 à 12h30 et de 14h30 à 18h
et le 29 mai de 9h30 à 13h


À quel réel répond le discours psychanalytique ?

Cette question a un présupposé, qui ne va pas de soi aujourd’hui. Dans le climat idéologique contemporain, les discours sont jugés à l’aune de leur vraisemblance et de leur supposée efficacité, plutôt que d’être confrontés au réel dont ils procèdent ou à celui qu’ils pourraient éclairer.

Le réel auquel renvoie la psychanalyse, c’est d’abord celui de l’inconscient. Mais ce qui pour nous constitue une évidence ne peut être soutenu qu’à travers un discours qui permette de le rendre appréhendable. Ce n’est d’ailleurs pas là seulement une contrainte sociale. La pratique de la cure elle-même ne nous fait atteindre ce réel – fût-il situable hors chaîne de discours – qu’à travers une pratique de parole et de langage. C’est le cas par exemple dans l’analyse du rêve, où le déchiffrage d’un désir vient faire pièce à la jouissance muette du réel qui s’y inscrit.

Reste qu’aujourd’hui, moins encore que naguère, la psychanalyse ne peut se désintéresser d’un autre réel, le réel social dans lequel le sujet se trouve pris. Si Lacan a pu dire que « l’inconscient c’est la politique » c’est que l’écho des bouleversements du vingtième siècle résonnait dans les cures que l’analyste avait à conduire. La situation d’aujourd’hui est certes différente. Mais l’ultra-libéralisme et les idéologies qui l’accompagnent ne sont pas sans effets subjectifs.

Un dernier questionnement concerne ici la question de ce que nous désignons comme « discours de la science ». Peut-être sommes nous allés un peu vite lorsque nous avons, à travers cette thématique, contribué à donner l’image d’une forme de pensée qui entraînait nécessairement une « forclusion » du sujet. Mais si la science a son propre réel, auquel elle s’affronte, la frontière est parfois mince, dans le champ de ce qu’on appelle sciences humaines, entre science et idéologie. Et que dire de la psychiatrie contemporaine, qui se cantonne à une démarche empiriste et pragmatique ?

Responsables du colloque Roland Chemama et Christian Hoffmann

Est déjà prévue la participation de : Sidi Askofaré, Graziella Baravalle, Gorana Bulat-Manenti, Roland Chemama, Marcel Czermak, Christian Hoffmann, Laura Kait, Jacques Leibowitch, Rosa Navarro, Gérard Pommier, Moustapha Safouan, Alain Vanier


Inscription sur place, 60 euros, membres de la fondation 40 euros, étudiants 20 euros
Soins aux étrangers : les associations s’inquiètent

Après les restrictions apportées à l’aide médiale d’Etat (AME) fin 2010, plusieurs associations et médecins se sont inquiétés lundi du projet de loi sur l'immigration qui sera examiné mardi par le Sénat, qui pourrait restreindre la possibilité de droit au séjour pour les personnes sans papiers lorsqu'elles sont atteintes de pathologies graves. Ce projet de loi relatif à l'immigration a déjà été adopté par l'Assemblée nationale. Le texte initial prévoyait dans son article 17ter de restreindre le droit au séjour pour raisons médicales, qui permet aux étrangers résidant en France et atteints d'une pathologie grave (cancer, diabète, VIH, hépatites, troubles psychiatriques, etc.), de bénéficier d'un titre de séjour et d'une prise en charge médicale, lorsqu'ils «ne peuvent effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans leur pays d'origine». Un amendement déposé par le gouvernement proposait de remplacer la condition de «non-accès effectif au traitement approprié» par une «indisponibilité du traitement approprié» dans le pays d'origine, un terme beaucoup plus flou et «sujet à caution», que dénoncent la sénatrice Alima Boumedienne-Thiery (Europe Ecologie-Les Verts) et l'Observatoire du droit à la santé des étrangers (ODSE). Willy Rozenbaum, président du Conseil national du Sida (CNS) et François Bourdillon, président de la société française de santé publique (SFSP) se sont également élevés contre ce texte.
Soins des maladies mentales : faut-il une nouvelle loi ?

Pour des états généraux de la psychiatrie


Par Marie-Agnès Letrouit, ex-directrice de recherche au CNRS, et Paul Cossé, docteur en médecine, 
tous deux membres de l’association France-Schizophrénie (*).

Dans son exposé des motifs, le projet de loi relatif aux droits et à la protection des personnes handicapées en raison de troubles mentaux affirme vouloir «lever les obstacles à l’accès aux soins et garantir leur continuité sans remettre en question les fondements des dispositifs actuels». Il propose de remplacer la notion d’«hospitalisation» par celle de « soins sans consentement», y compris en dehors de l’hôpital.

L’ignorance du public, la peur des soins en psychiatrie sont un frein. Des pratiques médicales fautives, dont le refus de soigner les patients incapables de se savoir malades et donc de demander des soins, en sont un autre. Enfin une loi spécifique à la psychiatrie qui, loin de favoriser l’accès aux soins comme on aurait pu le croire, comparativement à la loi générale, ne fait que le compliquer, l’empêcher et de toute façon le retarder. Pourtant, l’article L.1111-4 du Code de santé publique précise comment des soins peuvent être donnés à toute personne incapable d’y consentir. Par ailleurs, le maintien d’une loi spécifique conduit à des incohérences. Ainsi, pour une même maladie, Alzheimer par exemple, il y aura déclenchement du processus « psychiatrie » en cas d’hospitalisation en établissement de santé mentale. Au contraire, en service de gérontologie de l’hôpital général, il y aura hospitalisation ordinaire.

En 1838, les asiles d’aliénés étaient des lieux de « placement » des personnes vulnérables. Et dans l’esprit du public s’opère encore le glissement : placement = enfermement = atteinte à la liberté des personnes = atteinte aux droits de l’homme. D’où l’ambition des législateurs de résoudre simultanément deux problèmes : faire accéder aux soins les malades incapables d’y consentir et rendre impossibles les « hospitalisations abusives ». Or, celles-ci sont de purs fantasmes ! Les commissions départementales des hospitalisations psychiatriques (CDHP), dont le rôle est précisément de surveiller leur régularité, en font largement la preuve. Seules des fautes de procédure dans les modalités compliquées d’hospitalisations ont pu être relevées et même utilisées pour saisir la justice et faire condamner l’État sur des défaillances inévitables au regard des méandres juridiques.

Du fait du dispositif actuel propre à l’hospitalisation psychiatrique, nous constatons quantité de suicides, d’accidents, de délits qui auraient pu être évités si on avait cessé de gêner l’accès des malades mentaux aux soins les plus précoces possible recommandés par les congrès de psychiatrie. Est-il admissible d’attendre parfois le trouble à l’ordre public pour que médecins, policiers, pompiers se posent la question d’intervenir et de conduire enfin le patient en pleine crise aux urgences psychiatriques, alors que les soins qui étaient nécessaires étaient demandés depuis longtemps ? La Haute Autorité de santé l’affirme : « Il est recommandé de se référer aux critères cliniques et de recourir à l’hospitalisation sans consentement si son refus d’hospitalisation peut entraîner une détérioration de l’état du patient ou l’empêcher de recevoir un traitement approprié. » Nous sommes en désaccord avec ceux qui demandent que tout soin sans consentement relève de l’autorisation d’un juge judiciaire. Que diable un juge a-t-il à voir avec la nécessité de soins ? Il ne pourrait que demander l’avis d’un psychiatre et cela ralentirait de façon drastique les soins urgents et indispensables à l’hôpital et hors hôpital dont des centaines de milliers de malades ont besoin pour recouvrer une liberté que la maladie leur interdit. Sans compter que la justice n’arrive pas à faire son travail ordinaire.

Nous aurions préféré la suppression de toute loi spécifique et nous proposons, avec d’autres, la tenue d’états généraux de la psychiatrie. Quoi qu’il en soit, s’il doit y avoir une nouvelle loi, elle sera ce que sa mise en pratique en fera. Le risque existe qu’elle ne soit prétexte à enrichir l’arsenal « sécuritaire » du pouvoir. Nous devons nous employer à désamorcer toute tentative contre-productive et dangereuse de cette nature. Le débat aux deux Assemblées devrait y contribuer en conservant les mesures simplifiant l’accès aux soins à et hors l’hôpital et en se focalisant sur son amélioration : rôle des Samu, programmes post-hospitalisations, formation de ceux qui hébergent les malades, programmation annuelle de diminution des malades à la rue, en prison et de ceux qui font la navette avec l’hôpital. Les parlementaires doivent être accompagnés par la mobilisation des professionnels et des usagers.

(*) www.schizo-oui.com ; contactschizo@free.fr

Schizo ?… oui ! Faire face à la schizophrénie, bât. D, 54, rue Vergniaud, 75013 Paris. Tél. : 01 45 89 49 44.
Marie-Agnès Letrouit
Les malades mentaux ne sont peut-être pas plus nombreux en prison, mais ils y restent plus longtemps
14/05/2010     

Évoquant l’incarcération de plus en plus fréquente et problématique de personnes souffrant de maladies mentales, le médecin chef du service médico-psychologique régional (SMPR) de la prison de Fresnes, Christiane de Beaurepaire n’avait pas hésité à déclarer en juillet 2006 : « La prison sert de cache misère. C’est bien l’asile du XIXe siècle où se mêlaient les fous, les criminels et les pauvres », décrivait-elle. Quatre ans plus tard, les sénateurs auteurs d’un rapport intitulé « Prison et troubles mentaux : comment remédier aux dérives du système français », rendu public cette semaine, dressent un bilan similaire : « Le constat est alarmant » ont-ils tonné.

8 % de schizophrènes en prison, contre 1 % dans la population générale

De fait, les chiffres rappelés par Jean-René Lecercf (UMP), Jean-Pierre Michel (PS), Christiane Demontès (PS) et Gilbert Barbier (divers gauche) révèlent la forte proportion de détenus atteints de troubles mentaux. Ainsi, 8 % des prisonniers souffriraient de schizophrénie, tandis que les sénateurs observent que « la proportion de personnes atteintes de troubles mentaux les plus graves (schizophrénie ou autres formes de psychoses) pour lesquelles la peine n’a guère de sens, représenterait 10 % de la population pénale ». Les sénateurs rapportent en outre que 39,2 % des détenus seraient atteints de dépression, notent que 31,2 % souffrent d’anxiété généralisée, alors que l’addiction aux substances illicites touche 38 % des personnes incarcérées et l’alcoolisme 30 %.

Envoie-t-on vraiment plus de malades mentaux en prison ?

Au-delà de ces statistiques, les sénateurs ont souhaité déterminer si la proportion de détenus atteints de troubles mentaux majeurs avait réellement progressé ces dernières années. En dépit de l’impression dominante exprimée par les experts, qui tendent à répondre par l’affirmative, « faute de statistiques, ce sentiment ne s’appuie sur aucune donnée objective » remarquent les sénateurs. Ces derniers mettent cependant en avant une série d’arguments qui confortent ce point de vue. Ils s’intéressent notamment aux conséquences de la réforme du principe de l’irresponsabilité pénale de 1993. Une distinction entre l’abolition du discernement qui aboutit à décréter le prévenu irresponsable et l’altération du discernement qui « n’exonère pas l’auteur des faits de sa responsabilité » avait été établie. En 2003, le même Sénat affirmait que cette refonte du code pénal avait entraîné une diminution très importante du nombre de cas d’irresponsabilité pénale. Le Palais du Luxembourg affirmait alors que si 17 % des prévenus étaient déclarés totalement irresponsables dans les années 80, ils n’étaient plus que 1 % en 1997. Le diagnostic diffère aujourd’hui. Il semble que si « le nombre de non-lieux a baissé en valeur absolue, la part de ceux motivés par l’article 122-1 (définissant la notion d’irresponsabilité pénale, ndrl) est restée stable (5 % du total) » écrivent les sénateurs de 2010.

Maladie mentale : une circonstance aggravante


La réforme n’a cependant pas été sans influence. En effet, dans l’esprit du législateur, si le principe « d’atténuation du discernement » ne devait pas permettre au suspect d’échapper à un procès, il devait coïncider avec un allégement ou tout du moins un aménagement de la peine. Or, c’est la situation inverse qui s’est imposée : « l’altération du discernement (…) a constitué en pratique (…) un facteur d’aggravation de la peine allongeant la durée d’emprisonnement de personnes atteintes de troubles mentaux ». De façon plus explicite, les sénateurs, lors de leur conférence de presse, ont remarqué que les jurys avaient tendance à considérer la prison comme « le lieu le plus sûr » pour protéger la société d’éventuels nouveaux passages à l’acte. Aussi, dans leurs recommandations, les sénateurs estiment que doit être « conservée la distinction entre abolition et altération du discernement » mais que doit être « prévue explicitement l’atténuation de la peine en cas d’altération ». En tout état de cause, les sénateurs sont loin de recommander une restriction de l’application du principe d’irresponsabilité pénale, alors qu’une telle tendance aurait pu séduire au plus haut sommet de l’Etat.

Chambres d’hospitalisation : une cellule comme une autre

Au-delà des effets de la réforme de la responsabilité pénale, les sénateurs évoquent les conséquences de « la réduction de l’offre de soins psychiatriques en hospitalisation complète ». Le nombre de lits est en effet passé entre 1985 et 2005 de 129 500 à 89 800 lits. Connaissant cette situation critique, les experts seraient tentés de « refuser l’irresponsabilité d’auteurs d’infractions afin d’éviter de mobiliser un lit d’hospitalisation ». Les sénateurs dénoncent enfin le fait que les expertises ne soient « quasiment jamais mises en œuvre dans le cadre des procédures rapides de jugement, notamment la comparution immédiate qui concerne un nombre croissant de délits (près de 11 % des jugements en 2006) ». Si cette situation doit être dénoncée, c’est, martèle le rapport que la prison n’est nullement le lieu adapté pour des patients atteints de maladie mentale. Ils observent par ailleurs que les solutions mises en place ne sont pas toujours optimales : ils soulignent notamment comment dans « une majorité de SMPR, les chambres d’hospitalisation ne se différencient pas réellement des cellules de détention ».

La prison doit devenir plus séduisante pour les soignants

Aussi ont-ils établi une série de proposition, dont certaines semblent déjà avoir été entendues par le ministre de la Santé. Ils appellent en effet à une réforme rapide de la loi de juin 1990 sur l’hospitalisation d’office, or on sait que celle-ci est déjà engagée. Par ailleurs, ils invitent à renforcer la formation et l’offre en psychiatrie. Déjà, le 19 avril dernier, au lendemain de la prise en otage par un détenu d’un médecin de la prison de la Santé pendant quelques heures, Roselyne Bachelot avait annoncé qu’un plan dédié à la santé en prison allait être adopté et qu’il aurait notamment pour vocation « d’améliorer l’attractivité des métiers de la santé en milieu pénitentiaire ». Le ministre avait dans cette même lignée affirmé que : « Des opérations d’information auprès des étudiants seront amenées à se multiplier pour changer l’image des métiers de santé en milieu carcéral ». De leur côté, les sénateurs appellent à la création d’un « diplôme d’études spécialisées complémentaire en psychiatrie médico-légale ». Ils savent cependant que c’est l’ensemble de l’offre en psychiatrie qui doit être augmentée. En effet, « depuis 1997, les effectifs médicaux et soignants n’ont progressé que de 21,45 % en psychiatrie contre 108,3 % pour les soins somatiques » remarquent-ils. Aussi suggèrent-ils de « créer une spécialisation de niveau master en psychiatrie pour les infirmiers ».
Aurélie Haroche