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dimanche 26 novembre 2023

« Psychiatre est un métier d’engagement, de valeurs, de passion et pourtant méconnu »


 




Publié le 24 novembre 2023

Alors que les maladies mentales touchent un Français sur cinq, et que la psychiatrie est une discipline en pleine mutation, des spécialistes et des étudiants déplorent, dans une tribune au « Monde », le manque d’attractivité de leur profession.

Le ministre de la santé et de la prévention, Aurélien Rousseau, à l’université de la Confédération des syndicats médicaux français, le 6 octobre, interpellait les étudiants choisissant la chirurgie plastique aux dépens de la psychiatrie. Il faisait notamment référence au fait que notre spécialité arrive dans les dernières choisies aux épreuves classantes nationales de médecine. En 2023, sur 547 postes à pourvoir, la spécialité a laissé 67 places vacantes, 67 occasions de construire un système de soins moderne, humain et adapté aux enjeux d’aujourd’hui. Chacun peut et doit choisir son métier par envie. Nous pensons surtout que le problème vient d’une méconnaissance profonde du nôtre et de son utilité.

Les chiffres sont parlants. Un Français sur cinq est touché par des troubles psychiatriques, et sept personnes sur dix déclarent avoir besoin de prendre soin de leur santé mentale, selon l’enquête CoviPrev menée par Santé publique France depuis 2020, avec souvent des difficultés à le faire. Globalement, les prévalences des troubles psychiatriques en population générale sont massives : c’est 1 % de troubles schizophréniques, 1,5 % de troubles bipolaires, 10 % de troubles dépressifs et autant d’anxiété, sans oublier les troubles du neurodéveloppement qui touchent plus de 10 % de la population, ou encore les troubles post-traumatiques et les pathologies addictives. Chacun d’entre nous peut être concerné directement ou indirectement. Et l’impact dans une famille ou une communauté professionnelle des troubles psychiatriques est souvent majeur et déstabilisant. C’est dire combien le métier de psychiatre est un métier d’avenir.

Certes, les difficultés de notre système de santé sont multiples et la santé ne va pas bien, tout particulièrement la santé mentale, comme de nombreux articles, tribunes et rapports s’en sont fait l’écho à répétition ces dernières années. Quinze mille psychiatres sont actuellement en exercice, dont 2 000 en psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent ; mais près de 25 % d’entre eux (3 600, selon la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques) ont plus de 65 ans, et beaucoup de postes hospitaliers restent non pourvus avec des disparités territoriales importantes. Les défis qui se posent à nous sont nombreux et complexes. Nous savons pourtant que notre spécialité possède la dynamique, l’esprit d’innovation et que ses acteurs ont les qualités d’engagement pour relever ces enjeux collectifs.

Le patient, l’acteur central de ses soins

Le métier de psychiatre est passionnant et s’est profondément renouvelé ces dernières années, sans que cela fasse la « une » de l’actualité. Les psychiatres sont aujourd’hui en mesure de soigner efficacement les patients à tous les âges de la vie. Nos multiples thérapeutiques médicamenteuses ont des niveaux d’efficacité parmi les plus importants, tous domaines médicaux confondus. Un seul exemple : le traitement de la dépression, l’une des pathologies les plus fréquentes en France et dans le monde, touchant jusqu’à une personne sur cinq, s’est largement amélioré avec des soins psychothérapiques, pharmacologiques et physiques (activité physique, techniques de stimulation électrique…) plus efficaces et innovants.

Avec les proches, les aidants et les associations, nous sommes attentifs au projet et à la qualité de vie de chaque patient, aux conditions de son rétablissement et nous considérons les personnes dans leur autonomie et leur globalité. Pour nous, chaque patient est l’acteur central de ses soins. La psychiatrie est constamment au cœur des réflexions éthiques, philosophiques et sociétales.

Nos réflexions sur l’organisation des soins amènent à des innovations incluant le numérique, des parcours de vie simplifiés et accessibles ainsi qu’un accompagnement thérapeutique plus précoce et inclusif des patients.

La recherche a aussi progressé de façon spectaculaire sur la compréhension des troubles psychiatriques et de leurs traitements, à tel point que certains psychiatres parlent de révolution. De nombreux projets prometteurs sont en cours en matière de prévention, de diagnostic et de soins : les regroupements territoriaux de recherche dans les Hauts-de-France, en Occitanie, en Ile-de-France ou encore dans le Grand Ouest associant CHU et hôpitaux non universitaires ; l’obtention, pour la première fois, par la psychiatrie, d’un des programmes et équipements prioritaires de recherche (PEPR) du plan d’investissement France 2030 du gouvernement et la dynamique de nos chercheurs dans les appels à projets nationaux et européens sont autant de signes très positifs et encourageants. La recherche française en psychiatrie est reconnue et de haut niveau ; elle s’accélère et doit être soutenue.

Nous, psychiatres, enseignants et étudiants, sommes convaincus, au moment de bâtir une société en meilleure santé, que notre rôle est crucial pour les patients d’aujourd’hui et de demain. Psychiatre est un métier d’engagement, de valeurs et de passion. Il permet une grande variété pratique et est largement impliqué dans les transformations sociétales et technologiques actuelles.

Rendez-vous le 23 janvier 2024 pour le lancement d’une campagne d’information associant les médias, les réseaux sociaux, un film, une enquête auprès des étudiants et du grand public ainsi que des événements, permettant de découvrir la psychiatrie et le métier de psychiatre sous toutes ses formes.

Aux étudiants et futurs médecins, nous disons #choisirpsychiatrie !

Olivier Bonnot, secrétaire général du Collège national des universitaires de psychiatrie (CNUP) ; Jérémy Darenne,président de l’Association nationale des étudiants en médecine de France (Anemf) : Nicolas Doudeau, président de l’Association française fédérative des étudiants en psychiatrie (Affep) ; Pierre Vidailhet, président du CNUP.


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