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mardi 8 avril 2014

Positions du CRPA sur la "personne de confiance" dans les soins psychiatriques non consentis

 |  PAR ANDRÉ BITTON

Intervention au colloque organisé par la FNAPSY sur « la Personne de confiance » - « décider pour soi-même, mythe ou réalité », le vendredi 4 avril 2014, au Ministère des affaires sociales et de la santé, salle Laroque. 


Positions du CRPA sur la personne de confiance dans les soins psychiatriques.
                 
1°) L’article L 1111-6 du code de la santé publique instaure la « personne de confiance ».

Je préfère commencer cet exposé par le rappel des termes eux-mêmes de l’article L 1111-6 du code de la santé publique, sur la personne de confiance, issu de la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades : 
« Toute personne majeure peut désigner une personne de confiance qui peut être un parent, un proche ou le médecin traitant, et qui sera consultée au cas où elle-même serait hors d’état d’exprimer sa volonté et de recevoir l’information nécessaire à cette fin. Cette désignation est faite par écrit. Elle est révocable à tout moment. Si le malade le souhaite, la personne de confiance l’accompagne dans ses démarches et assiste aux entretiens médicaux afin de l’aider dans ses décisions.
Lors de toute hospitalisation dans un établissement de santé, il est proposé au malade de désigner une personne de confiance dans les conditions prévues à l’alinéa précédent. Cette désignation est valable  pour la durée de l’hospitalisation, à moins que le malade n’en dispose autrement.
Les dispositions du présent article ne s’appliquent pas lorsqu’une mesure de tutelle est ordonnée … »
  
2°) « Personne de confiance » librement choisie et « personne de confiance » institutionnelle. 
Un échange de mails entre Mme Claude Finkelstein, qui était alors présidente de la FNAPSY, et moi-même, le 11 juillet 2013, faisant suite à l’audition du CRPA, entre autres organisations, par le député M. Denys Robiliard, en qualité de rapporteur de la proposition de loi du 3 juillet 2013 sur les soins psychiatriques, résume notre propos :
Mme Claude Finkelstein dans ce mail du 11 juillet 2013 : « Nous vous remercions d’avoir accepté d’intervenir lors de notre colloque sur la personne de confiance pour présenter les positions du CRPA. A notre connaissance  vous êtes la seule organisation à s’être positionnée sur ce sujet, et c’est à ce titre que nous vous l’avons proposé.
J’ai lu attentivement votre mail et j’ai été très étonnée de votre affirmation concernant une position commune, je pense qu’il s’agit d’un simple malentendu : nos organisations défendent toutes les deux un dispositif de « personne de confiance » pour apporter un accompagnement aux personnes hospitalisées sans consentement, dispositif à nos yeux indispensable.
Cependant notre vision de la « personne de confiance » diffère de la vôtre. Nous estimons – vous m’avez entendue lors des journées UNAFAM – que le dispositif hollandais [de l’Ombudsman, ou médiateur] serait adaptable à notre société : une personne de confiance mise à la disposition de toute personne internée … ».
On voit donc l’affirmation, ainsi posée, de deux conceptions de la personne de confiance en matière psychiatrique, singulièrement dans l’hospitalisation sans consentement. La nôtre qui est celle d’une « personne de confiance » librement désignée et choisie, sans qu’elle soit institutionnelle. Celle défendue par la FNAPSY d’une « personne de confiance » institutionnelle, mise à disposition par l’établissement hospitalier, pour toute personne hospitalisée sans son consentement.
Nous ne sommes pas partisans de l’option de la « personne de confiance » institutionnelle, pour les raisons que j’expose dans la présente intervention.
Notre désaccord porte essentiellement sur le fait que, selon nous, l’esprit et la lettre de l’article L 1111-6 du code de la santé publique, issu de la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades doivent être préservés, afin qu’il n’y ait pas, sur le terrain psychiatrique, une exception créée qui diminuerait les droits fondamentaux des patients en psychiatrie
Notre désaccord est également basé sur le fait qu’à notre sens, les associations d’usagers actuellement habilitées à siéger dans les établissements psychiatriques, ou généraux incluant des secteurs de psychiatrie générale, sont par trop dépendantes de la hiérarchie hospitalière, des familles et de leurs représentants, ainsi que des services étatiques et de l’administration centrale.
Ce manque d’indépendance et l’état de sujétion des associations de patients en psychiatrie agréées par les pouvoirs publics, nous semblent former un obstacle fondamental qui ne peut qu’obérer la mise en œuvre de ce projet d’une « personne de confiance » institutionnelle, dans lequel les « médiateurs de santé-pairs », initiés par le Centre collaborateur de l’Organisation mondiale de la santé – EPSM de Lille Métropole, pourraient se requalifier, vu l’échec partiel, mais néanmoins important de ce programme expérimental des médiateurs de santé pairs tel qu’il a été conçu et mis en œuvre.
Plus grave, une telle institutionnalisation de la « personne de confiance », sous la dépendance de l’établissement d’accueil – cette « personne de confiance » serait dès lors un agent hospitalier en relation de subordination par rapport à la hiérarchie hospitalière - conduirait tout droit à la consécration en droit français, d’un statut d’incapable de fait, pour les personnes hospitalisées sans leur consentement en psychiatrie, avec une minoration et une diminution des droits courants mais aussi des droits fondamentaux des patients hospitalisés en psychiatrie, dans l’accès au droit, à l’information sur le projet médical et ses conséquences, au tiers de confiance, alors même que la loi du 4 mars 2002 - qui du reste contient des clauses de non applicabilité dans les cas de l’urgence et de la maladie mentale avec incapacité du consentement aux soins - ne prévoit pas, à juste titre selon nous, de dérogation sur la « personne de confiance »,  propre au champ psychiatrique.
La mise sur pieds, pour le terrain de l’hospitalisation sans consentement d’une « personne de confiance » institutionnelle, sous la dépendance hiérarchique de la direction de l’établissement d’accueil, mais aussi sous celle du service médico-psychiatrique, qui consacrerait ainsi une « impossibilité » de libre désignation d’une « personne de confiance », porterait une atteinte – illégale selon nous – au principe d’égalité des citoyens devant la loi.  Des dispositions réglementaires (une circulaire ministérielle ou un décret) qui mettraient en œuvre un tel schéma pourraient être attaquées en annulation devant le Conseil d’Etat, du fait de cette rupture d’égalité devant la loi.
Sur ce point, nous maintenons donc notre revendication de l’application du principe du droit commun posé par la loi du 4 mars 2002, de libre désignation de la « personne de confiance » selon le choix du patient hospitalisé en psychiatrie, ainsi que la mise à effet de ce que prévoit sur ce plan l’article L 1111-6 du code de la santé publique par une circulaire ministérielle rappelant aux établissements médicaux accueillant des personnes hospitalisées sans leur consentement les possibilités et pouvoirs d’intervention des personnes de confiance librement désignées par les patients.
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