Le niveau de vie des Français en chute
6 septembre 2012
Crise. La baisse des revenus des ménages en 2010 n’a pas concerné les 5% les plus riches, selon l’Insee.
Durs lendemains de crise. Ou comment la récession de 2009 (-3% du produit intérieur brut en France) a eu des conséquences sur le niveau de vie des Français cette année-là, mais aussi, et surtout, l’année suivante…
Selon une étude rendue publique hier par l’Insee, le niveau de vie médian (1) des ménages français (la moitié disposant de plus, l’autre de moins) n’a progressé que de 0,4% en 2009, contre 1,7% par an en moyenne entre 2004 et 2008. En 2010, il a carrément diminué, chutant de 0,5%.«Il faut remonter à 2004 pour enregistrer un tel recul», note l’Insee.
Favorisés. Ainsi, «malgré un contexte de reprise économique en 2010, certes modérée, pratiquement toutes les catégories de la population subissent une baisse de niveau de vie», relève l’institut. Toutes ? Enfin presque. Et pas dans les mêmes proportions. Alors que le bas de l’échelle a vu, dans son premier tiers, ses revenus reculer de 1,3% à 1,6%, ils n’ont diminué que de 0,3% pour le dernier décile (les 10% les plus aisés). Mieux, les 5% les plus favorisés ont même connu une hausse de 1,3% de leur niveau de vie.
Conséquences : les inégalités se sont accrues en France en 2010, alors qu’elles s’étaient stabilisées (en dehors des très hauts revenus) depuis 2006. Le rapport entre le premier décile (10% les plus pauvres) et le dernier décile (10% les plus riches) est ainsi passé de 1 à 3,5, contre 1 à 3,4 un an auparavant. Par ailleurs, le rapport entre la «masse» des revenus détenus par les 20% de personnes les plus aisées et celle des 20% les plus pauvres a glissé de 4,3 à 4,5 en un an.
En cause, pour les 10% les plus modestes : la baisse du poids des salaires dans le revenu disponible, le recul de l’emploi, et la hausse «limitée» du Smic sur cette période. En revanche, pour les 10% les plus aisés, «les salaires sont plus dynamiques […], en particulier dans le secteur financier». Un phénomène auquel s’est ajoutée, pour les revenus du patrimoine, une hausse des rendements des placements les plus risqués.
Autre mauvaise nouvelle pour 2010 : le nombre de personnes vivant sous le seuil de pauvreté (60% du revenu médian, soit 964 euros par mois cette année-là) a atteint 8,6 millions.
Le taux de pauvreté est ainsi passé de 13,5% de la population en 2009 à 14,1% l’année d’après. Une hausse moins due aux chômeurs qu’aux retraités (11% de l’accroissement du nombre de personnes pauvres), aux adultes inactifs autres qu’étudiants (16%), et surtout aux… enfants (63%). La pauvreté touche ainsi 19,6% des moins de 18 ans, contre 17,7% en 2009.
Globalement, ce sont les familles monoparentales et les couples avec enfants qui ont été particulièrement frappés par la pauvreté en 2010.«Cette évolution spécifique constitue en fait un contrecoup de 2009, année durant laquelle deux éléments avaient contribué à contenir la hausse du taux de pauvreté», écrivent les auteurs de l’étude.
Arrêt brutal. En effet, deux primes exceptionnelles avaient été versées en 2009 aux ménages dans le cadre du plan de relance et n’ont pas été renouvelées en 2010. Par ailleurs, la revalorisation des prestations familiales avait été surévaluée par rapport à l’inflation, si bien qu’aucune revalorisation n’est intervenue en 2010. Reste qu’en 2009, le taux de pauvreté était déjà, malgré tout, passé de 13% de la population à 13,5%.
Cette étude de l’Insee montre que, si les mesures prises au plus fort de la crise en 2009 ont permis de «limiter la casse», leur arrêt brutal l’année suivante - ainsi que des politiques fiscales à contre-courant - n’a fait que repousser la baisse des niveaux de vie et la hausse des inégalités. Amer bilan.
(1) Le niveau de vie correspond au revenu disponible des ménages (prestations sociales incluses et après paiement des impôts), divisé par le nombre d’unité de consommation (UC) du ménage, afin de prendre en compte les économies d’échelle. Le premier adulte vaut 1 UC, les autres 0,5 et les enfants de moins de 14 ans 0,3.
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