PAR
ANNE BAYLE-INIGUEZ -
PUBLIÉ LE 19/12/2019
Crédit photo : PHANIE
Le contrôle de 675 praticiens exerçant une médecine non conventionnelle a permis à la répression des fraudes de révéler pour deux tiers d'entre eux au moins un manquement à la loi. C'est le résultat édifiant de l'investigation menée en 2018 par la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) auprès de professionnels vendant leurs services de naturopathes, aromathérapeutes, hypnothérapeutes, acupuncteurs, auriculothérapeutes et réflexologues.
Allégations thérapeutiques non justifiées
L'enquête de la répression des fraudes visait à « contrôler la loyauté des pratiques commerciales et le respect de leurs obligations par des professionnels pratiquant des médecines non conventionnelles », également appelées « alternatives », « parallèles », « naturelles » ou « douces » et qui regroupent « plusieurs centaines de pratiques », lit-on dans la fiche pratique publiée mercredi 18 décembre sur le site de la DGCCRF. Il s'agit de professionnels « issus pour la plupart du secteur de la santé » (infirmiers, aides-soignants, etc.) reconvertis en auto-entrepreneurs.
Les contrôles ont porté sur le respect des règles en matière d’information sur les tarifs et sur la nature des prestations proposées.
La répression des fraudes a donc relevé « majoritairement » des défauts d’information mais aussi des pratiques commerciales trompeuses (« allégations thérapeutiques ou "de santé", non justifiées par les professionnels, qualifications mises en avant susceptibles d’induire en erreur ou non justifiées ») voire « présentant des risques pour les patients », car « pouvant entraîner une perte de chance liée au non-recours des patients à des soins médicaux ».
Plus grave, près d'une quinzaine de signalements ont été transmis au procureur de la République pour « exercice illégal de la médecine » ou « usurpation de titres ».
Huiles essentielles
La DGCCRF dresse un portrait peu amène des adeptes des médecines non conventionnelles. Ces praticiens – à aucun moment la répression des fraudes ne les nomme médecins – consultent individuellement ou en cabinet multidisciplinaire « afin de mutualiser leurs moyens ». La quasi-totalité d'entre eux ont suivi, avant d’exercer, « des formations de nature très variable, allant du simple week-end (en présentiel ou à distance) à plusieurs années de scolarité ». Certains commercialisent « des produits aux allégations thérapeutiques ou encore des compléments alimentaires ou des huiles essentielles ».
Mais surtout, les « revendications d'ordre médical » utilisées par certains praticiens de médecines douces « peuvent s'avérer dangereuses car elles sont susceptibles de détourner le consommateur de la consultation d'un professionnel de santé ou du suivi d'un traitement conventionnel pour une pathologie grave », peut-on lire.
Les naturopathes se structurent
Le patient trouve une offre de médecine non conventionnelle plus ou moins dense selon les territoires. La DGCCRF a noté une concentration dans la Loire en raison de la présence d’une antenne de l’Académie européenne des médecines naturelles à Saint-Étienne et du Centre de soins naturels à Chazelles-sur-Lyon. Le même phénomène se retrouve en Côte-d’Or du fait de l’implantation de la faculté libre de naturopathie, qui forme près de 200 professionnels par an.
Les experts remarquent une volonté des professionnels de « se structurer progressivement », notamment dans le secteur de la naturopathie via l’Organisation de la médecine naturelle et de l’éducation sanitaire (OMNES) et un réseau d’établissements privés encadré par la Fédération française des écoles de naturopathie (FENA).
Enfin, la répression des fraudes revient sur la reconnaissance de certaines de ces pratiques. Selon les pays, les médecines non conventionnelles sont reconnues ou seulement tolérées. Certains pays exigent toutefois un titre médical ou paramédical pour la pratique de certaines approches. « En France, l’acupuncture et l’homéopathie ont été reconnues comme des pratiques pouvant être pratiquées par certains professionnels de santé, développent les experts. Le titre professionnel d’ostéopathe a été reconnu, de même que celui de chiropracteur, par la loi du 4 mars 2002. Cependant, ces reconnaissances de titres professionnels ne sont pas pour autant des validations de ces théories. »
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