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Articles, témoignages, infos sur la psychiatrie, la psychanalyse, la clinique, etc.

samedi 19 février 2011

Quand le jeu vidéo fait du bien
11.02.11

"La pratique de certains jeux vidéo, jugés violents ou choquants, par des jeunes – public sensibles et fragiles – pose question. Ces contenus sont d'autant plus problématiques qu'ils font souvent l'objet d'une consommation solitaire, fragmentée, répétée et active, qui favoriserait une imprégnation plus forte et l'induction de comportements agressifs. Certains redoutent que l'intensification des pratiques ne débouche sur des formes d'addiction." Cet extrait d'une note datée de novembre 2010 du Centre d'analyse stratégique, organisme rattaché à Matignon, résume en quelques mots les principaux reproches faits aux jeux vidéo : violence, désocialisation, addiction… Au point que l'organisme d'Etat se questionne sur une possible régulation de ce loisir.

Pourtant, certains psychologues et psychanalystes estiment que les jeux vidéo ont des effets thérapeutiques bénéfiques pour leurs patients, enfants ou adultes. Tisser une relation de confiance entre le thérapeute et le patient, recréer de l'estime de soi, faire parler l'enfant renfermé, ou bien accéder à une partie de l'inconscient… Alors que certaines structures hospitalières, comme l'hôpital Marmottan à Paris, ouvrent des consultations pour soigner les "drogués du jeu vidéo", ces professionnels ont fait le pari inverse : celui du jeu vidéo qui fait du bien.

"UNE VOIE ROYALE D'ACCÈS À L'INCONSCIENT"

François Lespinasse, aujourd'hui à la retraite, a été le premier psychologue en France à utiliser les jeux vidéo en thérapie, en partenariat avec l'infirmier José Perez, et ce dès 1995 à l'hôpital de jour de Bordeaux. Il s'occupait d'enfants inhibés voire autistes, ayant des difficultés de communication. "Il faut les voir comme des enfants dans une bulle, mais avec des hublots. On ne va pas forcer l'ouverture de ces hublots, mais l'enfant peut décider de les ouvrir." Les jeux vidéo sont une manière d'y arriver. "Les jeux vidéo sont une source d'échange avec les autres, ils peuvent en parler avec d'autres camarades. On peut les socialiser par ce biais-là."

Si François Lespinasse utilisait les jeux Super Mario 2 et 3 pour créer un lien et socialiser l'enfant replié, Yann Leroux, psychologue à Périgueux, se sert de la console comme d'autres usent du dessin ou de la pâte à modeler pour "faire parler" le jeune patient. "Dans les thérapies avec les enfants, les jeux vidéo deviennent de plus en plus l'équivalent des rêves : une voie royale d'accès à l'inconscient", écrit-il. Une approche similaire à celle de Michael Stora, psychanalyste à Paris, pour qui "le jeu vidéo est un prétexte pour affronter des représentations".

Pour cela, les deux psychologues se servent principalement du jeu Ico, jeu japonais sorti en 2001 sur PlayStation 2. Dans ce dernier, un enfant, Ico, est enfermé dans une forteresse isolée par les habitants de son village, persuadés que les cornes sur sa tête sont signe de malheur. Ico rencontrera Yorda, une jeune fille mystérieuse et fragile, qu'il devra protéger à tout prix des ombres qui tentent de l'empêcher de fuir de l'édifice.

"La trame narrative d'Ico est inspirée du conte, explique Yann Leroux. L'abandon et la mise au ban du personnage principal permettent une identification facile pour l'enfant." Lors d'une séance, un jeune patient de Yann Leroux, qui souffre de troubles de l'apprentissage dus à de l'inhibition intellectuelle et affective, essaiera par tous les moyens de jeter dans le vide Yorda, qu'il ne supporte plus de devoir protéger tout le temps. En discutant avec lui après la séance de jeu, l'enfant évoque son petit frère et sa petite sœur dont il doit s'occuper. "Il m'explique alors qu'il a mieux à faire que de jouer au parent avec eux…" Yann Leroux met cependant en garde : "Ce n'est pas parce qu'on donne un jeu que l'on lit dans l'inconscient à livre ouvert. L'usage du jeu vidéo ne facilite pas forcément les choses."

LE JEU VIDÉO NE GUÉRIT PAS À LUI SEUL


Les professionnels qui utilisent ce média posent plusieurs garde-fous à l'utilisation du jeu vidéo en thérapie. Le premier, et probablement le plus important, est de casser l'idée selon laquelle le jeu vidéo va guérir à lui seul. Il fait partie d'un panel de supports thérapeutiques, dont l'ensemble va permettre au patient d'aller mieux. "Ce n'est pas le jeu vidéo tout seul qui va soigner, c'est un tout, affirme Philippe Gérard, infirmier en hôpital psychiatrique. Le jeu vidéo aide à la confiance, il permet de vivre des choses extraordinaires sans rien risquer."

Contrairement à ses confrères psychologues, Philippe Gérard a lancé un atelier jeux vidéo pour adultes dans un grand hôpital psychiatrique parisien. L'objectif premier est de "sortir les patients de l'isolement et les occuper car les journées sont longues". Mais le jeu vidéo permet également de créer une relation de confiance entre le soignant et des personnes abîmées, dépressives ou handicapées. "La confiance va 100 % plus vite qu'avec des médicaments. On leur a tellement menti, on les a tellement violentés… ils ne peuvent pas faire confiance facilement. Avec le jeu, on partage." Si les patients peuvent jouer entre eux, l'infirmier participe également aux parties de jeux de tennis, de foot ou de course…

Philippe Gérard n'hésite pas à parler de "nourriture spirituelle positive" dans le cadre de ces ateliers. "C'est très important de les féliciter lorsqu'ils réussissent, car ces patients n'ont aucune confiance en eux, le plus souvent car ils ont manqué d'amour enfant." Pas question pour autant de les laisser gagner  : "Ils n'ont pas envie qu'on leur mente et qu'on se fiche d'eux. Néanmoins, si le patient fait beaucoup d'efforts et que ça ne marche pas, je peux perdre volontairement."

CADRES ET RÈGLES

L'infirmier insiste sur le besoin de cadres et de limites pour que l'exercice soit efficace. "Le jeu peut être un anxiolytique, à condition que ça ne soit pas fait n'importe comment. Si tout le monde peut participer, il faut néanmoins discuter avant pour voir si la personne peut gérer une activité de trente à quarante-cinq minutes." Les ateliers ont également lieu un jour précis de la semaine, à une heure fixée. Le jeu vidéo n'est pas en libre service.

Ces règles sont également utilisées dans les thérapies pour enfants. L'atelier a lieu un jour dans la semaine – souvent le mercredi pour les hôpitaux de jour – et dure rarement plus d'une heure. Chaque séance est toujours accompagnée d'un moment de parole, avant ou après le jeu, selon les thérapeutes. Et pendant le jeu, les enfants, souvent en petits groupes de trois ou quatre, ne sont pas livrés à eux-mêmes. Un médiateur est là pour fixer un cadre, faire passer la manette si l'un des enfants refuse d'arrêter sa partie, aider en cas de difficulté…

Pour cela, "il est essentiel que l'animateur soit à l'aise avec les jeux vidéo, sinon cela ne sert à rien !" prévient François Lespinasse. Ce dernier précise qu'il n'aurait pas pu mener son atelier pendant dix ans sans l'aide de José Perez, infirmier et féru de jeux vidéo. "José avait plaisir à y jouer, et il faut avoir du plaisir à jouer avec les enfants."

RÉSISTANCE DES COLLÈGUES

Cette nécessité d'être soi-même joueur de jeu vidéo explique peut-être en partie l'isolement de cet outil de soin dans le paysage médical. En ouvrant le premier atelier jeu vidéo en 1995, François Lespinasse pensait que "les José Perez étaient nombreux, mais en fait, pas du tout !" La retraite du psychologue et le changement d'affectation de l'infirmier ont conduit à la fermeture de l'atelier de Bordeaux. Celui de Philippe Gérard, qui aura duré cinq ans, n'a pas non plus survécu à son départ dans un autre hôpital psychiatrique de la région parisienne. Et si Michael Stora se targue d'un taux de réussite de plus de 80 % lors des sept années durant lesquelles il a utilisé le jeu vidéo auprès d'enfants au centre médico-psycho-pédagogique de Pantin, il estime avoir été poussé vers la sortie après avoir été copieusement sifflé par des collègues alors qu'il expliquait le but de sa thérapie avec Ico. Aujourd'hui, il exerce en libéral.

Bien souvent, la première source de résistance à l'instauration d'ateliers jeux vidéo provient des confrères, et pas des parents. "En 1995, les jeux vidéo étaient assez neufs, et on n'avait pas beaucoup de recul dessus, se remémore François Lespinasse. Il y avait beaucoup de défiance au sein des collègues, qui avaient peur que le jeu vidéo ne devienne une source d'angoisse pour les enfants. Avec l'accord du médecin, nous avons commencé avec des enfants souffrant de pathologies moins lourdes, et ils ont vu que cela marchait."

Pourtant, près de quinze ans plus tard, les professionnels rencontrent toujours les mêmes difficultés. "Cela a été très dur au niveau des collègues et de la hiérarchie, soupire Philippe Gérard. Il y avait beaucoup de réticences et d'idées reçues : ça n'apporte rien, vous faites ça juste pour vous amuser, vous n'allez quand même pas leur faire tuer des gens…" L'infirmier insiste sur "l'énorme investissement" personnel que demande un tel atelier, qui se réalise en hôpital psychiatrique en sus des horaires de travail classiques à l'initiative de quelques soignants. "Tout le monde n'a pas forcément l'énergie nécessaire."

Philippe Gérard a renoncé à l'idée de monter un autre atelier jeux vidéo dans son nouvel hôpital, estimant que le personnel n'est pas assez motivé. Les choses changeront-elles avec la nouvelle génération, biberonnée au jeu vidéo ? Michael Stora n'est pas très optimiste : "Lors des stages en formation continue que j'anime sur le sujet, je constate que ce sont les jeunes praticiens qui sont les plus frileux."

Pour en savoir plus :

Un atelier thérapeutique jeu vidéo en hôpital de jour pour jeunes enfants, par François Lespinasse et José Perez.
Histoire d'un atelier jeu vidéo : Ico, un conte de fée interactif pour des enfants en manque d'interactions, par Michael Stora.
Le jeu vidéo comme support d'une relation thérapeutique, par Yann Leroux.
Chloé Woitier


Le jeu vidéo c'est bon pour la santé.
16 Février 2011



Allez hop, 2 liens balancés comme ça, fort intéressants, qui explique que le jeu vidéo peut être bénéfique pour la santé mentale:

Le premier est un article paru le 11/02/11, sur le site internet du Monde, célèbre journal français, qui raconte l'utilisation du média jeu vidéo en psychiatrie, autant chez les enfants que chez les adultes, et cela dans un but thérapeutique, en lisant ces lignes vous aurez une idée de l'atelier jeu vidéo que j'anime moi-même dans le centre médico-psycho-thérapeutique où je travaille.

Le second, est paru sur Kotaku, il parle d'une étude de l'Est Carolina University's Psychophysiology, où ils ont fait jouer 60 sujets présentant des symptômes de dépressions, à des Puzzle game de Popcaps games, des jeux comme par exemple : Bejelewed 2, Peggle entre autres. Un des résultats de cette étude est qu'ils ont pu noter une réduction de 57% des symptômes de dépression chez les sujets ayant joués à ces jeux. Pour relativiser, il faut savoir que l'étude a été menée par l'université, mais aussi avec le "soutien" de PopCap games, quoiqu'il en soit vous pouvez télécharger le powerpoint de l'étude directement depuis Kotaku.

 
Par contre, il est encore loin le temps, où votre psychiatre vous prescrira 2 heures de call of Duty pour vous défouler et évitez de trucider votre famille après une petite déprime, mais pour redevenir sérieux et pour revenir à mon expérience personnelle, il est vrai que la pratique du jeu vidéo en atelier thérapeutique peut être bénéfique pour le patient et cela sur plusieurs points....
Mais c'est une autre histoire.... 


Le centre de psychanalyse et de psychothérapie Évelyne et Jean Kestemberg

Le Centre de psychanalyse et de psychothérapie, fondé en 1974 par Jean Kestemberg est un centre de consultations et de traitements psychanalytiques pour adultes. Il a une autonomie théorique, clinique et pratique à l’intérieur du Centre Philippe Paumelle, du fait de l’orientation spécifiquement psychanalytique des psychothérapeutes qui y travaillent avec des patients fonctionnant majoritairement sur un mode psychotique ou présentant des troubles graves de la personnalité.

Le choix a été fait dès sa fondation de créer le Centre dans un lieu distinct, qui offre au patient, si nécessaire, la possibilité de bien différencier la fonction psychiatrique de la fonction psychothérapique et ainsi de mieux se protéger de la menace anéantissante d’être englobé par un objet unique, souvent caractéristique de ces patients. La fonction tierce de l’institution s’appuie également sur ce personnage tiers représenté par la fonction du Directeur, conformément à l’approche définie par Évelyne Kestemberg, directrice du Centre de 1975 à 1989. Différentes modalités de travail psychanalytique sont possibles, en fonction des indications : cure-type sur le divan pour certains patients pouvant en bénéficier ; plus souvent, travail psychanalytique en face à face, psychodrame analytique, travail psychanalytique à médiation corporelle, prise en charge analytique par un couple de psychothérapeutes.

L’articulation avec les intervenants en psychiatrie qui ont également en charge ces patients permet à la fois coexistence d’espaces distincts et interactions. Le personnel est constitué d’un directeur psychanalyste, M. Alain Gibeault, d’une cinquantaine de psychanalystes qui travaillent tous à temps partiel et d’une secrétaire à temps plein, Mme Madiha Mioui. Les psychanalystes sont pour un tiers médecins psychiatres et pour deux tiers psychologues cliniciens.

Le Centre de psychanalyse et de psychothérapie est non sectorisé. Toutefois la priorité est réservée aux habitants du 13e arrondissement qui nous sont adressés soit par les équipes psychiatriques sectorisées du 13e arrondissement, soit par d’autres centres de soins, soit par des collègues exerçant en libéral.

Le Centre de psychanalyse et de psychothérapie E. et J. Kestemberg n’est pas seulement un centre de traitement pilote en France pour le traitement des patients psychotiques mais également un centre de formation et de recherche :

   * La formation de jeunes analystes à la spécificité du travail avec des patients psychotiques est l’un des axes majeurs. Ainsi, des supervisions de groupe ou individuelles sont mises en place. Des séminaires cliniques et théoriques sont également proposés, soit aux psychanalystes du centre, soit en interaction avec les psychiatres de l’ASM 13, soit ouverts à des thérapeutes extérieurs.
  
* La recherche théorico-clinique constitue une autre priorité. Le Centre est maintenant un lieu internationalement reconnu d’étude sur l’abord psychanalytique de la psychose. Trois journées scientifiques (les Samedis du Centre) sont organisées chaque année autour d’un thème choisi dans cette direction. Des analystes de différents pays (Russie, Iran, Maghreb, Italie, Turquie, etc.) visitent le Centre et s’informent sur son fonctionnement. Enfin Le Centre a publié, dès les années 1980, " Les Cahiers du Centre de psychanalyse du 13e", revue scientifique fondée par E. Kestemberg, témoignant d’une réflexion sur le travail clinique et théorique réalisé au Centre, et depuis 2001, "Psychanalyse et Psychose", publication annuelle devenue une référence dans le domaine de la recherche sur la psychose.

Le Centre de psychanalyse et de psychothérapie Évelyne et Jean Kestemberg
11, rue Albert-Bayet, 75013 Paris
01 40 77 44 68
 LABORATOIRES EXPANSCIENCE
16-02-2011

FONDATION MUSTELA - BOURSES ET PRIX RECHERCHE-ACTION : Appel à projets 2011


Nous vous informons du lancement des appels à candidature pour les Bourses et Prix de Recherche-Action de la Fondation Mustela.

Pour cette nouvelle édition, la Fondation Mustela attribuera :

> Une ou plusieurs Bourses doctorales ou post-doctorales pour une dotation totale de 12 000 €
à des étudiants ou à des chercheurs qui ont rédigé ou ont en projet une thèse de doctorat ou des travaux de recherche post-doctorale correspondant aux objectifs de la Fondation Mustela.

> Un Prix de Recherche-Action pour une dotation de 8 000 € pour financer un projet mené par des praticiens de terrain et/ou des chercheurs sur le thème « Être parents aujourd’hui ».

Les dossiers de candidatures sont accessibles sur le site de la Fondation Mustela : www.fondationmustela.com

Ils devront être complétés en ligne ou déposés au plus tard le 3 juin 2011 auprès de la Fondation Mustela.

Un Comité scientifique sélectionne et pilote les projets. Il est composé de professionnels représentant la psychiatrie et la neuro-psychiatrie, la psychanalyse, la pédiatrie, la psychologie, la sociologie et la linguistique (sic !)

mercredi 16 février 2011

Algérie : Face au nombre important de malades à l’hôpital psychiatrique de Frantz fanon : De plus en plus d’infirmiers abandonnent la profession
Visiter les services de l’hôpital de psychiatrie Frantz fanon à Blida c’est franchir un pas dans le monde de la folie. Cet hôpital forteresse de plus de 1000 lits est surchargé. Il n’arrive plus à contenir le grand nombre de malades mentaux transférés chaque jour sur décision de justice ou du wali.

Il est 11 heures. A l’entrée de cette grande structure de santé, un fleuriste. En fait c’est un patient qui est devenu au fil du temps un locataire de l’hôpital. Il occupe une petite échoppe pour vendre des fleurs qu’il cultive lui-même dans des parties du terrain réservé à l’ergothérapie.

Dans la cours et les couloirs de l’établissement, les malades mentaux errent en demandant, sans agressivité aucune, aux passants une pièce de 10 dinars « pour prendre un café ou acheter une boite de chique ». Face à leur grand nombre, les infirmiers qui s’occupent de leur prise en charge n’arrivent plus à assumer leur mission. Ici ce sont de cinq à six infirmiers qui s’occupent de plus de 80 patients par service.

«Nous n’avons ni la patience ni l’envie de continuer à assumer notre travail. A force de trop côtoyer les malades nous devenons malades comme eux», explique un des rares techniciens supérieurs de santé (TSS), spécialisé dans la psychiatrie. Il exhibe un certificat signé par un psychiatre l’autorisant à changer de service. «J’avoue qu’après avoir passé plus de vingt ans dans cet hôpital, je suis devenu moi-même coléreux et agressif. Je suis à la limite d’une dépression. Ici, c’est la porte de la folie.

Je ne peux plus continuer. Imaginez la souffrance de quelqu’un qui gère un handicapé chez lui et vous pouvez avoir une idée de notre travail, nous qui gérons plus de 80 patients avec chacun sa propre infirmité», explique l’infirmier qui évoque le suicide de son collègue l’infirmier, Bachir Silmi, 43 ans, TSS avec 20 ans d’expérience. L’homme a décidé, il y a une semaine de mettre fin à sa vie en s’ouvrant la carotide à l’aide d’un bistouri. Cet acte fatidique, dont la cause reste à déterminer par les enquêteurs, a ébranlé tout l’hôpital.

Il a aussi suscité la colère des paramédicaux notamment ceux qui assurent les services de psychiatrie sans la moindre prise en charge psychologique ou motivation pécuniaire. Le chef du service psychiatrie Ibn El-Djezzar, se souvient très bien des deux dernières heures précédant le drame. Selon lui, Bachir Silmi était très serein et lucide ce jour là. « Il a même pris en charge le dossier d’un malade qui venait d’être admis à l’hôpital.

Nous étions ensemble avant qu’il ne rejoigne un autre pavillon pour faire un travail », se souvient-il. En une heure, c’est-à-dire, entre 15h00 et 16h00, l’homme a décidé de passer à l’acte. « Nous l’avons trouvé, le pauvre dans une mare de sang », raconte le responsable du service. Un autre infirmier, explique que le comportement du suicidaire a changé ces derniers mois.

«Il a commencé par s’absenter puis à s’isoler et à vouloir toujours travailler seul mais son dévouement envers les malades était sans faille. Probablement il avait un problème familial, mais je reste aussi convaincu que ce métier peut mener au suicide aussi», explique l’infirmier en évoquant les mauvaises conditions de travail et les risques du métier. Des risques qui peuvent aller jusqu’à l’assassinat.

Ainsi l’infirmier Moussaoui a été tué par un malade mental. «On a même baptisé un service à son nom», fait savoir l’infirmier pour qui il est temps de changer de service pour « éviter le suicide ou la dépression ». Cette situation est également vécue par les psychiatres. Pour ces professeurs le vrai problème réside dans la faiblesse de l’encadrement des malades.

UNE FORMATION INEXISTANTE


A défaut d’une formation au métier d’infirmier spécialiste en psychiatrie qui a disparu après une seule session dans les années 80. Et c’est cette promotion qui s’est chargée de former des infirmiers à la prise en charge psychiatrique. Ils sont devenus des TSS sans titre. « Ils sont là, ils ont appris le métier sur le tas et sont devenus des paramédicaux spécialistes en psychiatrie.

Alors pourquoi ne pas les régulariser puisqu’il n’y a pas cette politique de formation ou de recrutement ?», s’interroge l’infirmier. Pour lui, beaucoup ignorent le danger, quand il y a une agitation dans le groupe des malades mentaux.

«Un malade qui devient hystérique vaut l’agitation de dix personnes. En plus, dès qu’il commence à crier, les autres patients s’agitent à leur tour », explique l’infirmier qui signale que l’hôpital accueille des pensionnaires qui ont une ancienneté de plus de 40 ans. «La folie est une chronicité qui ne tue pas. Donc, pour les travailleurs qui prennent soin de ces malades, c’est l’enfer, sinon c’est la contagion».


Le sexe sous antidépresseur : un médicament bouscule le tabou
Par Charlotte Chabas

15/02/2011

Dès le premier rendez-vous, son médecin lui a prescrit un antidépresseur. Depuis, sa vie sexuelle s'est « comme fanée », raconte Nathalie : « Je ne jouis plus. J'essaie de ressentir cette partie de mon corps, mais elle ne répond plus. »

Une nouvelle molécule bientôt commercialisée aux États-Unis redonne toutefois espoir à ceux qui ont le sentiment de payer au prix fort le traitement de la dépression : plus envie de sexe, plus de sensation, des problèmes nouveaux avec leurs partenaires, et pas d'avertissement, le plus souvent, de la part des prescripteurs.

« Je l'ai découvert tout seul, aucun des médecins que j'ai consultés ne m'avait prévenu », dit Christian, 33 ans, qui doit choisir entre une vie sociale supportable ou une vie de couple. Ce nouvel antidépresseur, « c'est peut-être la fin de [son] calvaire ».

En janvier, la FDA (Food and drug administration, équivalent américain de l'Afssaps), a donné son accord pour la commercialisation du Viibryd, le premier antidépresseur « sex-friendly ». D'après les tests, ce traitement n'aurait aucun effet secondaire sur la sexualité des patients. Contrairement à la majorité des antidépresseurs actuels.

Un phénomène « encore sous-évalué »


« Conserver sa libido malgré les médicaments », un argument commercial de poids pour le laboratoire à l'origine de la molécule, qui espère conquérir le marché très lucratif de l'antidépresseur. Un moyen aussi de lever le tabou sur ce sujet délicat, qui toucherait pourtant près d'un dépressif sur deux.

Le phénomène est difficile à chiffrer. Selon les études, il concerne entre 40% et 50% des personnes sous antidépresseurs. Pourtant, Patrick Blachère, psychiatre et enseignant en sexologie, l'estime « encore sous-évalué » :

« Les études sur les antidépresseurs se concentrent sur le début du traitement, soit les huit premières semaines. Pendant cette période, l'état du patient s'améliore et les effets positifs du médicament l'emportent sur les effets secondaires. Ce n'est que dans un second temps, quand le patient va mieux, qu'il réalise ses troubles sexuels, et que la souffrance se fait sentir. »

En France, le tabou dès la prescription

Le psychiatre espagnol Angel Luis Montejo s'est penché sur la question. D'après lui, cet effet secondaire serait le motif d'arrêt invoqué par un patient sur deux. Après analyse, il a aussi montré du doigt le comportement des médecins qui prescrivent les antidépresseurs.

Si en Grèce, en Italie et en Espagne, la sexualité est librement abordée avec les patients pendant les rendez-vous, ce n'est pas le cas dans les pays plus au nord. En France, tous les témoignages concordent en ce sens. Pour Nathalie, le dialogue est impossible :

« Je n'osais pas parler à mon médecin. Lui-même ne m'avait jamais prévenue que ça arrivait souvent aux malades sous antidépresseurs. Quand on est dépressif, on se dit toujours que le problème vient de nous. J'ai été soulagée quand j'ai découvert que ce n'était pas ma faute. »

En France, plus de 80% des antidépresseurs sont prescrits par les médecins généralistes. Les docteurs « de famille » sont donc les premiers confrontés à la souffrance des patients dépressifs. Mais les effets secondaires sont passés sous silence selon Marc Soussan, médecin à Paris :

« Spontanément, on ne parle pas de cet effet secondaire. La pudeur des patients joue beaucoup, même si de plus en plus d'hommes parlent de leurs difficultés. C'est sûr, ce n'est pas la bonne solution de laisser les patients lire les notices, mais pour en parler, il faudrait du temps. Beaucoup de temps. »

Manque de temps ou stratégie médicale


Une consultation de quinze minutes en moyenne, ce n'est pas suffisant pour évoquer tous les problèmes liés à la dépression. Mais dans la revue Impact Santé, le professeur Hélène Verdoux, chef de service en psychiatrie au CHU de Bordeaux, minimise la responsabilité des médecins :

« Il est facile d'accabler les généralistes en dénonçant le fait qu'ils prescrivent trop d'antidépresseurs, mais quelle autre solution ont-ils et quels moyens leur donne-t-on pour répondre à des gens présentant des symptômes dépressifs ? Qui va réaliser les psychothérapies : les psychologues non remboursés ? Les psychiatres souvent inaccessibles ? »

Taire les effets secondaire entre aussi dans une stratégie médicale, pour certains docteurs. Car le premier organe sexuel, c'est le cerveau, rappelle le psychiatre Patrick Blachère :

« En parler de but en blanc, c'est aussi prendre le risque d'induire des symptômes. C'est difficile dans un traitement de faire la différence entre ce qui relève du physique et ce qui révèle du psychosomatique. »

« Bricoler » avec les produits disponibles

Devant le mutisme du corps médical, beaucoup de dépressifs cherchent leurs réponses ailleurs. Sur les forums, les appels à l'aide se multiplient. Olivier y délivre des avis, donne ses « petits trucs » pour palier les effets des antidépresseurs.

Comme beaucoup d'hommes dépressifs, il prend en complément de son antidépresseur du Cialis. Un comprimé comparable au Viagra, qui agit pendant trente heures contre cinq pour le célèbre pilule bleue. Mais à 75 euros la boîte de huit comprimés, la sexualité n'est pas donnée à tout le monde :

« J'en avais besoin parce que ça touchait à l'image que j'avais de moi. Ce n'est pas la panacée, mais ça me rend à peu près présentable. »

Un « bricolage » que connaît bien le psychiatre Bertrand Gilot. Régulièrement, ses patients lui parlent de leurs difficultés à éprouver plaisir et désir. Ensemble, ils
cherchent le meilleur moyen de réduire cette souffrance tout en poursuivant
leur traitement.

Des solutions encore rares


Changement de médicament ou compléments stimulants, les solutions ne sont pas nombreuses. Mais l'enjeu est important : éviter » la mauvaise observance » des patients, c'est-à-dire leur tendance à ne pas respecter les consignes du traitement. Et le risque de les voir retomber dans la dépression.

Auteur du livre « Antidépresseurs : faut-il en prendre ou pas ? », Bertrand Gilot résume :

« Le corps médical considère que les antidépresseurs actuels sont très bien tolérés, par rapport à ceux prescrits il y a vingt ans. D'autant plus que le sexe, chez un dépressif, ce n'est pas vraiment une priorité. Il y a plus urgent. A tort ou à raison, on s'imagine que ce n'est toujours que secondaire. »

Aujourd'hui, l'espoir suscité par cette nouvelle molécule américaine est minimisé par la plupart du corps médical. Le psychiatre Patrick Blachère reste prudent. Il évite le terme de « remède miracle » :

« Rien n'assure que ce médicament sera vraiment efficace. Il existe déjà des antidépresseurs qui ont un effet moindre, voire nul sur la libido. Mais ce ne sont pas les plus prescrits parce que leur effet sur la dépression est insuffisant. »

Parmi les dépressifs, beaucoup préfèrent rester optimistes. Ils espèrent pouvoir mettre fin à « la douleur de l'érection » ou « au silence d'un rapport sans jouissance ». Un premier pas vers la guérison.
USP : Boycott des pseudo-concertations sur la loi réformant les modalités de prise en charge psychiatrique

A propos de l’audition du mardi 15 février 2011 par M. Guy Lefrand, député, rapporteur du « Projet de loi relatif aux droits et à la protection des personnes faisant l’objet de soins psychiatriques et à leurs modalités de prise en charge »

L'Union Syndicale de la Psychiatrie communique


"Après l’adoption du projet de loi sur les soins sans consentement, portant réforme de la loi du 27 juin 1990, par le conseil des ministres du 26 janvier 2011, et la volonté du gouvernement d’utiliser la procédure parlementaire accélérée, L’USP constate le refus du gouvernement d’engager une véritable concertation sur le bilan de la loi de 90, bien qu’elle ait été prévue dans cette loi après 5 ans d’application. Elle dénonce la promulgation d’une loi indigne d’un état démocratique d’atteinte aux libertés individuelles et aux droits fondamentaux, qui repose sur la généralisation du soin contraint des patients, au nom de victimes de violences exceptionnelles.

Ni le « soin sans consentement » en ambulatoire, et particulièrement à domicile qui s’annonce comme un traitement contraint sans fin, ni la période d’observation de 72 heures en cas d’urgence conçue comme une véritable garde à vue psychiatrique — les deux sans garanties juridiques — ont à voir avec le respect humain de la souffrance psychique, et dénient l’incontournable temps nécessaire au travail relationnel avec les patients et les tiers dans l’accès aux soins et de leur continuité. De même, l’instauration d’un « casier psychiatrique » stigmatise à vie toute personne ayant été une fois dans sa vie hospitalisée sous contrainte.

Ce recours au tout sécuritaire accompagne la nouvelle gouvernance, administrative et comptable, qui détruit depuis plusieurs années l’accès et la continuité aux soins psychiques en démantelant des pans entiers de la psychiatrie publique.

Pour ces raisons, L’Union Syndicale de la Psychiatrie a décidé de boycotter les pseudo-concertations, en particulier celle du 15 février 2011.

Elle se déclare prête à être auditionnée, dans des conditions enfin dignes, par la commission des affaires sociales de l’Assemblée Nationale et la commission des lois du Sénat pour faire valoir sa position."
L'ère de la batonnite (dans les roues)
 Le progrès tuera l'homme… mais en attendant il casse les bonbons aux infirmier(e)s. Par Didier Morisot, infirmier en psychiatrie

(Version longue d'une chronique parue dans L'Infirmière magazine n°272, 1er février 2010)

En devenant infirmier, je ne pensais pas qu’il fallait (dans certains services) taper sur un clavier pendant des heures. Eh oui, le mal est universel mes amis ; le but final de toute institution n’étant pas de remplir sa mission initiale, mais bien de justifier son existence à l’aide de moyens statistiques et comptables, on n'a pas fini de pianoter… entre nous, le scénario est identique au Pôle Emploi, à la Sécurité sociale et même dans les commissariats ; là-bas, ils appellent ça la batonnite : mettre des bâtons dans les cases afin d’alimenter les chiffres de la délinquance. Tout en caressant le ministère dans le sens du poil, bien sûr…

Facile ; un dealer arrêté avec cinq doses, ce n’est pas une affaire résolue, mais cinq délits solutionnés. Par contre, dix voitures vandalisées au même endroit ne font qu’un seul cas de dégradations de matériel. Elle est pas belle, la vie ?

J’avoue, je suis un scélérat ; moi aussi j’ai pactisé avec la batonnite afin d’avoir la paix. Dans ma carrière, il m’est en effet arrivé de céder à la pression ambiante ; il faut faire du chiffre, les gars… en clair, cliquez rusé ; la santé des gens, on s’en tape, le service rendu, on s’en cogne. Vous comprenez ; les restrictions budgétaires, la facturation à l’activité, tout ça tout ça…

Et je ne parle pas de l’accréditation, cette invention bizarre à mi-chemin de l’écran de fumée et de la sodomisation des mouches…

Priorités inversées

J’avais déjà quitté les urgences, saoulé par les papiers ; les blessés ont mal ? Eh bien, on va déjà s’occuper des formulaires (un quart d’heure), et s’il nous reste du temps, on leur filera un antalgique. Ne rigolez pas, c’est du vécu…

Bref, l’administratif tuera le soin, un(e) infirmier(e) passant volontiers la moitié de son temps au téléphone ou devant son écran. Pour une meilleure efficacité, au service du patient ; et ta sœur, elle compte les poux sur la tête du facteur ?

Marre de travailler comme une bille, marre d’inverser les priorités ; j’ai trop souvent vu des collègues se ramasser une méga soufflante pour une inversion de paperasses, alors que certains comportements très limites ne déclenchaient jamais le moindre courant d’air. Ne rigolez pas, c’est encore du vécu.

Par contre, le jour où vous serez hospitalisé, vous aurez le droit de pleurer…

Encore et toujours la lutte à l'hôpital
Bourges
mardi 15 février 2011


En ce jour de Saint Valentin, on ne peut pas dire que ce soit les grandes amours entre le personnel et la direction du centre hospitalier psychiatrique George-Sand, en conflit depuis plusieurs semaines à propos de la suppression des gardes médicales de nuit sur les sites de Dun-sur-Auron et Chezal-Benoît.

Une délégation des syndicats CGT et Sud Santé a été reçue le 8 février dernier par le délégué territorial de l'agence régionale de santé. Estimant n'avoir obtenu aucune réponse à leurs revendications, les manifestants ont décidé de poursuivre l'occupation du hall d'accueil administratif du site casalais jusqu'à hier, jour de l'inauguration de la blanchisserie et de l'Unité de psychiatrie au long court.

Dès 14 heures, les responsables syndicaux, le personnel du Centre hospitalier, mais également des retraités de l'établissement, des commerçants casalais et des élus locaux étaient présents devant les bâtiments de la blanchisserie pour montrer leur mécontentement à Louis Cosyns, député-maire de Dun-sur-Auron et président du conseil de surveillance du centre hospitalier George-Sand, Jean-Paul Servier, directeur de l'établissement hospitalier et président du directoire, et Jacques Laisné, directeur général de l'Agence régionale de santé du Centre.

Banderoles, drapeaux et trompettes accompagnaient les deux cents personnes présentes, solidaires de ce mouvement de contestation, sous l'oeil vigilant de la gendarmerie installée à proximité.

Face à cette opposition, les responsables ont tenté de rejoindre le deuxième bâtiment à inaugurer, mais sans succès, les issues étant également bloquées par les manifestants.

Devant cet état de fait, Jean-Paul Servier repartait à Bourges et exprimé le souhait d'une rencontre avec les syndicats sur le site de Beauregard (site principal du centre hospitalier George-Sand, à Bourges). Mais ces derniers préfèrent une entrevue à Chezal-Benoît. Devant le refus de la direction, ils ont décidé de poursuivre leur mouvement d'occupation du hall d'accueil casalais.
Daniel Leduc


Les Livres de Philosophie

La profondeur des sexes. Pour une mystique de la chair
Fabrice Hadjadj


Quel est le sens profond du sexe ? Atteindre le septième ciel ? Sans doute, et très littéralement. Religion du Dieu fait chair, le christianisme est aussi celle de la chair divinisée.
La libido est désormais un secret de polichinelle. Rien n’est moins inconscient, rien ne s’affiche davantage. Il ne faut pourtant pas se leurrer. La libération sexuelle pourrait bien être une ceinture de luxure aussi cadenassée que la ceinture de chasteté. L’hypersexualisation actuelle pourrait même cacher une haine du sexe. Comme à ses premiers siècles, le christianisme se retrouve alors aujourd’hui dans la situation singulière d’avoir à chanter la gloire du corps, la spiritualité de la chair, et à lui redonner sa dimension spirituelle.
En analysant successivement la spécificité de la sexualité humaine, le couple et la signification de l’union charnelle, puis celle de la naissance, cet essai montre en quoi la sexualité nous dépasse et tente de saisir son mystère ultime.  (Présentation de l’éditeur)

Février 2011 – Points – 9 €
Les Livres de Philosophie

Le corps en acte. Centenaire Maurice Merleau Ponty
Alain Berthoz et Bernard Andrieu (ed.)


Le centenaire de la naissance de Maurice Merleau-Ponty a été l'occasion de tenir un colloque international au Collège de France les 22 et 23 septembre 2008 par les Pr Alain Berthoz (Professeur au Collège de France et titulaire de la Chaire de physiologie de la perception et de l'action) et Bernard Andrieu (Pr d'Epistémologie du corps et des pratiques corporelles à la faculté de sport de l'UHP de Nancy Université) en réunissant nos collègues Salvatore M. Aglioti, Olaf Blanke, Gilles Boëtsch, Denis Cerclet, Nathalie Depraz, Stéphanie Dupouy, Anne Fagot-Largeault, Denis Forest, Jean Gayon, Béatrice de Gelder, Julie Grezes, Gérard Jorland, Marc Jimenez, Bernard Lafargue, Dorothée Legrand, Pierre Livet, Catherine Malabou, Lionel Naccache, Jean-Luc Petit, Philippe Rochat, Michel Récopé, Emmanuel de Saint-Aubert, Richard Shusterman, Bérangère Thirioux.

Les travaux de Maurice Merleau-Ponty (1908-1961), titulaire de la Chaire de philosophie au Collège de France à partir de 1952 jusqu’à sa mort en 1961, sont aujourd’hui une des références sans laquelle la philosophie du corps, la physiologie de la perception et de l’action, la psychologie du développement et la modélisation in vivo des gestes n’auraient pu constituer leurs champs actuels de recherche : Schéma corporel, Image du corps, Conscience du corps, Chair, Intersubjectivité, Perception… autant de notions encore au cœur des sciences de l’homme et de la nature.

Janvier 2011 - Presses universitaires de Nancy – 20 €


Musique
Michel Serres

« D’où jaillit la Musique ? Des bruits du monde ? Des clameurs issues des assemblées ? De nos émotions ? Et comment la définir ? Rien de plus difficile que de répondre à ces questions.
J’ai préféré dire ce qu’elle est en trois contes. Légendaire, le premier suit la vie d’Orphée, son initiation auprès des Bacchantes et des Muses, puis sa plongée dans les Enfers à la recherche d’Eurydice, son amante. Comment aimer en Musique ? Autobiographique, le second envahit le Grand Récit de la connaissance qui devient ici une Grande Symphonie. Peut-on penser en Musique ? Biblique enfin, le dernier psalmodie, de la Genèse à la Nativité.
Doit-on prier en Musique ? »
Michel Serres

Mars 2011 – Le Pommier – 17 €

Les Livres de Psychanalyse

Les intentions du corps. Psychanalyse, biologie et sciences de l’esprit
Mathieu Arminjon

Présentation de l’éditeur. Alors que nous sommes entrés de plain-pied dans le siècle du cerveau, on peut se demander s’il reste encore une place pour le projet freudien. Or, si la psychanalyse veut renouer le dialogue avec les sciences contemporaines, c’est certainement du côté de son enracinement biologique que tout se jouera. Pour autant, le positionnement du freudisme vis-à-vis des sciences biologiques n’est pas sans poser quelques problèmes. La psychanalyse se présente en effet comme une discipline protéiforme dont la cohérence interne peut paraître discutable. Le freudisme relève en effet d’un double projet contradictoire. D’un côté, il prétend procéder à une naturalisation du psychisme, c’est-à-dire à l’explication des mécanismes psychiques selon les lois et la méthode des sciences naturelles (physique, biologie). De l’autre, il entend établir une herméneutique des productions psychiques, et attribuer à cet exercice un statut à la fois heuristique et thérapeutique. Présenté ainsi, il semble s’attaquer frontalement à ce qui oppose, depuis toujours, sciences de la nature et sciences humaines. Devant le gouffre séparant le freudisme de lui-même, certains ont appelé la psychanalyse à renoncer à l’une ou l’autre de ses deux ambitions. La présente étude se donne pour but principal de montrer comment le double projet freudien s’avère bien fondé dès lors qu’il ne s’agit pas de penser ses deux versants sur un continuum, mais sur le mode d’une articulation méthodologique pertinente. Malgré  les différences de lexique, de mode d’exposition, au-delà même des tentatives de décrédibilisation, le projet freudien peut encore jouer un rôle au sein des débats qui animent les sciences de l’esprit les plus contemporaines".

Mathieu Arminjon est philosophe et détient un doctorat en sciences de la vie. Il est collaborateur scientifique aux hôpitaux universitaires de Genève ainsi qu’à la fondation Agalma.

Manger des baies pour la prévention du Parkinson

Selon une étude présentée au Congrès de l’American Academy of Neurology, que l’on soit homme ou femme, manger régulièrement des baies est un bienfait pour réduire la probabilité de développer une maladie de Parkinson. Pour la gent masculine, le fait de consommer des pommes, des oranges ou plus précisément tous aliments riches en flavonoïdes apporte une réduction supplémentaire du risque. Les flavonoïdes sont aussi appelés vitamine P, qui est trouvée non seulement dans les plantes et les fruits (baies, agrumes…), mais aussi dans le chocolat, le vin, le thé. L’étude a porté sur 49 281 hommes et 80 336 femmes. Un logiciel a été utilisé pour calculer la consommation de vitamine P, puis une association a été cherchée avec la maladie de Parkinson. Au cours du suivi (22 ans), 805 personnes ont développé un Parkinson. On observe une réduction de 20 % du risque chez les plus gros consommateurs de flavonoïdes masculins, tandis que chez les femmes, l’association favorable n’apparaît que pour la consommation de baies (Xiang Gao et coll. Harvard).
Dr BÉ. V

14/02/2011
Un jour dans leur monde

C'est l'hôpital psychiatrique au sens populaire du terme. Ils y séjournent quelques jours ou des années : les patients affectés par des maladies mentales diverses y vivent dans un rapport à la réalité généralement altéré, voire annihilé.

Reportage.


Dans le hall de Bellevue, une dame âgée est assise à une table, elle ne bouge pas, absorbée par ce qu'elle seule sait. « Elle reste là toute la journée, comme ça. C'est sa place. Parfois, un autre patient la rejoint », indique Pierre Girardet, le chef de la psychiatrie. Aux temps ignorants où l'on parlait encore des « fous », on eut désigné Bellevue du mot « asile ». Tout ceci est révolu. Surtout à Bayonne où la psychiatrie est un service du centre hospitalier. Mais l'homme du dehors ne peut le nier : y pénétrer relève de la confrontation.

Toute l'hospitalisation publique du Pays basque se fait entre ces murs, dans le quartier Cam de Prats. « Vous avez en ce moment 119 patients. Ils sont ici pour des durées variables. Cela peut-être pour quelques jours. Certains sont là depuis deux ans. » La variété des cas explique celle des séjours. Un seul point commun à tous : ces patients « décompensent » (lire par ailleurs), ont un commerce souvent difficile avec la réalité.

« Des millions… »


Bien des peurs se greffent sur la notion très vaste de maladie mentale. La faible fraction des cas spectaculaires nourrit craintes autant que fantasmes. La statistique, elle, reste imperméable : « Sur les 119 patients actuellement hospitalisés, une ou deux personnes sont potentiellement dangereuses», situe le médecin psychiatre. «J'ai connu ailleurs un patient qui avait mangé sa fille. Ici, ce sont plutôt les patients qui sont victimes d'une société qui n'est pas faite pour eux. »

Au premier étage, l'aile « Errobi ». « C'est un service difficile, avec des pathologies lourdes. » On y entre comme dans n'importe quel autre : pas de verrou, l'attention des infirmières et aides médico-psychologiques (AMP) suffit. « C'est un service ouvert », insiste Josiane, infirmière depuis vingt ans en psychiatrie. « On n'est pas sans arrêt à les surveiller. Les patients nous suivent de très près. C'est même plutôt nous qui essayons de nous en défaire. »

Passe justement l'un d'eux, papy à l'air goguenard. A notre adresse : « Des millions, des millions, des millions… » Puis s'en va. « Vous avez de la chance, sourit Josiane. Il vient de remplir votre compte en banque de millions d'euros. Patrick (1) fait la fortune des gens par le pouvoir de la pensée. » Force mentale également employée à guérir de mille maladies. Patrick fait aussi les rois. Lors d'un précédent passage, nous étions pour lui « M. le maire ».

Cigarette autorisée

Le bonhomme tient dans ses mains un paquet de « Lucky Strike ». La cigarette compte parmi les singularités des « la psy ». Un patio permet d'en griller une. « C'est une dérogation à l'hôpital », éclaire Pierre Girardet. Et « une sorte d'anxiolytique », reconnaît Laure, une autre infirmière. Elle travaille dans le pavillon voisin, « la Rhune », équipé d'un fumoir. L'équipe médicale y traite la crise. Souvent, les malades arrivent du service des urgences psychiatriques, basé sur le site de Saint-Léon. « Un délire peut durer dix, quinze jours. »

La crise peut-être violente. Une « chambre d'isolement » vient d'être créée. Dans une chambre « classique », on observe des détails qui situent ce service de la raison évaporée : une caméra, le miroir de la salle de bain facilement amovible, le lit n'a pas d'angles mais des arrondis, il est scellé au sol… Dans une porte, un trou, œuvre d'un malade. Sur un mur, une couche de peinture détonne : « Le mur a été refait, il était défoncé », renseigne Laure.

Retour à « Errobi ». Quelques chambres demeurent fermées. « Des patients dangereux pour eux-mêmes et les autres », désigne Jessy. Parmi eux, il y a Mickaël. « Vous voulez le rencontrer ? On va le lui demander. » Avant d'entrer : « Vous devriez enlever vos lunettes, il aime bien. » Ni meubles, ni effets. Tout objet présente un potentiel de blessure pour ce garçon d'une vingtaine d'années. Le jeune homme est couché dans un coin, sur un matelas. « Tel que vous le voyez, il a beaucoup progressé. Je l'ai vu dormir nu sur une simple bâche », confie Josiane.

Mickaël porte un casque, pour le protéger lorsqu'il se cogne la tête contre les murs. La vitre de la porte d'entrée est brisée : c'est lui. « Du verre sécurité… » Le garçon peut développer une force terrible. Josiane relève sa manche droite sur un avant-bras rougi. « Il ne m'avait pas vue depuis longtemps, il m'a saisi le bras et a serré très fort. Ça n'avait rien d'agressif. »

Seul

Il ne parle pas, Mickaël. « mais il communique et il comprend ». Le regard et les gestes permettent l'échange. A ces attitudes, les infirmières comprennent qu'il n'a pas vraiment envie de nous voir. Alors nous sortons. Depuis le couloir, on entend son cri profond.

Quel sens a la vie de Mickaël ? Quelles possibilités d'accomplissement ? Plus simplement de plaisir ? « Son état oscille. Dans les bons moments, on peut l'amener à la piscine, manger au Mc Do. Il faut être modeste », préconise Pierre Girardet. L'ordinaire parfois bousculé n'est pas rien. Et c'est toujours avec le personnel de l'hôpital. Car plus personne ne vient voir Mickaël. « Les gens, comme lui, dont plus personne ne veut, on les trouve ici. »

(1) Tous les noms des patients ont été modifiés dans cet article.

IMMERSION Le Centre hospitalier de la Côte basque, grand vaisseau aux 3 000 employés et 1 200 lits est en pleine restructuration. Pendant sept semaines, tous les lundis, « Sud Ouest » pose son regard sur quelques aspects de sa vie. Aujourd'hui, la psychiatrie.

Bayonne · Pyrénées-Atlantiques


dimanche 13 février 2011

Critique"Leçons sur la volonté de savoir. Cours au Collège de France, 1970-1971", de Michel Foucault : Michel Foucault en toute liberté

LE MONDE DES LIVRES


Alors que paraissent ses premiers cours au Collège de France, plusieurs ouvrages permettent de réévaluer le legs de celui qui est aujourd'hui le philosophe le plus lu et le plus commenté de la deuxième moitié du XXe siècle. L'occasion pour son compagnon Daniel Defert de rappeler que "les pistes qu'il explorait étaient interprétables selon des idéologies conflictuelles
" et qu'aucune lecture univoque ne saurait épuiser la richesse d'une telle œuvre.


Considéré comme un extrémiste pour sa défense des minorités et des exclus, attaqué par les historiens qui le jugeaient trop philosophe et par les philosophes qui le trouvaient trop historien, accusé d'avoir soutenu la révolution islamique en Iran en 1979, voué aux gémonies par des puritains fous qui virent en lui un assassin transmettant le sida, Michel Foucault est aujourd'hui, plus de vingt-cinq ans après sa mort, le penseur de la deuxième moitié du XXe siècle le plus lu et le plus commenté dans le monde, autant par les spécialistes des études culturelles et les tenants du libéralisme que par les post-marxistes et les théoriciens de la littérature, de l'art et de l'histoire des sciences. Aucune lecture univoque ne saurait épuiser la richesse d'une telle œuvre.

Proche de la deuxième gauche, Foucault a laissé un immense héritage conceptuel, permettant une nouvelle approche universelle de la sexualité, de la folie, de la médecine, de la psychopathologie, de la philosophie et des grands savoirs institués : science, économie, politique, droit. Il est mort trop tôt pour avoir le temps d'aborder tous les thèmes qui le hantaient. Du coup, le rassemblement des textes et entretiens (Dits et écrits, Gallimard, 1994) et l'établissement des cours qu'il donna au Collège de France, de 1970 à 1984, qui s'ajoutent à des ouvrages classiques somptueusement écrits, n'en sont que plus fascinants : on y trouve pêle-mêle toutes les formes d'une pensée en perpétuelle effervescence.

En 1970-1971, pour la première année de son cours au Collège de France - ces Leçons sur la volonté de savoir qui paraissent aujourd'hui et annoncent l'ensemble à venir -, Foucault décide de montrer, à travers un commentaire des grands textes de la Grèce ancienne (Hésiode, Aristote, Homère, Sophocle, les Sophistes), éclairés par Kant, Spinoza et Nietzsche, comment chaque époque produit des discours visant à départager le vrai et le faux, le juste et l'injuste, le pur et l'impur. En un mot, il s'agit pour lui de mettre en évidence comment, derrière l'ordre apparent des mots et des choses, se constituent des énoncés transgressifs : désordres, rituels, césures, failles.

Ainsi s'affrontent sans cesse plusieurs types de savoirs, entre volonté de souveraineté et désir de vérité : haute autorité monarchique de l'Un, d'une part, disparité engendrée par la négation de toute unité, de l'autre.

Au cœur de ces Leçons, Foucault consacre un chapitre entier à la pièce de Sophocle, Œdipe roi, qui témoigne, selon lui, et de façon emblématique, d'un moment originel d'affrontement, pour la pensée occidentale, de tous les types de savoirs. Il donnera six variantes de ce commentaire, après la conférence du 12 mars 1971, "Le savoir d'Œdipe", ajoutée ici par l'éditeur dans ce volume programmatique.

Pour éviter que ne se réalise l'oracle d'Apollon, qui lui avait prédit qu'il serait tué par son fils, Laïos, époux de Jocaste et descendant de la famille des Labdacides, remet son nouveau-né à un serviteur après lui avoir percé les pieds. Au lieu de le conduire au mont Cithéron, celui-ci le confie à un berger qui le donne à Polybe, roi de Corinthe sans descendance. Parvenu à l'âge adulte, Œdipe, croyant fuir l'oracle, se rend à Thèbes. Sur le chemin, il croise Laïos et le tue au cours d'une rixe. Il résout l'énigme de la Sphinge puis épouse Jocaste qu'il n'aime ni ne désire et dont il aura quatre enfants. Quand la peste s'abat sur la cité, il enquête pour savoir la vérité que Tirésias, le devin aveugle, connaît. Un messager, l'ancien serviteur, lui annonce la mort de Polybe mais lui raconte aussi comment il l'a recueilli autrefois des mains du berger. Jocaste se pend et Œdipe se crève les yeux.

Pour les Grecs, Œdipe est un héros tragique atteint de démesure. Il se croit puissant par son savoir et sa sagesse mais il est contraint de se découvrir autre que lui-même, une souillure qui trouble l'ordre des générations, un "boiteux", fils et époux de sa mère, père et frère de ses enfants, assassin de son géniteur.

Lorsque Freud s'empare de cette affaire en 1896, il détourne la signification grecque de la tragédie pour faire d'Œdipe un héros coupable de désirer inconsciemment sa mère au point de vouloir tuer son père, liant ainsi la psychanalyse au destin de la famille bourgeoise moderne : destitution du père par les fils, volonté d'une fusion avec la mère, comme figure première de tous les attachements affectifs.

Critiquant cette réinvention freudienne, Foucault affirme que la tragédie œdipienne met en scène l'affrontement entre différents types de savoirs : procédure judiciaire de l'enquête, loi divinatoire, souveraineté transgressive, savoir des hommes d'en-bas (le messager, le berger), connaissance vraie du devin. Et il en tire la conclusion qu'il s'agit là d'un schème fondateur : tout savoir unificateur peut être battu en brèche par le savoir d'un peuple et par celui du sage (Tirésias). En devenant impur, Œdipe perd le savoir sur la vérité, il ne peut plus gouverner : "Œdipe ne raconte pas la vérité de nos instincts et de notre désir, affirme Foucault, mais un système de contrainte auquel obéit, depuis la Grèce, le discours de vérité dans les société occidentales."

On voit donc ici de quelle manière Foucault se confronte au discours psychanalytique, dont il fait un moment de la constitution d'un nouveau savoir sur l'homme. Et c'est pourquoi, en 1976, dans La Volonté de savoir, premier volume d'une Histoire de la sexualité, dont le titre est emprunté à ce premier cours, il transformera Freud en une sorte d'Œdipe réinstituant le pouvoir symbolique d'une souveraineté perdue (la loi du père) mais affrontant la montée en puissance des trois figures rebelles de la femme hystérique, de l'enfant masturbateur et de l'homosexuel. Manière de penser les fondements d'une histoire de la psychanalyse.

Mais, au-delà de cette confrontation, ce superbe commentaire d'Œdipe traduit la conception politique de Foucault. Loin de tout anti-humanisme - terme dont il avait horreur -, il fait de la liaison entre le savoir du sage et celui de la société civile la condition de l'émergence d'un véritable discours démocratique capable de renverser les souverainetés archaïques.

L'établissement du cours par Daniel Defert à partir de notes manuscrites, sa présentation, la bibliographie et les index - dont un des termes grecs - sont parfaits. Voilà donc une belle restitution de la parole foucaldienne, à travers laquelle on a l'impression d'entendre la voix métallique du philosophe s'adressant à la foule de ses auditeurs, sans le moindre effet oratoire, avec parfois ses deux mains posées le long de son visage.

LEÇONS SUR LA VOLONTÉ DE SAVOIR. COURS AU COLLÈGE DE FRANCE, 1970-1971, suivi de "Le savoir d'Œdipe" de Michel Foucault. Edition établie sous la direction de François Ewald, Alexandro Fontana et Daniel Defert. Gallimard/Seuil, "Hautes études", 318 p., 23 €.

Un Cahier de L'Herne consacré à Michel Foucault paraîtra le 2 mars.


Elisabeth Roudinesco

samedi 12 février 2011

"Foucault va au cinéma", de Patrice Maniglier et Dork Zabunyan : quand le philosophe fait son cinéma

LE MONDE DES LIVRES
Critique

10.02.11

Dans Ce qu'aimer veut dire (POL, voir "Le Monde des livres" du 7 janvier), où il raconte son amitié avec Foucault, Mathieu Lindon évoque la petite bande de copains qui avait l'habitude de se retrouver dans l'appartement parisien du philosophe, au début des années 1980. L'écrivain y utilise souvent le mot "séance" pour décrire une sociabilité fondée sur la consommation simultanée de drogue et de films. Pendant leurs "trips" d'acide, en effet, Foucault et ses fidèles regardaient Citizen Kane ou un épisode des Marx Brothers. C'était toute une organisation, qui entraînait parfois quelques complications : "On a juste commis l'erreur de ne pas avoir installé l'écran et, surtout, le projecteur et la première bobine avant la projection qui a lieu à l'autre bout de l'appartement, écrit Lindon, (...) ça met un temps fou, notre état nous rendant peu aptes à ce genre de manipulations techniques."

Que le cinéma puisse faire tourner la tête, ou du moins qu'il soit apte à bousculer notre existence, et même à y faire surgir des questions vertigineuses, cela relevait de l'évidence pour Foucault. Du reste, sans avoir jamais bâti une véritable "théorie" de l'expérience filmique, les textes qu'il lui a consacrés ont beaucoup nourri la critique et la pratique du septième art. Dans un bref essai intitulé Foucault va au cinéma, Patrice Maniglier et Dork Zabunyan méditent cette rencontre du producteur de concepts avec l'image en mouvement. Leur livre est rédigé d'une plume solide, claire, enthousiaste. A l'instant de le refermer, on voudrait pouvoir se réfugier dans une salle obscure avec, pour tout viatique, une lampe de poche et les oeuvres de Foucault.

La démarche des deux jeunes philosophes ne relève pourtant pas de ce que l'on nomme désormais la ciné-philosophie. Loin d'envisager le cinéma comme un support qui viendrait simplement porter la philosophie à l'écran, les auteurs le définissent comme "un partenaire, un rival, une inspiration, où s'expérimente ce que veut dire, concrètement, penser autrement". Ici, l'effort consiste donc à repérer "les relais, voire les courts-circuits qui peuvent exister entre la production cinématographique et les livres de Foucault", comme le souligne Dork Zabunyan.

A cette fin, les auteurs étudient le fonctionnement de plusieurs films : non seulement Moi, Pierre Rivière, ayant égorgé ma mère, ma sœur et mon frère, de René Allio (1976), directement inspiré de l'ouvrage éponyme de Foucault, mais aussi Nuit et brouillard, d'Alain Resnais (1955), ou Hitler, un film d'Allemagne, de Hans-Jürgen Syberberg (1977). A chaque fois, il ne s'agit pas de constater que ces films illustrent les thèses de Foucault sur la sexualité, la folie ou le pouvoir, mais de montrer que cet art se confronte aux mêmes problèmes et les explore selon ses propres modalités.

Parmi ces problèmes proprement métaphysiques, les auteurs insistent sur notre rapport au temps, notre façon de distinguer passé et présent, bref sur notre manière de vivre l'histoire. Au fond, écrit Patrice Maniglier, la pensée de Foucault et la pratique du cinéma posent une seule et même question : qu'est-ce qu'un événement ?

L'une comme l'autre opèrent un même pas de côté, ou plutôt un même décadrage par rapport aux repères établis : elles ont en commun de chercher un devenir alternatif, plein de ruptures et de discontinuités, irréductible au temps des chronologies ; elles partent en quête d'un rapport non légendaire au passé, qui ferait de l'histoire tout autre chose qu'un savoir figé : un outil critique à l'égard du présent.

FOUCAULT VA AU CINÉMA de Patrice Maniglier et Dork Zabunyan. Bayard, "Logique des images", 168 p., 21 €.

Signalons que la parution de ce livre s'accompagne d'une programmation spéciale à la Villa Arson de Nice. Jusqu'au mois d'avril, une cinquantaine de films y seront projetés afin de montrer comment les questions posées par Foucault peuvent se trouver explorées au cinéma. Tél. : 04-97-03-01-15. Sur le Web : Villa-arson.org.



« Hallucinantes » révélations sur Chopin

Mozart mort à 35 ans, Schubert à 31, Mendelssohn à 38, Schumann à 46, Arriaga à 21... Génie musical et longévité ne font pas forcément bon ménage. Chopin en est un autre exemple, fauché dans la fleur de l’âge, à 38 ans, non pas de tuberculose comme on le croyait jusqu’à présent mais, selon des chercheurs polonais, d’une fibrose kystique, maladie génétique qui atteint les poumons. Hypothèse qui n’a pu être étayée cependant, le gouvernement polonais refusant qu’on fasse un test ADN sur le cœur du compositeur, conservé à Varsovie. Mais ce n’est pas tout, d’autres chercheurs, espagnols, cette fois-ci, appartenant au service de radiologie et de neurologie de l’hôpital de Lugo ont cherché à comprendre l’origine des hallucinations dont souffrait le compagnon de George Sand à travers justement les témoignages de celle-ci.

« Je vis émerger du piano ces créatures maudites »

Dans leurs travaux publiés dans Medical Humanities, un des titres du groupe BMJ, les deux neurologues rapportent plusieurs exemples des hallucinations dont fut victime Chopin. Ainsi, dans une lettre à la fille de George Sand, le compositeur rapporte qu’au cours d’un concert privé à Manchester, alors même qu’il interprétait sa Sonate en si mineur, il fut contraint d’abandonner précipitamment son instrument : « Je vis émerger du piano ces créatures maudites apparues déjà par une nuit lugubre dans un monastère ». George Sand avait déjà raconté dix ans avant cet épisode que le cloître du monastère de Majorque « était pour lui plein de terreurs et de fantômes » et qu’une autre fois, toujours aux Baléares, alors qu’il pleuvait fort et qu’ils se promenaient, Chopin s’était mis à confondre rêve et réalité, se voyant « noyé dans un lac », persuadé qu’il était « d’être mort lui-même ». Parfois, encore, des fantômes l’appelaient ou l’étreignaient quand ce n’est pas la mort qui frappait à sa porte...

Dans leur étude, les chercheurs espagnols notent que Chopin se souvenait parfaitement de ses hallucinations qui survenaient en général le soir et qu’elles coïncidaient à des épisodes de fièvre ou d’infection aiguë. Dans ces hallucinations visuelles, l’image de la mort revenait souvent. Autant d’éléments qui font penser aux chercheurs de Lugo que Chopin soufrait dune épilepsie, focalisée sur le lobe temporal. En effet, ce type d’épilepsies produit des hallucinations visuelles brèves et fragmentaires, s’accompagnant d’un sentiment d’angoisse intense, « exactement comme celles dont Chopin disait souffrir », conclut Manuel Vazquez Caruncho et Francisco Branas Fernandez.
L’ARS Ile-de-France met le cap sur le médico-social

L'Agence régionale de santé (ARS) d'Ile-de-France a annoncé mardi qu'elle engagerait près de 125 millions d'euros supplémentaires sur trois ans pour permettre la création de plus de 6.000 places dans le secteur médico-social (accueil des personnes âgées et handicapées). «44,9 millions seront dédiés aux établissements et services en faveur des personnes âgées dépendantes et 79,2 M seront alloués aux structures et services en faveur des personnes handicapées», a indiqué l'ARS dans un communiqué, précisant qu’un «effort plus particulier sera déployé pour la Seine-Saint-Denis et pour Paris.»




Nos gènes lisent-ils le DSM ?

C’est pratiquement devenu un lieu commun de dire que l’autisme « relève des troubles psychiatriques ayant la plus forte connotation d’hérédité » rappelle l’éditorialiste de The American Journal of Psychiatry. Pourtant, les recherches permettant de corroborer cette thèse courante restent confinées à « une poignée » d’études sur des jumeaux et à des échantillons de population généralement réduits. De surcroît, alors que plusieurs études ont déjà éclairé l’aspect génétique dans certaines affections psychiatriques chez l’adulte (troubles anxieux, dépressions, addictions et, plus récemment, troubles de la personnalité), il existe moins de travaux comparables sur la composante génétique en pédopsychiatrie.

Autre constat : nos modèles (patterns) étayant la susceptibilité génétique  (inhérente à certains troubles psychiatriques) ne s’identifient pas aux catégories du DSM actuelles. L’auteur résume ce fait en des termes pittoresques : « Nos gènes ne semblent ni avoir lu le DSM-IV, ni respecté particulièrement les catégories diagnostiques que ce manuel a établies ! » Cette présentation sarcastique souligne les limitations de nos schémas physiopathologiques et nosographiques : malgré leur pertinence éventuelle, ceux-ci ne restent que des approches parcellaires pour cerner la complexité des situations réelles. Dans l’exemple des « troubles du spectre autistique » (TSA, selon l’expression consacrée en anglais, pour autism spectrum disorders), la problématique révèle une « forte connotation héréditaire » (highly heritable), mais partage cette susceptibilité génétique avec plusieurs autres affections pédopsychiatriques : TDAH[1], tics, troubles de l’apprentissage, etc. Par exemple, presque 75 % des facteurs de risque génétique relatifs aux TSA sont partagés avec le TDAH. Et dans les fratries officiellement « non touchées » des sujets avec autisme, environ 9 % de leurs proches présentent toutefois des antécédents de retard de langage ou de traits autistiques.

Si nos gènes ne se conforment pas à notre nosographie, celle-ci devra donc, tôt ou tard, se conformer aux réalités génétiques.

[1] Troubles déficitaires de l’attention avec hyperactivité
Dr Alain Cohen

Kendler KS : Advances in our understanding of genetic risk factors for autism spectrum disorders. Am J Psychiatry 2010 ; 167-11 :1291–1293.
Publié le 28/01/2011
Inégalité de fréquence des maladies mentales, reflet des inégalités sociales

Des études ont montré qu’une répartition équitable des revenus dans un pays est corrélée de manière directe avec des indicateurs comme l’indice de confiance ou l’état de santé, et de façon inverse avec le taux de violence. En particulier, rappellent les éditorialistes du British Journal of Psychiatry, « les maladies mentales sont plus fréquentes dans les sociétés plus inégalitaires. » Dans une société basée sur la concurrence, expliquent-ils, cette association reflète la « sensibilité humaine aux relations sociales et à l’impact de la différence des revenus sur la hiérarchie sociale. »

Et cette vulnérabilité aux inégalités socio-économiques touche aussi l’Europe : au Royaume-Uni, le fardeau des troubles psychiatriques (burden of mental health problems) est ainsi très élevé, puisqu’on estime qu’« un million d’enfants (soit 10 % des jeunes britanniques entre 5 et 16 ans) souffrent d’une maladie mentale. » Aperçu : dans un établissement secondaire, sur 1 000 élèves, 50 souffrent d’une dépression sévère, 100 sont « en détresse » (distressed), 15 présentent un trouble obsessionnel compulsif, et 5 à 10 % (surtout des filles) un trouble des conduites alimentaires. Et cela ne s’arrange pas avec l’âge : « Au Royaume-Uni, une enquête menée en l’an 2000 a montré que 23 % des adultes ont souffert d’une affection psychiatrique au cours des douze mois précédents », 4 % connaissant même « plus d’un trouble. » Constat identique aux États-Unis : « Un Américain sur quatre est concerné par une problématique psychiatrique dans l’année écoulée et, au cours de leur vie, plus de la moitié des adultes éprouvent une maladie mentale. »

Selon des données collectées par l’OMS [1], cette association observée entre les inégalités sociales et la fréquence des maladies mentales concerne les pays riches, sauf l’Italie qui se distingue par « un niveau de troubles psychiatriques plus faible que celui attendu en fonction de ses inégalités de revenus. » Doit-on y voir une conséquence de sa fameuse loi 180 [2] , un hasard heureux, ou l’effet d’une exception culturelle (ou autre) ?

[1] http://www.hcp.med.harvard.edu/wmh/
[2] http://italie.alliance-psychiatrie.com/
Dr Alain Cohen

Pickett KE et Wilkinson RG : Inequality: an underacknowledged source
of mental illness and distress. Br J Psychiatry 2010; 197: 426-428.

Publié le 01/02/2011

Les  Livres de Psychanalyse

Mort et travail de pensée. Points de vue théoriques et expériences cliniques
François Pommier et Régine Scelles


Février 2011 – Erès – Coll. La Carnet psy

Tout deuil sollicite le sujet et ses liens aux autres et lui rappelle douloureusement son ontologique dépendance à l'autre.
La perte d'un être cher est transformée par la pensée afin que l'espace qu'a occupé l'absent soit modifié ; faute de pouvoir remplacer l'autre, on le recrée. La création, le travail de pensée que suscite la confrontation à la mort sont évoqués dans ce livre comme ce qui permet au sujet de ne pas mettre en jeu le travail impossible qui viserait à recréer « comme avant », comme si la perte n'avait pas eu lieu, mais permet de devenir « comme après » : reconstruire plutôt que reconstituer.
Les auteurs proposent à la réflexion des dispositifs d'aide qui peuvent être mis en place lors de la perte réelle d'un être cher mais également lorsque les deuils non faits, non terminés resurgissent sur une autre scène, dans une temporalité décalée.


Psychanalyse et Non-Psychanalyse
Psychanalyse théorique / Théorie de la psychanalyse
15 janvier 2011

Que peut la psychanalyse pour les pratiques sociales ?

On peut voir les sciences humaines se donner couramment des "airs" psychanalytiques dans la mesure où, bien souvent, elles utilisent la thèse d'un "inconscient structuré comme un langage" sans toujours reconnaître leur dette à l'égard de la doctrine analytique. Hypothèse : l'"analycité" serait la condition de possibilité des sciences humaines comme le langage est la condition de l'inconscient. Par-delà les prétentions objectivistes (plus ou moins légitimes, ce n'est pas notre problème) de la sociologie et des sciences sociales en général, par-delà l'écriture ambiguë de l'Histoire "entre science et fiction", il reste à établir la dette contractée par les "pratiques sociales" à l'endroit de la psychanalyse, d'autant qu'elles sont directement confrontées à la réalité éthique et politique du sujet. Ces pratiques d'aide sociale, d'éducation, de formation, etc., se fondent toutes sur une forme de transfert mais ne peuvent ni en produire la théorie, ni évidemment se contenter d'importer la technique inventée par Freud (l'association libre et son écoute flottante) dans le cadre de la pratique analytique. Comme la cure, elles font intervenir acte et structure (de langage) mais sans viser les mêmes finalités puisqu'elles ne s'adressent pas au "même" : l'une parle exclusivement au sujet en tant que tel, alors que les autres ont affaire à l'individu socialement aliéné, soit l'assujet.

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vendredi 11 février 2011

Comment traiter la mauvaise observance thérapeutique en psychiatrie ?

Accroître l’efficacité des traitements anti-psychotiques, diminuer de façon significative les rechutes, prolonger les rémissions, améliorer la socialisation, réduire sensiblement le fardeau des dépenses de santé, et les conséquences violentes de ces affections : agressivité, suicide… Si cette utopie médicale devenait réalité : « nous penserions qu’il s’agit d’une percée miraculeuse, digne d’un Prix Nobel, ou d’une nouvelle incroyable » écrit l’éditorialiste du British Journal of Psychiatry. Alors que l’on aurait « simplement » obtenu une meilleure adhésion du psychotique à son traitement.

L’auteur commente en effet une étude hollandaise récente [1], montrant l’impact décisif d’une meilleure observance, à la fois sur la réduction de la symptomatologie (appréciée autant par le malade lui-même que par un observateur) et sur le risque de réadmission ultérieure en milieu hospitalier. Cet « effet puissant » des médicaments psychotropes sur la prévention des rechutes critiques et des hospitalisations constitue d’ailleurs un bon argument pour convaincre les intéressés de poursuivre leur traitement, même lorsqu’ils ne perçoivent pas toujours un mieux-être appréciable au quotidien. Malgré une difficulté intrinsèque dans les essais thérapeutiques sur ce thème (à savoir que les sujets peu enclins à suivre leur traitement ne consentiront pas non plus à participer à ces études, de sorte qu’ils se détournent ainsi de travaux dont ils pourraient être les premiers bénéficiaires !), une telle recherche confirme la pertinence d’une approche psychothérapeutique visant à augmenter l’observance.

Ce type d’intervention (Treatment Adherence Therapy, TAT) représente pour l’auteur une « innovation » importante dans le suivi des patients psychotiques, mais sa portée concrète demeure limitée par le déni des troubles chez les patients et /ou la méconnaissance du bénéfice thérapeutique des médicaments prescrits. Il faut donc poursuivre la recherche du « meilleur format » de ces thérapies promouvant l’observance, guidé par ce que l’auteur appelle « la sagesse » (wisdom), autrement dit par le bon sens du clinicien.

[1] A.B.P Staring & coll. : « Treatment adherence therapy in people with psychotic disorders » : randomised controlled trial » Br J Psychiatry 2010 ; 197-12 : 448–455.
Dr Alain Cohen

David AS : Treatment adherence in psychoses. Br J Psychiatry 2010 ; 197 : 431-432.Publié le 10/02/2011 

Haut les flingues !

Décidément, certaines recherches ne peuvent provenir que du pays de l’Oncle Sam ! Sous prétexte de permettre la « défense de la Constitution » (Second amendement) [1], on sait en effet que les États-Unis ont une politique très laxiste en matière d’armes à feu. Et la conjonction explosive de ce cadre complaisant avec la psychopathologie conduit immanquablement à une prolifération des homicides et des suicides par armes à feu !

The American Journal of Psychiatry propose une étude apportant une information nouvelle : dans cette atmosphère de violence, liée à la possession banalisée d’un « flingue », le risque de suicide par arme à feu est aussi fonction de… l’altitude de l’état ! Au passage, notons que les données sur l’altitude des lieux émanent notamment de la célèbre NASA, une institution rarement évoquée dans les publications psychiatriques !

Une réserve doit être faite toutefois, à propos des données sur la possession des armes à feu, car la législation des États-Unis n’impose pas à leurs détenteurs une déclaration obligatoire (en 2008, la Cour Suprême a même invalidé une loi du District de Columbia imposant cette déclaration à Washington et a réaffirmé « le droit de chaque Américain à posséder une arme »). Par conséquent, la fiabilité des statistiques sur la possession des armes à feu n’est pas assurée, faute de fichier central, et il s’agit au mieux d’estimations réalistes. Néanmoins, on observe une « corrélation positive entre le taux de suicide (après ajustement pour l’âge) et l’altitude de la région » (county elevation).

Cette corrélation positive entre le niveau d’autolyse et l’altitude moyenne du site est retrouvée d’ailleurs pour les suicides par arme à feu comme pour les autres formes de suicide. Selon les auteurs, cette association est indépendante des autres facteurs de risque (comme le nombre d’armes à feu ou la densité de population) et semble traduire un effet délétère propre de l’altitude : celle-ci représenterait en elle-même un facteur de risque particulier, en relation probable avec « les effets du stress métabolique [2] associé à une légère hypoxie », source chronique d’une vulnérabilité neuronale et psychique.

[1] http://fr.wikipedia.org/wiki/Deuxi%C3%A8me_amendement_de_la_Constitution_des_%C3%89tats-Unis
[2] http://fr.wikipedia.org/wiki/Syndrome_m%C3%A9tabolique

Dr Alain Cohen


Namkug Kim et coll. : Altitude, gun ownership, rural areas, and suicide. Am J Psychiatry 2011 ; 168-01 : 49–54.
Publié le 03/02/2011