Une étude menée conjointement par l’ANRS, AIDES, Médecins du Monde et l’INSERM apporte des éléments en faveur de l’accompagnement et de l’éducation à l’injection des usagers de drogues. Elle évalue pour la première fois l’impact d’un accompagnement et d’une éducation à l’infection délivrée par des pairs sur les pratiques à risque de transmission du VIH et du VHC.
L’étude ANRS AERLI (Accompagnement et éducation aux risques liés à l’injection) menée les Centre d’accueil et d’accompagnement à la réduction des risques pour les usagers de drogues (CAARUD) dans 14 villes de France a inclus 240 usagers de drogues par voie intraveineuse : 113 recrutés dans 8 centres ; un groupe témoin de 127 consommateurs comparables en termes d’histoire d’injection de drogues, d’âge et de sexe, a été recruté dans 9 autres centres.« Généralement, il s’agit de personnes très précarisées, voire marginalisées, polyconsommateurs ayant des pratiques à risque », commente Perrine Roux (INSERM U912, Marseille).
Une baisse d’environ 40 %
Dans le groupe d’intervention, les usagers ont bénéficié de plusieurs sessions individualisées d’environ une heure se déroulant selon un protocole standardisé. « Les usagers devaient prendre rendez-vous. La session était menée soit un professionnel de santé du centre, soit par un pair, usager lui-même mais formé à ce type d’intervention », explique Perrine Roux. Lors d’une première séance, l’usager est invité à pratiquer son injection comme il en a l’habitude, l’intervenant se contente d’observer. Un débriefing sur la pratique (préparation du produit, recherche d’une veine, injection elle-même) associé à des conseils de prévention (matériel stérile...) sont réalisés dans un second temps. Les usagers ont tous été interrogés au moment de leur inclusion puis 6 et 12 mois plus tard.
Les résultats présentés en communication orale lors du Congrès international sur le sida de Melbourne montrent une diminution de 43 % des pratiques à risque de transmission du VHC. En effet, 44 % des consommateurs ont déclaré au moins une pratique à risque avant l’intervention ; ils n’étaient plus que 25 % à le faire six mois après. Le risque de complications au niveau du site d’injection (causes fréquentes de recours aux urgences) est également en baisse de 41 % - 66 % des consommateurs avaient déclaré des complications avant l’injection contre 39 % 12 mois après).
Appel à la généralisation
Ce dispositif différent de la salle d’injection de drogues, structure qui devait être mise en place à Paris mais dont l’ouverture fait débat, en est« complémentaire ». « On pourrait envisager que l’éducation à l’injection puisse être proposée dans les salles de consommation », souligne Perrine Roux.
En attendant, les associations qui militent pour cette éducation par les pairs, d’un coût peu élevé et facile à mettre en place dans les CAARUD, plaide pour sa généralisation rapide sur l’ensemble du territoire. « On estime aujourd’hui que plus des deux tiers des usagers de drogues par injection sont porteurs de l’hépatite C, dont une grande partie l’ignore. Le temps n’est pas à la tergiversation ou aux considérations idéologiques. Nous sommes dans un contexte d’urgence sanitaire, il faut agir, et agir vite », explique Bruno Spire, président de AIDES. L’association appelle à la mise en place rapide d’un cadre réglementaire autorisant le déploiement de l’éducation aux risques liés à l’injection.
Dr Lydia Archimède
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire